Pays Charolais-Brionnais
Tout un territoire à embarquer

Françoise Thomas
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Le projet d’inscription du Pays Charolais-Brionnais au patrimoine de l’Unesco poursuit sa route. C’est pour faire le point sur l’avancée du dossier qu’une réunion du comité de pilotage était organisée le 29 janvier dernier à la maison du Charolais à Charolles en présence des représentants de l’État et du Pays charolais, co-porteurs du projet. L’occasion aussi pour le cabinet Grahal de dresser le diagnostic des atouts et handicaps du futur Bien…

Tout un territoire à embarquer
Les membres du comité de pilotage, ici Jean-Luc Mayaud, président du comité scientifique, Jérôme Aymard, sous-préfet, Julien Charles, préfet, François de Belizal, vice-président du PETR et Dominique Fayard, sa directrice, insistent sur l’importance d’obtenir la mobilisation de toute la population autour du projet.

Inéluctablement depuis 2013, année du démarrage du projet d’inscription au patrimoine de l’Unesco, ce dossier poursuit sa route. Études après réunions, discussions après concertations. La séance du 29 janvier dernier à Charolles en était un bel exemple. L’agence Grahal est venue présenter son diagnostic autour de la stratégie de protection du futur bien Unesco (voir par ailleurs Pourquoi protéger ce secteur ?). Un point sur les atouts et les handicaps du territoire nécessaire pour assoir l’argumentaire final, pour ne rien oublier ou négliger au passage.

Cependant désormais, « il faut passer à l’étape suivante, celle de la préparation du plan de gestion du site sur lequel il faut embarquer le plus possible l’ensemble de la population », prévient le préfet. « C’est comme une candidature aux JO », insiste Julien Charles !

Adoptée par tous

Pour lui, décrocher l’inscription ne peut se faire sans l’approbation et la motivation de tout le territoire. Il pense notamment aux jeunes et aux agriculteurs. « Les éléments d’identité et de valorisation de ces paysages doivent être reconnus comme tels » par tout un chacun sur place, pour en convaincre l’instance internationale…

Cette étape d’élaboration est d’autant plus primordiale que cela va concerner « toute la population, concerner tous les acteurs », rappelle François de Belizal, le vice-président du Pays charolais. Et il conviendra de trouver le bon équilibre « pour faire vivre [le secteur] sans le mettre sous cloche ». Les membres du comité de pilotage rappellent que cette inscription au patrimoine mondial de l’Unesco « ne se limite pas à un label touristique, cela doit aussi assurer le développement économique ». Sans oublier que la « menace du changement climatique » entraine beaucoup de questionnements sur l’évolution des paysages, sur l’impact sur les pratiques d’élevage. Celles-là même qui participent grandement au charme de l’ensemble…

Les groupes au travail

La tâche des semaines à venir est donc celle de l’élaboration des groupes de travail. Il y en aura cinq en tout consacrés à l’agriculture, à l’urbanisation, à la protection des paysages et des attributs du paysage, à la protection des attributs bâtis, et enfin au développement économique et à la mise en valeur culturelle du bien. Ils seront constitués de quatre à six personnes chacun, des actifs ou des représentants d’organisme ; ces groupes de travail pourront également faire appel à des personnes ressources. Aurélien Michel, le chargé de projet candidature Unesco et coordinateur de l’ensemble des groupes, a lui insisté sur l’importance de la communication autour du futur plan de gestion à mener localement « pour que le plus grand nombre soit embarqué dans ce projet » ; tout en mettant en place des actions « à destination des jeunes, des touristes, du grand public pour faire comprendre la valeur universelle de ces paysages ».

Des bonnes pratiques reconnues

Une étape « communication », confirmée par Jean-Charles Pallot, éleveur à Oudry, qui a intégré le comité de soutien dès les premières heures. « Il est dommage que la situation actuelle limite toute réunion, car il est vraiment important que tout le monde s’approprie ce projet », population, agriculteurs, politiques, etc.
Et il argumente : « la VUE, la valeur universelle exceptionnelle, prouve scientifiquement que c’est grâce aux agriculteurs et à leur pratique d’élevage extensif que ce morceau de territoire est préservé ». Une véritable reconnaissance pour ce qui serait « le premier bocage classé à l’Unesco ! ». Et l’inscription au patrimoine mondial ne pourrait qu’avoir des répercussions bénéfiques du point de vue touristique, économique, transmissibilité des exploitations... « Le tout dans un cadre évolutif vivant, garanti par le plan de gestion ».

Jean-Charles Pallot tient aussi à souligner que ce projet du Pays, emmené par Dominique Fayard la directrice de la structure, est l’un des rares « à être allé aussi loin avec une équipe si réduite ». Une efficacité qui doit désormais être secondée par l’élan de soutien de toute une population…

Les limites validées

Les limites validées

En septembre dernier, la délimitation du territoire concerné par ce projet Unesco a été validée par le comité des Biens français. Ce zonage comprend le périmètre Unesco en lui-même (près de 30.000 ha, une trentaine de communes) plus une zone tampon (un peu moins de 70.000 ha).

La zone « cœur du Bien » comprend le secteur du plateau du Brionnais, la vallée de l’Arconce et les vallons adjacents. Charolles en est la porte d’entrée au nord, Marcigny sa limite sud-ouest. « L’ensemble forme un paysage de bocage homogène », souligne les chargés d’étude de Grahal, avec des prairies permanentes et très peu de céréales. « Avec des lignes de crêtes qui délimitent une partie de la zone, où se trouvent les RD 10 et 989 », une délimitation naturelle qui confirme sa dimension pittoresque.

La zone tampon, elle, effleure par endroits les limites des départements voisins, Allier, Loire et Rhône et intègre La Clayette, Iguerande et Saint-Bonnet-de-Joux, « plus morcelée et comprenant plus de céréales, elle est un peu moins spécifique ».

Pour cette délimitation, c’est « bien la somme, la combinaison de l’ensemble des attributs qui fait son caractère spécial, représentatif de l’élevage bovin ».

Pourquoi protéger ce secteur ?

Pourquoi protéger ce secteur ?

L’activité d’élevage est au cœur de la structuration de la zone Charolais Brionnais concourant à l’inscription au patrimoine de l’Unesco. Son morcellement en bocage agrémenté de boisements et parsemé de petits villages crée un ensemble au caractère spécifique « représentatif de l’élevage bovin ». Et s’il n’y a pas de sites patrimoniaux remarquables sur le territoire défini, celui-ci abrite plusieurs bâtiments et sites classés : notamment églises, châteaux et l’ensemble du village d’Oyé en tant que berceau historique de la race charolaise. Une zone Natura2000 s’étend sur 15 % au cœur du futur Bien. Le Pays Charolais-Brionnais bénéficie par ailleurs du label Pays d’art et d’histoire et d’un Scot (un schéma de cohérence territoriale) depuis 2014. Pour autant, il convient de préserver cet ensemble sans l’empêcher d’évoluer. Parmi les « menaces » : la pression foncière, conduisant à une urbanisation en mitage avec des constructions nouvelles tranchant avec les différentes formes de bâti existantes ; la problématique normative concernant les énergies renouvelables (ou comment intégrer éolien et photovoltaïque sans dénaturer l’ensemble ?) ; le changement climatique et les sécheresses observées ces dernières années qui conduisent à s’interroger sur la ressource en eau et surtout sur la pérennisation des activités d’élevage ; enfin les pressions sur l’activité d’élevage en général, au-delà du climat, qui se définissent ces dernières années par une évolution des pratiques, voire un abandon de l’activité…