Chambre d'agriculture de Saône-et-Loire
Au programme de la visite "Bout de champ" : cultures de printemps et lutte contre les adventices

Florence Bouville
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Le 26 juin, quelques céréaliers et conseillers se sont réunis à Vindecy, au Gaec Thévenet, dans le cadre d’une des visites "Bout de champ" organisée par la chambre d’agriculture. Occasion de faire le tour de plusieurs parcelles (sarrasin, maïs, soja), en ayant de riches échanges au sujet de la pression et gestion des adventices, des itinéraires techniques, des pratiques d’irrigation…

Au programme de la visite "Bout de champ" : cultures de printemps et lutte contre les adventices
Étude d'une parcelle de maïs grain lors de la visite Bout de champ de la chambre d'agriculture, le 26 juin.

Les quatre parcelles visitées au cours de la matinée font toutes partie d’un îlot irrigué, et ont un sol majoritairement sableux.

Le choix du sarrasin

Depuis quelques années, Régis insère du sarrasin dans ses rotations, et ce pour de multiples raisons. Ayant semé 50 kg/ha (semoir à céréales classique) sur sa parcelle de 6 ha, il espère, cette année, obtenir un rendement de 20 q/ha. Il s’agit d’une « culture intéressante en dérobée », déclare Antoine Villard, conseiller grandes cultures à la chambre. En termes de prix de vente, Régis valorise la tonne à 750 €. Les débouchés se répartissant entre consommation humaine et nourriture à oiseaux. Après la récolte en septembre/octobre, il attendra au minimum trois semaines avant de planter un couvert, suivi d’une nouvelle culture de printemps. "Problème" du sarrasin, sa croissance à caractère indéterminé, à l’instar de la vesce. Autre aspect : les repousses. La première fois, Régis s’est fortement étonné d’en retrouver au milieu de ses cultures de maïs. Toutefois, cela n’interfère pas avec le développement de la culture en cours, les repousses restant assez localisées. Idéale pour accueillir des abeilles, la parcelle de sarrasin en était déjà bien remplie. Régis réfléchit justement à y installer des ruches. Autre avantage de cette culture typique des sols acides bretons : les moindres besoins en eau, constituant une source de motivation essentielle pour le céréalier. De même que les faibles coûts de désherbage. Pas besoin de traitement fongicide ni insecticide. Le sarrasin n’a donc pas encore livré tout son potentiel agronomique, comme le souligne Antoine Villard, « on a encore peu de connaissances concernant sa valeur fourragère ».

Du côté du maïs

Cette année, Régis a planté tardivement sa parcelle de maïs grain (le 27 avril). Au vu de son développement actuel, « il ne sera pas en fleur au 1er juillet », précise-t-il. En termes d’itinéraire technique, il est passé deux fois avec la bineuse (premier binage au stade six feuilles) ; et a traité avec 70 % de dose de Merlin Flexx. Plusieurs pieds montrent du tallage, habituellement moins gênant pour la production de maïs fourrager. Ce phénomène peut être dû à de multiples facteurs de stress climatique, difficiles à identifier précisément. À noter qu’aujourd’hui, tout est fait, d’un point de vue génétique, pour que ce phénomène n’ait pas lieu. Visuellement, on ne constate pour l’instant aucune différence avec la parcelle voisine de maïs ensilage.

D’autre part, avec le recul, Antoine Villard observe de moins en moins de pyrales sur le territoire. En effet, il n’est pas rare que les insectes aient des cycles de pression qui diminuent avec le temps et les pratiques de lutte. Dans le département, les agriculteurs n’ont encore jamais eu recours à des lâchés de trichogrammes via des drones. Néanmoins, certains continuent toujours d’utiliser ce type de biocontrôle.

Le comportement des cultures irriguées

Sans surprise, pour le groupe présent, gestion de l’irrigation rime avec pluviomètre. C’est bien sûr l’outil de base, en sachant que la pluviométrie peut différer d’une parcelle à l’autre. En plus de cet outil indispensable, Régis avait songé, il y a quelque temps, à investir dans un tensiomètre. Seulement, il ne savait pas quel modèle acheter. Actuellement, la chambre n’en a pas non plus à disposition. Pour mieux piloter son irrigation et connaître la potentielle variabilité intraparcellaire, Régis avait déjà fait appel à un prestataire, pour cartographier ses îlots. Mais selon lui, « on n’a pas une hétérogénéité qui justifie un tel dispositif ». En plein été, il irrigue 15 mm pas plus, tous les huit jours environ. En maïs semences, les bilans hydriques hebdomadaires sont systématiquement réalisés par les producteurs, « ce qui pourrait s’appliquer sur d’autres cultures », remarque Antoine Villard.

Le maïs est connu pour être une culture gourmande en eau, il n’y a pas de doute. C’est également celle qui valorise le mieux chaque apport, se traduisant directement sur les rendements. Contrairement au soja qui défolie tôt, le maïs a la capacité de garder le frais et de faire de l’ombre ; ce qui lui assure une plus grande protection. En 2022, la Saône-et-Loire a enregistré ses plus bas rendements pour le soja, depuis 2003. Le maïs a, quant à lui, beaucoup moins souffert.

Dans tous les cas, comme l’avait déjà fait valoir Antoine Villard lors du précédent comité ressource en eau, les agriculteurs irrigants ont des moyens déjà en dessous de leurs besoins. Pour le groupe, il est clair que l’aspect social joue un rôle très important dans le type de restrictions d’usage fixées par les services de l’État. Il est, par exemple, sans doute préférable que les populations ne soient pas témoin, en journée, des consommations agricoles.

L’ambroisie : un problème de santé publique

Comme bon nombre de céréaliers, Régis Thévenet n’échappe pas au "salissement" de certaines de ces parcelles par des pieds d’ambroisie. Cette adventice venue des États-Unis est très concurrentielle. En moyenne, on compte 3.000 graines/plante. Les graines se déplacent via les cours d’eau tandis que les pollens se propagent par le vent. Du fait de leur très petite taille, ces derniers sont fortement allergisants et sont capables de parcourir de grandes distances (plus de 100 km).

Les cultures les plus sensibles à l’ambroisie demeurent le soja et le tournesol. La pression y est très forte. À l’heure actuelle, il n’existe pas de solution réellement efficace pour ces cultures. La stratégie est « de la stabiliser plutôt que de chercher à l’éliminer », précise Antoine Villard. Ainsi, mieux vaut attendre un stade de croissance avancé pour désherber mécaniquement, sinon la plante repart de plus belle et fleurit à faible hauteur, ce qui rend plus compliqué son éradication.

Contrairement au datura, l’ambroisie n’est ni toxique pour l’alimentation animale, ni pour l’alimentation humaine. Même si elle ne pose pas de problème majeur à la récolte, elle cause de nombreuses allergies, au sein de la population. « Les personnes peuvent devenir allergiques en 5-10 ans », explique Agathe Dangel, conseillère chambre, elle-même touchée, à force de côtoyer la plante. Situation grave, des agriculteurs doivent même arrêter leur métier tant les symptômes deviennent importants et fréquents. Dans certains cas, les pertes de capacité respiratoire engendrées par les crises d’asthme à répétition sont malheureusement irréversibles. Ce n’est donc pas qu’une question de proximité immédiate, une parcelle infestée sur une commune va contaminer un rayon large.

En Bourgogne-Franche-Comté, le coût des allergies (consultations médicales et traitement) est estimé à huit millions d’euros. En parallèle des arrêtés préfectoraux, la Fédération régionale de lutte et de défense contre les organismes nuisibles (Fredon) multiplie les campagnes de sensibilisation. Il existe également une plateforme nationale de signalement, accessible à l’adresse : https://signalement-ambroisie.atlasante.fr

Le mini profil 3D

Le mini profil 3D

La réalisation d’un profil cultural permet d’obtenir un grand nombre d’indications (humidité, tassement, richesse en matière organique…). Afin de gagner en rapidité d’observation et de limiter la destruction du sol étudié, la chambre présente une technique faisant intervenir un chargeur télescopique. Ou autrement dit une fourche frontale. Néanmoins, le jour J, la démo a été faite avec un godet (voir l’image). L’interprétation qui en découle assure ensuite un meilleur réglage des machines lors des travaux de décompactage, par exemple. Pas besoin d’être expert pédologue ! À noter qu’après le passage d’un outil mécanique, le profil doit être effectué perpendiculairement au sens du travail du sol.

Le réflexe est d’effectuer ce type de profil sur des cultures productives, seulement il est aussi très intéressant de le faire sur des prairies. « Il faudrait presque être plus pointilleux avec la gestion des sols prairiaux », souligne Étienne Perradin, conseiller d’entreprise du secteur Brionnais-Charollais. Cela paraît évident, mais on n’a jamais assez conscience qu’on ne voit que la partie superficielle du sol. Les phénomènes de tassement, une fois causés, mettent des années entières à disparaître. D’autant plus que les machines actuelles sont de plus en plus lourdes.

La chambre d’agriculture de Saône-et-Loire vous donne donc rendez-vous le 19 octobre prochain, pour suivre une formation à l’analyse de profils, à Charolles.