EXCLU WEB : Coopération agricole : Passer au marketing de la preuve grâce au numérique

La Coopération agricole organisait le 8 octobre un débat autour du thème : « Comment répondre aux attentes des consommateurs grâce au numérique ? ». Le numérique devient un élément incontournable de la confiance du consommateur dans les produits agricoles et agroalimentaires. 

EXCLU WEB : Coopération agricole : Passer au marketing de la preuve grâce au numérique

« Nous sommes à l’aube d’une révolution de l’information dans l’alimentaire », a concédé Xavier Terlet, directeur général ProtéinesXTC, expliquant la volonté des consommateurs d’avoir plus de transparence sur l’origine des produits, les modes de production et d’élevage, même s’ils restent très majoritairement confiants dans la qualité des aliments, « sauf dans les ultratransformés ». D’où leurs velléités à vouloir vérifier ce qu’ils vont mettre dans leur assiette, même si les indications auxquelles ils se réfèrent peuvent être sujettes à caution. Par exemple, l’Ecoscore®, un indicateur représentant l'impact environnemental des produits alimentaires, de l’impact le plus faible (E) au plus élevé (A ), « n’est pas fiable », a clairement dit Jérôme François, directeur général de Num-Alim. Reste que huit consommateurs sur dix s’informent sur leur alimentation, via l’étiquetage notamment, qu’ils sont aussi nombreux à faire confiance aux agriculteurs pour réduire les pesticides (58 %), pour s’engager dans le bien-être animal (46 %) et pour être transparent sur la traçabilité de leurs produits (48 %). « Gagner la confiance du consommateur nécessite de passer d’un marketing de la promesse à un marketing de la preuve » en trois étapes a expliqué Xavier Terlet : la promesse d’un produit de qualité ; la caution d’un tiers avec notamment la labellisation (AOP, IGP, Label rouge) et enfin la preuve, avec un possible système de Blockchain comme celle mise en place par la coopérative Axiane sur sa farine Savoir Terre (lire encadré). Il reste alors à collecter toutes les données qui permettent non seulement de raconter l’histoire du produit mais aussi de prouver que cette histoire est vraie. Là est tout l’enjeu de la “data”, des données que l’agriculteur mais aussi les industriels de l’agroalimentaire ont en leur possession.

« Reprendre le pouvoir sur ces données » 

Une des craintes de la filière agroalimentaire est que la grande distribution impose, à terme, des pénalités “infoproduit” comme elle impose aujourd’hui des pénalités logistiques, a avancé Jérôme François. D’où l’intérêt d’interconnecter et de mutualiser les données comme le fait AgDataHub qui joue en quelque sorte le rôle de « chef d’orchestre » a indiqué Gaëlle Chéruy Pottiau, directrice conseil d’AgDataHub. Mutualiser les données, les traiter, les sécuriser et les valoriser permettra de renforcer l’information au consommateur, a-t-elle ajouté, consciente que le chantier de la standardisation des données d’amont reste encore grand. La captation des données et d’informations est également importante en amont du processus comme l’a rappelé Jérôme François prenant un exemple récent : « Une entreprise avait envoyé une palette de ses bons produits au Canada. Au passage des douanes canadiennes, ces dernières remarquent, sur l’étiquette, la présence d’un additif qui avait été interdit quelques jours auparavant sur le sol canadien. La palette a été détruite sur place. Récupérer de telles données peut éviter bien des mésaventures », a-t-il témoigné. Arnaud Degoulet, vice-président de la Coopération agricole, s’inquiète aussi que ce dossier de la data soit « traitée de manière secondaire dans les coopératives (…) alors qu’elle constitue un élément de croissance et de réassurance » pour l’agriculteur. De plus, « le consentement à l’exploitation des données représente la première brique de confiance », a souligné Gaëlle Chéruy Pottiau,. « Les agriculteurs qui vont collecter jusqu’à un million de données par jour sur leur exploitation à l’horizon 2025 sont sur un tas d’or ». D’où la nécessité de maîtriser l’usage de ces données .« Au secteur de reprendre le pouvoir sur ces données », a-t-elle conclu. 

 

La blockchain de Savoir Terre 

Jérôme Goulet, directeur commercial GMS, a présenté la blockchain du paquet de farine “Savoir Terre” commercialisé par la coopérative Axiane, troisième meunier français. « C’est la première farine tracée dès le champ et sécurisée par Blockchain », a-t-il assuré. Pour apporter de la valorisation à un produit dont le prix moyen de vente avoisine 0,60 euros, il faut répondre aux attentes du consommateur. Celui-ci veut des « informations transparentes » sur l’origine géographique des matières premières, la composition de la liste des ingrédients, le lieu de fabrication et les conditions de production. Si la coopérative n’a eu aucun mal à récolter les données auprès de leurs neuf agriculteurs fournisseurs en blé, leur traitement s’est révélé plus compliqué. « Il fallait en effet sélectionner les plus pertinentes pour que le consommateur comprenne le cheminement et ait confiance », a-t-il expliqué. Sécurisée par la blockchain l’information permet au consommateur, grâce à un QR Code, de suivre l’histoire de la farine, de l’exploitation à sa cuisine. Plus d’1,2 million de sachets de farine “Savoir Terre” ont été vendus en deux ans, au prix d’environ 1,09 euros le sachet d’un kg. « Le consommateur est prêt à payer plus cher car il existe une différenciation qu’il peut vérifier », a analysé Jérôme Goulet.