EXCLU WEB / Les Français vigilants sur l’eau

D’après le dernier baromètre Kantar/Centre d’information sur l’eau, les Français sont de plus en plus soucieux de la quantité et de la qualité des eaux qu’ils consomment. Leurs comportements se sont d’ailleurs modifiés au cours de la dernière décennie.

EXCLU WEB / Les Français vigilants sur l’eau

« L’accès à l’eau n’est plus garanti à tous. Il faut y voir une leçon des sécheresses vécues ces dernières années », a indiqué Marillys Macé, directrice du Centre d'information sur l'eau (CIE) qui présentait le 12 décembre les derniers résultats du baromètre « Les Français et l’eau ». Selon ces chiffres, le stock en eau renouvelable a diminué de 14 % entre 1990 et 2018, en passant de 229 milliards de m³ (Mdm³) d’eau à 196 Mm³. Il faut cependant rappeler que la pluie et la neige apportent plus de 500 Mdm³ d’eau par an, auxquels s’ajoutent 11 Mdm³ en provenance de pays voisins. La seule évaporation affiche environ 300 Mdm³ soit presque 60 %. Il n’en reste pas moins qu’en juin dernier, le débit des cours d’eau était « de 40 % inférieur à la normale ». Surtout, à la mi-décembre, 17 départements étaient toujours concernés par une alerte sécheresse, plus ou moins importante, sur une partie de leur territoire qu'ils soient en "alerte simple", en "alerte renforcée", ou "en état de crise". Neuf autres départements étaient toujours placés en "vigilance", c'est-à-dire que la population est simplement invitée à faire attention à sa consommation. « C’est inédit », a souligné Marillys Macé.

REUT

Ces conditions jouent sur la perception (lire encadré) des Français. Beaucoup s’inquiètent de l’impact du changement climatique sur la quantité et la qualité de l’eau. S’ils étaient 32 % à craindre un manque d’eau en 1996, ils sont maintenant 69 % à penser que leur région pourrait venir à manquer d’eau, indique l’étude de Kantar. Beaucoup redoutent d’être victimes de coupures d’eau, comme ce fut le cas, pendant l’été 2022, dans quelques villages français, mais aussi de subir des inondations et de voir la ressource se dégrader. Ils sont d’ailleurs 70 % à être « convaincus que la ressource en eau est polluée ». Très attentifs à leur consommation personnelle, ils réclament aussi que les nouvelles technologies, grâce à des compteurs intelligents puissent leur permettre de suivre leur consommation en temps réel. Surtout, ils plébiscitent (86 %) la réutilisation des eaux usées traitées (REUT), notamment pour l’irrigation en agriculture mais aussi pour des usages plus domestiques (hygiène, sanitaire, nettoyage…). « Les pesticides et les nitrates ne constituent pas un frein à la consommation de l’eau du robinet. Ça ne les arrête pas. Ce n’est pas pour une question du quotidien », certifie la directrice du CIE. Les usagers sont en revanche plus soucieux du calcaire qu’ils peuvent y trouver. D’ailleurs, ils sont 85 % à « avoir confiance dans l’eau du robinet », même si la moitié des personnes interrogées (47 %) avoue consommer de l’eau … en bouteille. 

 

 

L’eau : une question de perception ? 

Pour M. Clair Michalon, consultant en anthropologie sociale et diversité culturelle, il importe de se méfier des biais cognitifs, en particulier sur le dossier de l’eau. Il a ainsi mené une expérience sur deux cas extrêmes sur le thème de la sécheresse. La première s’est déroulée au Gabon où il pleut en moyenne deux mètres d’eau par an. « Pour les locaux, s’il ne pleut pas pendant trois jours, alors c’est la sécheresse ». A contrario, à Djanet, dans un village au milieu du Sahara, la notion est différente. Pour un agriculteur de ce lieu, « il n’y a pas de problème de sécheresse : il a plus 10 mm d’eau il y a quatre ans ». En fait, « quelqu’un qui a beaucoup d’eau est plus sensible que celui qui en a moins ou n’en a pas », explique-t-il estimant que « ça ne sert à rien de paniquer car l’homme est capable de s’adapter à des situations différentes ».