EXCLU WEB / Les planteurs en quête d’assurance pour les prochaines campagnes

Si l’autorisation des néonicotinoïdes est attendue pour la prochaine campagne, les betteraviers sont dans l’incertitude pour les années suivantes 2024 et 2025. Les variétés tolérantes à la jaunisse et suffisamment performantes ne seront pas encore disponibles.

EXCLU WEB / Les planteurs en quête d’assurance pour les prochaines campagnes

Sans être très explicite, le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau laissé entendre que le renouvellement de l’autorisation des néonicotinoïdes était attendue dans un échange vidéo avec le président de la Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB), Franck Sander, qui a été présenté à l’Assemblée générale, le 8 décembre à Paris. En tout cas, le président a exprimé une certaine confiance pour que cette nouvelle dérogation soit accordée. Elle devrait intervenir en janvier prochain, en tout cas avant les semis de printemps, mais elle sera la dernière selon la loi qui a été adoptée en ce sens. Au-delà de 2023, les betteraviers sont dans l’incertitude complète et manquent de visibilité pour la culture.

Les recherches lancées dans le cadre du plan de recherche national pour trouver des alternatives aux néonicotinoïdes, il y a deux ans, n’ont pas encore abouties. « Les alternatives qui se dessinent n’ont pas fait la preuve d’une efficacité suffisante (variétés tolérantes, de plantes compagnes, de phéromones…) », observe Franck Sander. Les nouvelles variétés à la fois performantes et tolérantes à la jaunisse n’arriveront qu’en 2026/2027. La question qui est aujourd’hui posée aux planteurs est de savoir quelle stratégie adopter pour 2024 et 2025. Pour 2024, les décisions d’assolement seront prises à l’été 2023. « À ce stade, nous n’avons pas de garanties suffisantes pour dire que nous pourrons nous passer de néonicotinoïdes après 2023. Si tel était le cas, nous nous exposerions en effet à une forte baisse des surfaces, à la disparition de bassins entiers de production et à la fermeture de sucreries », a-t-il poursuivi. Le ministre l’a d’ailleurs reconnu : « il y a un moment de réassurance à trouver en 2024 et 2025 », en espérant que les six prochains mois permettent de clarifier les solutions alternatives.

Lourds chantiers à Bruxelles 

Si 2022 ne laissera pas d’excellents souvenirs aux planteurs en raison de la sécheresse qui a plombé les rendements et l’augmentation des coûts de production (engrais, carburants notamment), heureusement compensés par la revalorisation des prix de la betterave, l’année syndicale a été plus favorable. Ainsi, Franck Sander a reconnu de nettes avancées en la matière, comme l’amélioration du régime des retraites, l’annonce d’un plan de soutien aux agro-équipements doté de 400 millions d’euros, la reconnaissance de la spécificité de la betterave dans le cadre de la réforme de la Pac et enfin l’assurance récolte qui va démarrer en 2023.

Reste que le chantier n’est pas clos. Du coté de Bruxelles, Frank Sander n’a pas caché son inquiétude sur la révision de la directive sur les énergies renouvelables actuellement en cours où  « la Commission continue obstinément à ne porter aucune ambition en matière de biocarburants conventionnels ». Il en est de même avec le règlement européen sur les émissions de C02 des véhicules avec la priorité exclusive donné aux voitures électriques, la taxation des énergies, la Commission européenne envisageant de taxer autant les biocarburants conventionnels que les carburants fossiles. Sans parler du projet de règlement sur l’utilisation durable des pesticides. Celui-ci vise à réduire de moitié l’emploi de phytosanitaires d’ici 2030 et à en bannir l’utilisation dans les zones sensibles. Autant de mesures qui, si elles n’étaient pas corrigées ou amendées, compromettraient l’avenir de la culture de betterave. 

Sondage Ifop : les Français plébiscitent la souveraineté alimentaire

A l’occasion de son assemblée générale, la CGB a dévoilé les résultats d’un sondage de l’Ifop sur le thème : « les Français, l’agriculture et la souveraineté alimentaire et énergétique ». Cette enquête est révélatrice de l’évolution de l’opinion publique depuis l’apparition de la crise sanitaire et le déclenchement de la guerre en Ukraine, en février dernier. Ainsi, à 82 % les Français considèrent que la souveraineté alimentaire et énergétique doit être une priorité. Et à 61 %, ils estiment que l’agriculture française et européenne peut répondre à la fois aux besoins alimentaires et énergétiques de la population. Également plébiscitée, la production de sucre et de bioéthanol : 90 % des Français sont favorables au maintien de l’industrie sucrière sur le territoire afin de produire son propre sucre et éviter les importations. Ils ont également favorables à 84 % à ce que la France continue à produire des biocarburants. Interrogés sur les néonicotinoïdes, 46 % des Français sont aussi favorables à la reconduction de leur utilisation dans l’attente d’une autre solution, tandis que 36 % y sont opposés. Commentaire de Jérôme Fourquet, directeur du Département opinions et stratégies de l’Ifop : « on n’aurait pas eu ces résultats, il y a deux ans sur le sucre et les biocarburants. La Covid et la guerre a permis de faire prendre conscience que la sécurité alimentaire n’est pas définitivement acquise ».