EXCLU WEB / Agriculteurs et chasseurs : des relations apaisées

La FNSEA, Jeunes Agriculteurs (JA), Chambres d’agriculture France (CDA) et la Fédération nationale des chasseurs (FNC) ont organisé le 13 février à Paris une journée de travail et de réflexion commune sur de nombreux sujets, avec l’objectif de renforcer leur collaboration sur le dossier de la préservation de la biodiversité et celui des dégâts de la faune sauvage.

De l’aveu même du président de la Fédération nationale des chasseurs (FNC), Willy Schraen, « l’organisation de cette journée commune n’a pas été facile ». Les tensions qui avaient pu être vives il y a quelques temps entre chasseurs et agriculteurs « sont aujourd’hui apaisées. Le passé, c’est le passé », a affirmé Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, qui invite chacun des acteurs à travailler ensemble.

Les deux camps se sont en effet trouvé un ennemi commun : l’écologie radicale qui entend rayer de la carte ces deux activités. Ni l’un ni l’autre n’entendent qu’on mette la nature et l’agriculture sous cloche, s’estimant, à juste titre, tout à fait légitimes pour protéger la biodiversité. « C’est un enjeu commun », ont martelé les intervenants. Nombreuses sont les actions menées par les chasseurs et les agriculteurs pour que le petit gibier (alouette des champs, faisan, perdrix, lièvre, etc.) puisse reconquérir leurs habitats traditionnels à travers des programmes comme Agrifaune, ou Symbiose. À ce titre, Hervé Lapie, secrétaire général adjoint de la FNSEA, a plaidé pour un « vrai statut de la haie », c’est-à-dire qu’on puisse avoir la possibilité de les déplacer en fonction des contraintes écologiques et économiques des exploitations. « Si on sanctuarise les haies aujourd’hui, il n’y en aura pas d’autres demain, car on va dissuader les agriculteurs d’en planter », a insisté Jean-Alain Divanac’h, président de la FDSEA du Finistère qui plaide lui aussi pour « éclaircir le statut des haies et sécuriser l’agriculteur sur le plan économique et financier ».

-20 à -30 %

Au cours de cette journée d’échanges, il a naturellement été question de l’accord national passé et validé entre le monde de la chasse et le monde agricole, en particulier les syndicats agricoles (FNSEA, JA, Confédération paysanne et Coordination rurale). Il comporte une boîte à outils qui fixe « un cadrage national large permettant une adaptation locale », a expliqué Matthieu Salvaudon, directeur du service Dégâts de gibiers à la FNC. « Quand ça fonctionne dans un département, il ne faut surtout rien changer », a martelé Florent Leprêtre, président de la FRSEA Centre-Val-de-Loire et responsable chasse-dégâts de gibier à la FNSEA. L’objectif est « de réduire au niveau national de 20 à 30 % les surfaces agricoles détruites par les sangliers », en partant de l’année de référence de 2019, a précisé, Laurent Woltz, chef du service juridique de la FNSEA. La boîte à outils se décline notamment par espèces avec des modes d’actions concrets. Ainsi, pour le sanglier, l’utilisation de la chevrotine, le piégeage, le tir à points fixes ou encore les tirs de nuit sont-ils envisagés. Des mesures spécifiques sur l’agrainage dissuasif sont aussi prévues. La procédure d’indemnisation des dégâts a été simplifiée et clarifiée et chacune des parties s’est engagée, au plan départemental et national à suivre la mise en œuvre de cet accord qui sera signé sur le Salon de l’agriculture. « Quand on travaille ensemble, on réussit », a résumé Jacky Desbrosses, président de la Fédération des chasseurs de la Marne. 

Le problème des territoires non-chassés

La FNC estime que 30 % des zones françaises ne sont pas ou très peu chassées : 21 % des zones ne sont pas du tout chassées et 9 % très peu chassées, notamment par manque de chasseurs. « Ces zones sont amenées à évoluer dans le mauvais sens », a expliqué Matthieu Salvaudon de la FNC, notamment en raison de la volonté du gouvernement de sanctuariser certaines zones. Il en est ainsi des 3087 ha de la Réserve intégrale au cœur du Parc national de forêts (forêt domaniale d’Arc-Châteauvillain) qui va permettre l’observation à long terme des changements globaux liés notamment au changement climatique. Seules les chasses de régulation y seront permises. Ce qui désole les chasseurs et les agriculteurs qui craignent une explosion des populations de nuisibles, parfois incontrôlables comme dans le domaine de Valfanjouse (Drôme). En effet, en mars 2022, des espèces exotiques (cerfs Sika) se sont échappés de cette aire « sanctuarisée » avec des risques de contamination avec les espèces naturelles. Il faut aussi compter les dégâts que ces populations animales peuvent causer dans les champs.