Génétique charolaise
Choisir plutôt que subir la génétique grâce au génotypage

Marc Labille
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Aujourd’hui, le génotypage est à la portée de n’importe quel éleveur. Cet outil de sélection n’en a pas fini de bousculer les habitudes, offrant aux éleveurs l’opportunité de ne plus "subir" la génétique de leur troupeau. Pionnière en la matière, Gènes Diffusion déploie, avec Elva Novia, une nouvelle offre sur la zone. 

Choisir plutôt que subir la génétique grâce au génotypage
Avec le génotypage, le retour sur investissement est à la hauteur : moins de femelles à élever, cycles de production plus courts, moins de pertes autour du vêlage, gains de croissance, moins de parage, meilleurs accouplements…

Le 8 septembre dernier à Digoin, Elva Novia et Gènes Diffusion ont dévoilé leur nouvelle offre génomique. C’est en 2009 que l’entreprise de sélection décidait de créer sa propre plateforme génomique GD Scan en partenariat avec l’Institut Pasteur de Lille. Les premiers index génomiques GD Scan ont vu le jour en 2014 au terme d’un premier programme de collecte de données en fermes, lequel a été suivi d’autres. La collecte de données sur les caractères étudiés au sein d’une population charolaise est le carburant de l’indexation génomique, expliquait Vincent Colas, technicien à Gènes Diffusion (GD). Le principe de la génomie repose sur des équations génomiques qui modélisent la corrélation entre des gènes et leur expression sous la forme de performances, comportements, morphologies, aptitudes… Le travail de collecte de données alimente ainsi ces équations complexes qui permettent de prédire le potentiel d’un animal dès sa naissance. 

22 index génomiques disponibles

Le génotypage GD Scan porte aujourd’hui sur une vingtaine de caractères étudiés permettant de calculer 22 index. Six de ces précieux prédicteurs sont des index de production : « Facilités de Naissance (Nai g), Potentiel de croissance (Cr g), Développement Musculaire (DM g), Développement Squelettique (DS g), Aptitude au Vêlage (Vel g) et Aptitude Laitière (Lai g) ». Le génotypage GD Scan fournit aussi neuf index de morphologie au sevrage : « Développement Musculaire du Dos (DMDos g), Développement Musculaire de l’Arrière-Main (DMArM g), Longueur de l’Animal( DSLon g), Largeur de l’Animal (DSLar g), Gabarit de l’Animal (DSGab g), Largeur de Mufle (Mufle g), Aplombs Avants (AAv g), Aplombs Arrières (AAr g), Rectitude du Dessus (Rec g) ». Trois index de morphologie post sevrage complètent ce descriptif : « Longévité de la Mamelle (LoM g), Fonctionnalité des Trayons (FoT g) et Solidité des aplombs arrière (SolAr g) ». GD Scan diffuse également deux index de comportement : « Comportement Adulte (COMPhve g) et Comportement Vêlage (COMPvel g) ». Deux nouveaux index de production s’ajoutent à ces informations : l’index « REPRO g » traduit pour les femelles la faculté à se reproduire aisément, autrement dit un IVV optimisé. L’index « DGest g » traduit quant à lui la faculté d’un animal à engendrer des gestations plus ou moins courtes.

Notés de 0 à 10

Traduits par des notes allant de 0 à 10 et rassemblés au sein d’une fiche de synthèse individuelle, tous ces index constituent une sorte de carte d’identité génétique de l’animal. Un précieux document de travail qui peut être obtenu à partir d’un simple prélèvement de poils (ADN) puis analyse au laboratoire génomique GD Scan. Sur cette fiche, les index génomiques GD Scan sont complétés par les index génomiques « gIBOVAL » (IFNAIS, CRsev, DMsev, DSsev, FOSse, ISEVR, AVel, ALait, IVMAT, ICRCjbf, CONFjbf, IABjbf).

Le génotypage est aujourd’hui au cœur du recrutement pour le schéma de sélection Gènes Diffusion. Chaque année, ce sont 1.000 mâles, 300 mères à taureaux et donneuse d’embryons qui sont ainsi génotypés. 400 mâles seulement passent ce premier tri avec succès et le schéma n’acquiert que les 30 meilleurs en morphologie croissance évalués. Seuls les dix meilleurs au génotypage, en phénotype et en production de semences sont finalement diffusés au catalogue, expliquait Vincent Colas.

Accessible à toutes les femelles

Le génotypage est désormais à la portée aussi des élevages. Accessible à toutes les femelles d’un élevage, il donne une connaissance précoce de leur potentiel génétique, offrant une opportunité d’améliorer le renouvellement en triant en connaissance de cause et en ne conservant que les vraies bonnes femelles. Le génotypage offre également la possibilité d’affiner les objectifs de sélection en ciblant par exemple les aplombs, les mamelles, le comportement… Une opportunité de « faire évoluer le cheptel positivement », fait valoir Vincent Colas. Grâce au génotypage, les éleveurs peuvent aussi gérer leurs accouplements vis-à-vis de gènes d’intérêts que sont le sans corne ou le culard (lire encadré). « En génotypant toutes ses femelles, un éleveur opte pour un renouvellement choisi et non plus subi avec une accélération du progrès génétique sur les meilleures lignées », synthétise Vincent Colas.

Opération « massification »…

Quant au coût du génotypage, le retour sur investissement serait sans appel, défendent les responsables de GD Scan : moins de femelles à élever, cycles de production plus courts, moins de pertes autour du vêlage, gains de croissance, moins de parage, meilleurs accouplements… Et pour enfoncer le clou, Elva Novia et Gènes Diffusion viennent de lancer une « offre massification 2021/2023 » dans laquelle une remise de 20 € est appliquée sur le prix d’un kit GD Scan. « Cette offre est soumise à quelques conditions : l’élevage doit être rattaché à l’OS Union Gènes Diffusion ; il doit être en certification de parenté bovine ou en contrôle de performance VA4 ou VA4 post sevrage ; 75 % des femelles d’une même cohorte doivent être génotypées ; ces élevages doivent inséminer au moins 35 % de leurs femelles avec des taureaux enregistrés à l’Idele », présente Sébastien Reveret, technicien à Elva Novia.

Sans corne, culards, Ataxie, Blind, D.E.A n’ont plus de secret !

Le génotypage permet aussi de connaitre le statut génétique d’un animal pour six gènes d’intérêt. Le plus connu d’entre-eux est le gène sans corne (P/P). Trois de ces gènes d’intérêt peuvent avoir un impact négatif, informe Vincent Colas. La D.E.A est une maladie génétique grave qui se manifeste par un animal qui nait sans poil ni dent, incapable de réguler sa température et qui meurt vers cinq mois d’âge inapte à se nourrir d’aliment solide. L’incidence de cette maladie génétique est cependant limitée pour le schéma de sélection car son gène récessif concerne un seul taureau diffusé, indiquait le technicien de Gènes Diffusion. Le gène « Blind » se manifeste par des animaux qui deviennent aveugles après cinq ans. À cet âge, la perte économique est limitée, fait remarquer le technicien qui signale cependant que Gènes Diffusion fait en sorte d’éviter ce gène récessif dans son schéma. Plus impactante, l’Ataxie est une dégénérescence neurologique progressive qui affecte des animaux entre huit et 20 mois. La maladie se déclare pour des porteurs homozygotes. Pour ce gène, GD applique une vigilance haute à son schéma.

Pas un mais deux gènes culards…

Le gène de l’hypertrophie musculaire est le gène culard (mh/+) ou « Q204X ». Ce gène est porté par environ 18 % de la population charolaise. Bien connus des éleveurs, ses inconvénients sont les difficultés de naissance, une grande langue, des problèmes cardiaques… Mais le gène culard a aussi ses avantages : de grandes qualités musculaires, moins de gras, potentiel de croissance… S’exprimant pour les sujets homozygotes, ce gène culard nécessite d’être bien géré, recommande Vincent Colas. L’étude du génome a permis d’identifier un autre gène culard, le « mhBEEF F/+ » ou « F94L ». Surnommé « le bon gène culard », il est porté par environ 13 % de la population charolaise connue. Il engendre moins d’inconvénients que le premier gène culard, bénéficiant d’un bon potentiel musculaire et d’engraissement, indique le technicien de GD.

Thierry Préaud à Digoin : génotypage systématique depuis six ans
Thierry Préaud fait génotyper toutes ses femelles depuis six ans.

Thierry Préaud à Digoin : génotypage systématique depuis six ans

À la tête d’un troupeau charolais de 110 vêlages à Digoin, Thierry Préaud fait génotyper ses femelles de un an depuis six ans. C’est en devenant exploitation support dans le cadre du programme de collecte de données « Valoris 38 » de Gènes Diffusion que Thierry Préaud s’est lancé dans cette nouvelle technologie. Très vite, l’éleveur s’est pris au jeu de ces nouveaux index génomiques. Et les qualités de son troupeau ont de suite progressé. S’il continue de sélectionner de meilleures qualités maternelles, Thierry accorde beaucoup d’importance à la fonctionnalité des trayons, caractère évalué par la génomie. Il est aussi très attentif au comportement de ses animaux. Aujourd’hui, l’éleveur intègre aussi les index génomiques dans le choix des taureaux du catalogue Gènes Diffusion. Vendeur d’une quinzaine de reproducteurs par an, Thierry Préaud fait génotyper certains mâles si un client le demande.