Témoignages
Arboriculteurs et viticulteurs en quête de la meilleure protection

Depuis une dizaine d’années, les innovations afin de limiter l’impact de la grêle fleurissent. Bien que les filets restent le système le plus recommandé, leur utilisation n’est pas sans faille et peut nécessiter un renfort lors des travaux annuels à effectuer sur les vergers. 

Arboriculteurs et viticulteurs en quête de la meilleure protection
Dans la Drôme, l'EARL La Pêcheraie (famille Betton), s’est équipé de filets paragrêle (type V5), afin de protéger la production d’abricots et de pêches. ©CL/AD26

Le sujet devient de plus en plus récurrent. Cette année encore, la grêle a touché plusieurs vergers et causé des dégâts plus ou moins importants aux viticulteurs et arboriculteurs de l’est et sud-est de la France. Cet aléa climatique, qui n’a d’aléa plus que le nom, pousse les professionnels à s’équiper. L’objectif n’est pas d’empêcher la grêle de tomber, mais bien de limiter son impact sur les productions.

André Quenard fait partie d’un réseau de viticulteurs savoyards qui utilise des ballons gonflés à l’hélium. Lorsqu’un orage approche, ce dernier envoie une charge de sel de calcium dans les airs. Le sel absorbe l’humidité et transforme les grêlons en gouttes de pluie. En altitude, ce système permet de couvrir un rayon d’un kilomètre de diamètre. Mais la manœuvre la plus délicate reste de lâcher le ballon au bon moment, soit environ vingt minutes avant l’arrivée des grêlons. « Nous ne savons pas vraiment s’il s’agit d’une méthode de lutte encore adaptée, confie le viticulteur situé à Chignin. Depuis 2019, année où j’ai eu 4 ha massacrés par la grêle, les grêlons mesurent de 3 à 4 cm… Auparavant, ils n’étaient pas plus gros qu’une noisette ! »

Investir dans des filets paragrêle, le collectif y réfléchit forcément. « Dans nos vignobles, cela reviendrait à 12 000 € ou 14 000 € l’ha, c’est un investissement conséquent, même si des aides régionales existent. » Ce qui n’empêche pas le viticulteur d’affirmer qu’il s’agirait certainement de la meilleure protection physique pour sa production. Sa propre réflexion est d’ailleurs d’installer, dans les prochaines années, des filets sur les parcelles les plus rémunératrices et situées en coteaux. « Mais il ne faut pas oublier que les filets ne protègent pas les bâtiments, contrairement à la lutte aérienne », conclut-il.

À quelques kilomètres du domaine d’André Quenard, le ressenti est quelque peu différent. L’année dernière, David Henriquet a installé des filets paragrêle sur 2 000 m² de vignes situées en bordure de forêts. Dès le mois de juin, plusieurs averses de grêle sont tombées. Ces dernières n’étaient pas très denses, mais les grêlons dépassaient la taille d’une balle de golf. « L’effet rebond du filet ne s’est pas produit, les grêlons ont donc enfoncé le filet et sont venus taper le milieu de la grappe », relate le viticulteur. L’impact a fini par sécher et créer des nécroses. « Les grappes ne sont pas pleines, des raisins sont abîmés, c’est une perte de rendement et de qualité. Dans tous les cas, j’ai toujours eu en tête que les filets pouvaient limiter les dégâts, mais en aucun cas les supprimer totalement. Nous avons beaucoup perdu depuis que nous ne pouvons plus utiliser les fusées anti-grêle… Le système parfait n’existe pas encore. »

Les filets paragrêle, une logistique à anticiper

Au sud du territoire, les arboriculteurs cherchent également la solution la plus efficace. Dans la Drôme, cela fait sept ans que la famille Betton (EARL La Pêcheraie) a opté pour des filets paragrêle. Sur leur 25 ha de production, une dizaine est actuellement protégée. Selon Julien Betton, le résultat est sans équivoque : « Nous avons pris une averse de grêle il y a trois semaines, tout ce qui était sous les filets n’a pas été touché, tandis que le reste a été anéanti ». Depuis l’installation de ces filets, la famille remarque que leurs pêches et abricots possèdent moins de marques, ce qui limite de fait le déclassement. Un gain qualitatif également remarqué par Bruno Darnaud, le président drômois de l'AOP pêches et abricots de France. « Avec les filets, nous avons beaucoup moins de catégories 2 pour les fruits à noyaux comme les pêches et les abricots, puisque les branches tapent moins les unes contre les autres. » Mais cette installation a un coût logistique. Durant chaque hiver et chaque printemps, les arboriculteurs sont obligés d’enrouler et de dérouler les filets. « Nous prenons une semaine pour le faire avec du personnel : cinq sont sur une nacelle et trois sont sur un tracteur pour fermer ou ouvrir les filets. » Un coût économique et logistique supplémentaire qu’il est essentiel d’anticiper, en arboriculture comme en viticulture.

Léa Rochon

Selon par Bruno Darnaud, le président drômois de l'AOP pêches et abricots de France, la pose de filets paragrêle permet de réduire le nombre de fruits déclassés. ©Pêches et abricots de France.