Jacky Plançon, président de l’AOP Bœuf de Charolles
Une démarche qui doit rester dans les mains des éleveurs

Marc Labille
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Jacky Plançon est le nouveau président du Bœuf de Charolles. Cet éleveur de Digoin dont le Gaec est engagé de longue date dans ce signe de qualité, entend poursuivre le développement de l’AOP. Une démarche qui répond à la fois aux enjeux de société, de territoire et des élevages.

Une démarche qui doit rester dans les mains des éleveurs
En 2021, 1.430 carcasses ont été abattues sous l’AOP Bœuf de Charolles soit une hausse de +35 % par rapport à 2020. Ces animaux proviennent d’environ 150 élevages agréés, confie Jacky Plançon.

Jacky Plançon est associé avec son frère à Digoin sur une exploitation couvrant 250 hectares. Aidés d’un salarié à mi-temps, les deux frères sont à la tête d’un troupeau charolais de 170 vêlages. Ils produisent des broutards et engraissent toutes les vaches de réforme ainsi qu’une partie des génisses. Une soixantaine de femelles bouchères sont ainsi livrées chaque année à la coopérative Sicarev dont une petite trentaine est valorisée en filière AOP Bœuf de Charolles. Lorsque Jacky Plançon s’est installé sur la ferme familiale en 1995, le Gaec n’engraissait alors aucune bête. Tentés par la finition des génisses, les associés se sont alors inscrits dans la démarche Bœuf de Charolles dans laquelle leur groupement était impliqué. Aujourd’hui, l’AOP est le principal débouché pour les femelles finies du Gaec. C’est une valorisation intéressante qui permet à Jacky et à son frère Philippe de « vivre sur une exploitation typique de la région ». Un cas d’école pour le syndicat de défense du Bœuf de Charolles dont le credo est de « ramener de la valeur aux éleveurs pour essayer de maintenir des exploitations viables économiquement », fait valoir Jacky Plançon. Impliqué de longue date dans la démarche Bœuf de Charolles, l’éleveur est entré au conseil d’administration il y a une dizaine d’années, sans se douter qu’un jour le président Jean-François Ravault lui proposerait de lui succéder. C’est ainsi que Jacky Plançon a été élu à la présidence de l’ODG en octobre dernier.

Une même philosophie

Avec la nomination de cet éleveur charolais de 47 ans, une page se tourne dans la vie du Bœuf de Charolles. « C’est le premier changement de président pour l’AOP », confie avec beaucoup d’humilité Jacky Plançon qui ne manque pas de rendre hommage à son prédécesseur. Cela faisait en effet 28 ans que Jean-François Ravault présidait le Bœuf de Charolles. Figure de proue des pionniers de la démarche de reconnaissance en AOP, Jean-François Ravault a connu toutes les étapes qui ont abouti à la première reconnaissance officielle en 2010. Une véritable épopée au long cours et un immense travail accompli que le nouveau président n’oublie pas. Et si un changement de génération a lieu à la présidence, le successeur partage avec son aîné la même vision pour le Bœuf de Charolles. « Il faut que notre signe de qualité reste libre ; qu’il continue d’appartenir aux éleveurs. Nous ne sommes pas là pour défendre une structure, mais un produit. La valorisation du produit, nous ne l’obtiendrons qu’à travers la qualité. La démarche Bœuf de Charolles a pour but de conforter des exploitations à taille humaine ; de maintenir des installations ». Enfin, pour Jacky Plançon, la démarche Bœuf de Charolles représente une alternative à l’agrandissement et à un modèle standard de production de masse trop intégré.

« Fiers de notre produit »

Comme tous les défenseurs de l’AOP, ce qui frappe en premier chez le nouveau président, c’est son attachement au produit noble qu’est la viande de Bœuf de Charolles. « Il faut être convaincu de faire un bon produit. Nous avons des points forts que les autres signes de qualité n’ont pas : né, élevé, engraissé et abattu sur la zone d’appellation. L’AOP nous donne une notoriété dont il faut nous saisir », fait valoir Jacky Plançon. Bien au-delà du produit, la démarche implique « le maintien d’un environnement : nos paysages que des gens de l’extérieur nous envient. Nous sommes en phase avec ce que les gens attendent », estime le nouveau président.

« Grâce au Bœuf de Charolles dont la qualité est reconnue, la viande charolaise est aujourd’hui présente dans de grands restaurants, au Sirha - le grand salon des professionnels de la gastronomie à Lyon… », fait valoir Jacky Plançon. Une reconnaissance qui doit se gagner aussi au niveau local, ajoute le président qui cite la participation du Bœuf de Charolles à la course cycliste Bernard Thévenet dans le Brionnais. « Il faut qu’on parle de nous », lance-t-il.

L’une des ambitions du nouveau président est d’impliquer davantage les éleveurs dans leur signe de qualité. Quatre réunions de secteur sont organisées dans ce sens au mois de février (à Iguerande, Poisson, Saint-Vincent-Bragny, Écuisses). Avec toujours ce leitmotiv de « garder la main sur notre production », les éleveurs en Bœuf de Charolles sont encouragés à s’investir pour la promotion de leur produit.

Perspectives de développement

Jacky Plançon se félicite que la filière ait connu une belle progression en 2021 pour atteindre 1.430 carcasses soit une hausse de +35 %. Encouragés par ces bons chiffres, les défenseurs du Bœuf de Charolles espèrent un développement à 2.000 carcasses d’ici deux ans. Mais la tâche est difficile, reconnaît le président. Sur ce point, l’abattoir Charollais Viande de Paray-le-Monial accomplit un travail remarquable, salue-t-il. La grande distribution est de plus en plus intéressée par l’AOP et elle représente désormais près de 50 % des points de vente. Ce qui compte le plus, c’est le maintien de la qualité du produit, répète Jacky Plançon. Une veille qui est assurée par l’Organisme de défense et de gestion (ODG). C’est une structure légère qui emploie deux précieuses personnes pour assurer l’agrément, la facturation des cotisations (cinq centimes à l’éleveur, cinq centimes à la cheville), la promotion, la défense, la communication, détaille le président. Un travail colossal qui permet au Bœuf de Charolles de demeurer sous le seul contrôle des éleveurs, souligne-t-il encore. Et « si le produit est bon et pour peu que nous sachions l’expliquer, alors nous pouvons espérer une meilleure plus-value », estime Jacky Plançon qui ne cache pas qu’un équilibre est à trouver entre cette plus-value et le bon développement du signe de qualité. Un exercice qui, explique le nouveau président, nécessite de convaincre les acheteurs et les consommateurs en leur faisant toucher du doigt tout ce que le Bœuf de Charolles et son mode d’élevage amènent aux éleveurs et au territoire.