Les brèves du 16 février 2023

Mis en ligne par Cédric Michelin
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Voici  les brèves du 16 janvier

Les brèves du 16 février 2023

Nitrates : la Commission européenne demande des efforts supplémentaires à la France

La Commission européenne a adressé le 15 février un avis motivé (seconde étape de sa procédure d’infraction) à la France pour défaut de mise en œuvre complète de la législation européenne sur la qualité de l’eau potable qui dans certaines zones contient encore des quantités excessives de nitrates. Bruxelles qui avait envoyé en octobre 2020 une lettre de mise en demeure à la France admet « des mesures adéquates ont été prises pour certaines unités de distribution d’eau potable » mais estime que « l’eau potable actuellement fournie à plusieurs milliers de personnes en France ne respecte toujours pas la valeur limite pour les nitrates, en violation de la directive sur l’eau potable ». Une concentration maximale en nitrate de 50 mg/L est permise par la réglementation de l’UE. Paris dispose maintenant de deux mois pour répondre et prendre les mesures nécessaires. Dans le cas contraire, la Commission pourra décider de porter l’affaire devant la Cour de Justice de l’UE (CJUE). C’est ce qui arrive à la région wallonne de Belgique que la Commission européenne a décidé, le même jour, d’emmener devant la CJUE. L’autre grande région belge, la Flandres, a reçu une lettre de mise demeure lui demandant de mieux protéger leurs eaux contre la pollution par les nitrates. Enfin l’Italie s’est vue adresser, comme la France, un avis motivé pour les mêmes raisons.

 

Grandes cultures : l’Anses engage une procédure de retrait pour le S-métolachlore

Face au risque de contamination des eaux souterraines par des produits de dégradation du S-métolachlore, l’Anses annonce dans un communiqué du 15 février qu’elle « engage une procédure de retrait des principaux usages des produits phytopharmaceutiques » contenant cette substance herbicide. L’avis de l’agence, issu d’une saisine des ministères de l’Agriculture et de la Santé, se base sur « un ensemble de neuf combinaisons standards de données météorologiques, pédologiques et culturales » utilisées au niveau européen pour modéliser la contamination des eaux souterraines par les pesticides. Or ces modèles montreraient des concentrations largement supérieures au seuil européen de 0,1 μg/litre pour trois métabolites issues de la dégradation du S-métalochlore : le métolachlore-ESA, le métolachlore-OXA et le métolachlore-NOA. Les autorisations devraient donc être retirées pour le maïs en pré-levée, le maïs en post-levée, le tournesol et le soja. L’Anses rappelle dans son avis que le S-métolachlore « est en cours d’instruction au niveau européen dans le cadre de la procédure de renouvellement d’approbation ». Selon la base de données nationale des ventes de pesticides (BNVD), près de 1 820 tonnes de produits à base de S-métolachlore ont été vendues en 2021 en France sous neuf AMM distinctes, contre 7 932 t pour le glyphosate.

 

Céréales ukrainiennes : l’ONU s’inquiète pour la prorogation de l’accord d’Istanbul

Après avoir été renouvelé une première fois en novembre pour 120 jours, « l’accord d’Istanbul sur les exportations de céréales ukrainiennes en mer Noire (conclu le 22 juillet dans le contexte de la guerre en Ukraine, NDLR) doit être une nouvelle fois reconduit le 18 mars mais la situation est légèrement plus difficile en ce moment » a reconnu le 15 février le chef des affaires humanitaires de l’ONU, Martin Griffiths. Tout en espérant que les parties russes et ukrainiennes arrivent à s’entendre pour poursuivre sur la durée cette initiative afin « d’assurer la sécurité alimentaire mondiale ». Jusqu’à maintenant, elle a permis « à près de 20 Mt de céréales d’atteindre des millions de personnes dans le monde » a-t-il précisé. En janvier, l’ONU avait notamment indiqué que près de 44 % du blé exporté avait été expédié vers des pays à revenu faible ou intermédiaire, dont 64 % vers des économies en développement (Afrique, Moyen-Orient). Par ailleurs, cet accord a également permis au Programme alimentaire mondial d’acheté en 2022 8 % du total de blé exporté afin de soutenir des opérations humanitaires dans les régions du monde frappées par la faim.

 

La compétitivité de l’agriculture française au cœur d’une PPL transpartisane au Sénat

Une proposition de loi (PPL) « pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France » a été déposée au Sénat, le 14 février, par les sénateurs Laurent Duplomb (LR, Haute-Loire), Pierre Louault (Union centriste, Indre-et-Loire) et Serge Mérillou (Socialiste, écologiste et républicain, Dordogne). Il s’inscrit dans la continuité du rapport remis en novembre par les trois parlementaires. Parmi les mesures les plus marquantes, les sénateurs proposent la création d’un « haut-commissaire à la compétitivité des filières agricoles et agroalimentaires françaises », la création d’un fonds spécial destiné à soutenir l’investissement et la recherche des petites filières agricoles et la création d’un « livret Agri ». Ce dernier prendrait la forme d’un livret réglementé « sur le modèle du livret de développement durable et solidaire ». Il permettrait de « faciliter l’emprunt du secteur agricole et agroalimentaire à des conditions avantageuses ». Le texte comporte aussi un volet d’articles ayant trait au stockage de l’eau. Au sujet de la vente de produits phytopharmaceutiques, les sénateurs proposent de revenir sur l’interdiction des remises, rabais et ristournes, ainsi que sur la séparation de la vente et du conseil. Enfin, ils veulent pérenniser le dispositif TO-DE (allègement de cotisations pour les saisonniers) et l’étendre, entre autres, aux CUMA.

 

PPL Descrozaille : le Sénat vire de bord et prolonge l’expérimentation du SRP + 10

Lors de l’examen de la proposition de loi (PPL) du député Descrozaille sur les relations commerciales, les sénateurs ont prolongé, le 15 février, l’expérimentation du relèvement du seuil de revente à perte de 10 % (SRP + 10) pendant deux ans. Ce dispositif, voté pour trois ans à l’Assemblée, avait été suspendu dans le texte voté en commission des Affaires économiques la semaine précédente. En séance, la rapporteure du texte Anne-Catherine Loisier a maintenu que le SRP + 10 était « un chèque en blanc à la grande distribution sans contrepartie garantie pour les producteurs ». Cependant, elle déclare avoir « entendu les craintes exprimées par certains dans le contexte des négociations commerciales annuelles » qui prennent fin au 1er mars. Des acteurs craignent que « la distribution négocie plus durement afin de conserver ses marges » alors que l’expérimentation doit prendre fin au 15 avril, a-t-elle expliqué. Les parlementaires ne sont pas unanimes sur les conclusions à tirer des différents rapports d’évaluation remis par le gouvernement. « Nous avons tous des doutes, c’est pour cela que nous proposons la prolongation », a défendu le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau. Un amendement avait été déposé par le gouvernement en ce sens. En outre, l’exemption pour les fruits et légumes est maintenue, contre l’avis du gouvernement.

 

Assurance prairies : la FNSEA rassurée par la Rue de Varenne, à l’inverse de ses AS

La FNSEA a assorti son vote favorable au décret sur la réévaluation des pertes indicielles de plusieurs conditions sur lesquelles elle attend « des réponses », a indiqué le syndicat majoritaire en début de matinée le 15 février. À l’issue du vote électronique en Codar la veille au soir, la FNSEA était déçue que le « réseau représentatif » d’observation de la pousse de l’herbe, mobilisé en cas de recours, ne fasse pas explicitement référence « au réseau de fermes suivies dans le cadre de l’Observatoire National de la Pousse de l’Herbe, encadré par l’Institut de l’élevage (Idele) ». Sur ce point le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau a répondu, dans un communiqué en milieu de matinée, qu’il veut « un réseau de terrain robuste incluant à terme plus d’une centaine de fermes témoins ». Et, que la création de ce réseau s’inspirera du « protocole mis en place par l’Idele entre 2016 et 2019 ». Une déclaration qui « rassure » la FNSEA, qui demande encore « quelques explications de texte » notamment sur les modalités de saisine du fournisseur d’indices ou du comité des indices. De leur côté, trois associations spécialisées (AS) d’éleveurs de la FNSEA (FNB, FNO, Fnec) ont appelé le gouvernement à « revoir sa copie », dans un communiqué en fin d’après-midi. Elles estiment qu’en l’état, le décret n’apporte pas « la garantie que les pertes qu’ils subiront à l’avenir seront correctement évaluées ».

 

Affichage environnemental : les expérimentations devront s’adapter au cadre officiel

Dans une interview accordée à nos confrères de 20 minutes (article en accès libre) la secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique Bérangère Couillard confirme que les expérimentations de l’Eco-score et du Planet score sur l’affichage environnemental devront « évoluer […] pour reprendre celui qui sera adopté au 1er janvier » (2024) au niveau national. Loin de critiquer ces diverses expérimentations, la secrétaire d’État les juge « très positives », estimant qu’elles « permettent aux entreprises qui les portent d’anticiper les choses ». En alimentaire comme en textile, « l’objectif est d’arrêter une méthode de calcul et de restitution des scores d’ici cet été », en vue d’une application dès le 1er janvier 2024, rappelle Bérangère Couillard dans cet entretien. « Le plus difficile sera de s’accorder sur la bonne méthode de calcul, celle qui trouvera le bon équilibre entre tous les enjeux environnementaux : les gaz à effet de serre, la consommation d’eau, l’utilisation de pesticides, le bien-être animal, l’origine des produits, leur recyclabilité… », estime la secrétaire d’État.

 

Crise du bio : les propositions de Terra Nova pour relancer les marchés

« La démocratisation du bio s’est accompagnée d’une perte de confiance vis-à-vis du label AB et d’une dépréciation de l’image », regrette le cercle de réflexion Terra Nova dans une note publiée le 15 février. Face à ce constat, l’auteure Suzanne Gorge propose une vingtaine de pistes afin que le ralentissement de la consommation « ne vienne pas compromettre les efforts engagés ». Le think tank détaille plusieurs leviers plutôt consensuels dans le secteur, dont les campagnes de promotion, la généralisation de l’affichage environnemental, l’application plus stricte de la loi Egalim, ou encore la mise en place d’une TVA réduite sur les produits bio. Mais il défend également plusieurs mesures plus inédites, dont l’ajout au cahier des charges d’obligations « en termes de rémunération et de formation des salariés et le respect de la réglementation sur l’emploi des travailleurs détachés ». Une piste déjà explorée par la Fnab, et qui permettrait de « prendre en compte les nouvelles attentes des consommateurs ». Le ticket-restaurant pourrait également être utilisé comme levier d’encouragement en restauration commerciale, avec une augmentation de la prise en charge des entreprises dans des restaurants « écoresponsables ».

 

Porc : négociation annuelle à haut risque pour le maillon charcuterie

Dans deux communiqués distincts le 15 février, l’interprofession porcine (Inaporc) et la Fédération des industriels de la charcuterie (Fict) alertent sur la situation des industriels « face à la hausse du coût de l’énergie et à la hausse du prix du porc » (+65 % depuis début 2022), alors que les négociations commerciales annuelles doivent s’achever à la fin du mois. « Sans prise en compte réelle et urgente de la situation par les clients distributeurs, les entreprises de charcuterie sont en péril », prévient la Fict. Selon un sondage réalisé auprès de ses adhérents, « un tiers des entreprises annoncent devoir réduire leurs effectifs ou leurs productions, et pire, plusieurs entreprises de charcuterie traiteur font déjà l’objet d’une procédure de sauvegarde voire de redressement judiciaire ». Et dans le cadre des négociations en cours, les « surcoûts liés aux énergies ne sont pas pris en compte » pour 22 % des entreprises répondantes, et « de façon limitée » pour deux tiers d’entre elles. L’interprofession interpelle plus généralement sur la situation de la filière, qui a vu la production baisser en 2022, comme dans l’ensemble de l’UE, mais également les importations augmenter, avec une autosuffisance qui s’érode, reculant à un niveau de 103 % en 2022.

 

NBT : l’Académie des sciences propose un cadre souple pour les traits issus de plantes voisines

Dans un avis rendu public le 15 février, l’Académie des sciences propose une nouvelle approche réglementaire pour encadrer les nouvelles techniques de modification génétique (NBT). Alors que la réglementation actuelle sur les OGM repose essentiellement sur la technique elle-même, les académiciens proposent une « procédure d’évaluation différenciée » pour certaines NBT, selon que les modifications réalisées sont « similaires à celles pouvant résulter de mutations spontanées ou induites ». Ainsi un cadre plus souple serait accordé aux mutations existantes « dans d’autres variétés de l’espèce ou d’espèces proches ». De même, « l’absence avérée de risques pour la santé et l’environnement » pourrait assouplir le cadre, tout comme « l’ampleur de la modification réalisée ». Cette procédure serait divisée en deux niveaux, « dispense d’évaluation » et « évaluation simplifiée », assortie « de conditions relatives à la biovigilance et à la traçabilité de ces variétés ». La Commission européenne devrait présenter le 7 juin un paquet législatif sur les « systèmes agroalimentaires durables et l’utilisation des ressources » comprenant une proposition de règlement sur les NBT en vue de faciliter la culture et la mise sur le marché de l’UE des variétés de plantes issues de ces techniques telles que la mutagenèse ciblée ou la cisgenèse.

 

« Zéro artificialisation nette » : les députés Renaissance pour un meilleur accompagnement des communes

Les députés Renaissance ont présenté le 15 février une proposition de loi pour un meilleur accompagnement des élus locaux, face aux objectifs du « zéro artificialisation nette (ZAN) » des sols d’ici 2050, fixés par la loi Climat et résilience de 2021. Une mission transpartisane au Sénat a avancé récemment sa propre proposition de loi, avec pas moins de 25 mesures. En lien étroit avec le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu, les députés Bastien Marchive et Lionel Causse suggèrent pour leur part une « mutualisation de l’artificialisation liée à de grands projets nationaux d’intérêt général, afin de ne pas impacter les droits à construire des communes les accueillant ». Ils prévoient aussi la mise en place d’une « garantie rurale » pour assurer aux communes peu denses une surface artificialisable minimale pour les prochaines décennies. Il s’agirait également de créer une enveloppe foncière pilotée par les maires et dédiée à la réalisation de projets d’intérêt intercommunal. Les deux députés souhaitent « engager des discussions avec le Sénat afin d’aboutir à des propositions communes qui pourraient entrer en vigueur d’ici la fin de l’année ».