Commercialisation
Revirement sur le seuil de revente à perte

Les sénateurs ont adopté la suspension de l'application du relèvement de 10 % du seuil de revente à perte jusqu'en 2025. La FNSEA et JA alertent sur le risque de relancer « la guerre des prix ».

Revirement sur le seuil de revente à perte
Dans un communiqué commun, la FNSEA et JA dénoncent la suspension du relèvement de 10 % du seuil de revente à perte « qui risque d'avoir des effets dramatiques pour l'ensemble de la filière ».©DR

La commission des Affaires économiques du Sénat a adopté, le 8 février, une version largement modifiée de la proposition de loi (PPL) Descrozaille sur les relations commerciales. Changement le plus marquant : l'application du relèvement de 10 % du seuil de revente à perte (SRP + 10) est suspendue jusqu'au 1er janvier 2025. L'expérimentation de ce dispositif, qui doit prendre fin le 15 avril, devait initialement être prolongée dans le texte voté à l'Assemblée. Elle reprendrait pour l'année 2025. La multiplication des périodes d'expérimentation doit permettre au gouvernement d'établir un rapport sur l'efficacité du dispositif fin 2025. Par ailleurs, les fruits et légumes frais seraient exclus du champ d'application du SRP + 10 lorsque celui-ci s'appliquera.

Un communiqué du Sénat assure que la commission a « tiré les conséquences de l'échec de l'expérimentation [...] qui s'est traduit par un chèque en blanc à la grande distribution ». La sénatrice centriste de Côte-d'Or, Anne-Catherine Loisier, affirme que « la suspension du SRP + 10 permettra de rendre du pouvoir d'achat aux Français sans relancer de guerre des prix préjudiciable aux agriculteurs, puisque la loi Égalim 2 est intervenue entre-temps pour protéger les matières agricoles dans les négociations ».

Un risque de « déstabilisation »

Ce n'est pas l'avis de la FNSEA et de Jeunes agriculteurs (JA) qui dénoncent dans un communiqué commun « cette initiative qui risque d'avoir des effets dramatiques pour l'ensemble de la filière ». « Certains distributeurs n'attendent que ce signal pour relancer une guerre des prix touchant l'ensemble des produits alimentaires », poursuivent-ils. Les syndicats soulignent que le SRP + 10 fait « consensus entre la plupart des acteurs de la filière ». Ils ajoutent que la non-prolongation du dispositif est « la source potentielle d'une grande déstabilisation des négociations commerciales qui entrent actuellement dans leur dernière ligne droite ».

L'expérimentation de l'encadrement des promotions en volumes et en valeur, qui devait également s'achever en avril, serait, elle, prolongée et étendue aux produits non alimentaires. Le texte fait l'objet d'un examen en séance au Sénat depuis le 15 février, puis sera examiné en commission mixte paritaire (CMP). « Je comprends ce qui a motivé le vote des sénateurs, cela fera l'objet d'une discussion entre les deux chambres dont je ne présume pas de l'issue », a réagi Frédéric Descrozaille auprès d'Agra Presse à l'issue du vote au Sénat. Le député Renaissance, à l'origine de la PPL, est aussi rapporteur du texte à l'Assemblée.

J. G.

Les améliorations apportées à l'article 3

Le Sénat a adopté en commission des Affaires économiques au Sénat, le 9 février, une nouvelle version de l'article 3 qui vise à définir les modalités applicables en cas de non-accord au 1er mars entre un industriel et un distributeur. L'expérimentation pendant trois ans d'une période de médiation d'un mois en cas de non-accord est maintenue. Le texte des sénateurs instaure une rétroactivité du tarif au 1er mars, afin d'éviter de décaler la date de clôture des négociations au 1er avril. Les commandes passées par le distributeur pendant la période de médiation seront soumises au tarif fixé dans un accord de « préavis ». L'objet principal des modifications apportées par les sénateurs est de « cadrer juridiquement les éléments sur lesquels doit se fonder la négociation du préavis », et notamment les conditions économiques du marché et le respect de la non-négociabilité du coût de la matière première agricole, expliquait la rapporteure Anne-Catherine Loisier dans l'exposé de son amendement. Le texte tel que rédigé par l'Assemblée faisait « courir à la fois un risque d'approvisionnement pour tous les distributeurs et un risque de déréférencement brutal et soudain pour les PME », mettait-elle en avant.