TOURISME
L'agritourisme fait face à la crise de la Covid-19

Impacté fortement au printemps 2020 par la crise sanitaire de la Covid-19, l'agritourisme semble aujourd'hui connaître un rebond d'activité. 

L'agritourisme fait face à la crise de la Covid-19
En Haute-Savoie, la Ferme du Petit Mont pratique l'agritourisme depuis 26 ans. ©le_ferme_petit_mont

En France, l'agritourisme n'a rien d'anecdotique. Si les chiffres récents manquent, en 2010, le recensement agricole estimait que 13 800 exploitations agricoles françaises exerçaient des activités liées au tourisme. « Aujourd'hui, environ un cinquième des agriculteurs pratique au moins une activité touristique », estime Isabelle Perry, élue au Comité d’orientation agritourisme Bienvenue à la ferme. Ce réseau fondé par les chambres d'agriculture regroupe des producteurs pratiquant la vente directe et l'agritourisme.

Le Covid-19, un coup d'arrêt

Éleveuse de chèvres et de cochons en Haute-Savoie, Rebecca Zucarelli (La Ferme du Petit Mont), s'est lancée dans l'aventure il y a 26 ans. « On avait envie de transmettre, c'est très enrichissant de recevoir du public et d'échanger », estime-t-elle. En 2019, avec une activité de ferme pédagogique accueillant plus de 10 000 personnes par an, la Ferme du Petit Mont a obtenu 50 % de ses revenus avec l'agritourisme. Mais depuis 2020, ses comptes affichent 40 000 € de perte chaque année. Avec ses associés, ils ont alors décidé d'arrêter le pédagogique pour favoriser l'hébergement, avec des activités ludiques accueillant moins de monde. Ils ont dû également augmenter leur troupeau de chèvres. Pour beaucoup de ceux qui pratiquent l'agritourisme, l'arrivée de la Covid-19 au printemps 2020 a été un coup de massue soudain. Le réseau Bienvenue à la ferme a mené une enquête auprès de ses adhérents. Interrogés entre le 21 avril au 15 mai 2020, ils étaient 70 % à déclarer des pertes sur leur chiffre d'affaires : pour 40 %, elle dépassait 5 000 € et même 20 000 € pour 12 % d'entre eux. 25 % ont dû recourir à des suppressions d'emploi. Le constat était alors grave puisque 40 % des répondants estimaient être « en danger » ou « incertains » quant à la pérennité́ de leurs activités en agritourisme. D'autant que beaucoup (34 %) n'ont pas pu bénéficier d'aides de l'État, notamment, car dans 72 % des cas, la structure juridique qui porte l’activité́ d’agritourisme est la structure agricole. Les deux activités n'étant pas dissociées, il a été difficile de justifier de pertes suffisantes.

Une reprise exponentielle

Du côté de Gîtes de France, au 15 mai 2020, on enregistrait également une baisse d'activité de 30 %. « Mais dès l'été, cette perte a été rattrapée car il y a eu un afflux de personnes vers les campagnes, qui ne s'est pas calmé depuis, tempère immédiatement Solange Escure. Aujourd'hui, par rapport à 2019, on enregistre une hausse des réservations allant de 20 à 30 % selon les territoires. » En Auvergne-Rhône-Alpes, l'augmentation est de 25 à 30 %. Passé le printemps 2020, la crise de la Covid-19 a ainsi paradoxalement été source de forte augmentation du tourisme rural. Dans un premier temps, contraints de ne pas sortir de l’Hexagone, les touristes se sont tournés vers de nouvelles destinations en France. Recherchant à éviter les attroupements, ils se sont détournés des grandes régions touristiques. « Et puis, à plus long terme, les envies ont changé. Il y a une recherche de slow tourisme, de nature, de calme, de partage, de convivialité et de sens. Aller à la rencontre des agriculteurs et de leurs terroirs fait partie de cette recherche de sens », relève Isabelle Perry. Pour elle, comme pour Solange Escure de Gites de France, l'été s'annonce très bon. Particularité de cette année, les touristes ont anticipé : 70 % des carnets de réservation sont déjà pleins pour Gîtes de France. Et les touristes étrangers (européens principalement) semblent également faire leur retour. Mais si du côté de l'hébergement la reprise est rapide, dans d'autres secteurs tels que la restauration et les fermes pédagogiques, la Covid-19 a laissé des séquelles profondes et l'activité a encore aujourd'hui des difficultés à reprendre.

Leïla Piazza