Cru saint-véran
Assemblée générale de l'Union des producteurs du cru saint-véran : Kevin Tessieux passe le relais

Florence Bouville
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Le 6 juin, à Saint-Vérand, Kevin Tessieux a lu son dernier rapport moral en tant que président de l’Union des producteurs du cru saint-véran. Occasion pour lui d’officiellement laisser sa place, sans pour autant lâcher complètement les démarches en cours. Grande nouveauté dans l’instruction du dossier premier cru, la mise en place d’une base de données interactive, visant à faciliter la collecte des informations (techniques, historiques…).

De ses huit années de présidence, Kevin Tessieux retient, avant tout, « la capacité des professionnels viticoles à se fédérer ». D’après lui, c’est loin d’être le cas de tous les secteurs. Au cours de ses mandats successifs, il a toujours « fait en sorte que tout soit collectif ». Tous les producteurs présents dans la salle du caveau l’ont remercié pour l’ensemble des dynamiques qu’il a fait naître au sein de l’Union des producteurs du cru saint-véran. Toutefois, « il est important de savoir prendre du recul et apporter un regard neuf dans l’animation », poursuit-il. Il va bien sûr continuer à aider et à suivre les « chantiers techniques » qui sont en cours. Parmi lesquels figure le dossier premier cru.

Capacité de production

Petit bilan au niveau des surfaces de vignes : on compte 736 ha plantés en 2022, pour une production de 60 hl/ha (34 hl/ha en 2021 ; 62 hl/ha en 2020).

Vincent Nectoux, président de la commission technique est revenu sur les obligations de traitements contre la flavescence dorée, autre sujet d’actualité. L’an dernier, ils avaient fait une « demande d’expérimentation de prospections individuelles ». Cette demande avait été acceptée par le préfet de région. « Globalement, cela a très bien fonctionné, la participation était bonne », souligne Vincent. Seul point noir, la compilation numérique des cartes à envoyer à la Fédération régionale de défense contre les organismes nuisibles (Fredon) était difficile à réaliser. L’ODG est actuellement en attente d’un outil plus performant. Mais cela n’empêchera pas les prospections individuelles d’être reconduites, au sein des mêmes villages : Prissé et Chasselas. Par contre, concernant la commune de Prissé, la demande de ne pas traiter aux abords de la voie verte a été refusée, du fait de la pression sanitaire trop importante.

Du côté des marchés

Philippe Longepierre, directeur du pôle marchés et développement au sein du Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne (BIVB) a ensuite fourni une analyse économique des ventes et du positionnement du cru au sein du marché. Sur la campagne 2022-2023 (cumul de neuf mois), les ventes en bouteille (3,1 millions d’équivalents 75 cl) ont connu une baisse de 19 %, par rapport à la campagne 2021-2022. C’était déjà le cas l’année dernière (-19,3 % par rapport à 2020-2021) en raison du gel 2021. Même causse d'ailleurs pour tous les vins blancs de Bourgogne, qui enregistrent une moindre baisse néanmoins en comparaison : -15,5 %. D’autre part, tendance à la hausse pour le stock comptabilisé fin avril 2023. Ce dernier a augmenté de 10,6 %, ce qui représente un volume de 48.660 hl et se traduit par seize mois de ventes en stock. Pour rappel, l’appellation saint-véran représente 7 % des volumes vendus dans les appellations blanches de Bourgogne.

Concernant les achats des consommateurs en grande distribution, on note une diminution de 25 % en volume d’achat. Donnée à mettre en parallèle avec la hausse, non négligeable, du prix d’achat : +15,7 %. Conséquence : une montée en gamme avec une baisse de 13 % du chiffre d’affaires (CA). Ces chiffres suivent parfaitement la tendance régionale des autres vins blancs bourguignons : -23,4 % en volume d’achat, +16 % en prix d’achat et -11 % en CA. Par contre, à l’échelle de l’ensemble des vins AOC français, le prix d’achat n’a augmenté que de 5,5 % et le CA n’a chuté que de 2,7 %.

Du côté de l’exportation et des achats importateurs, se dresse un tableau différent. Pour les appellations villages du Mâconnais, malgré une baisse de 13,3 % en volume d’achat, le CA affiche une augmentation de +1,9 %. Autrement dit, 4,9 millions d’équivalents 75 cl sont partis à l’étranger, notamment en Belgique, au Royaume-Uni, au Canada…

Dossier premier cru : « une base de données vivante »

Afin de faciliter la récolte et la centralisation des données alimentant le dossier premier cru, l’Union des producteurs a créé une toute nouvelle plateforme numérique. Via la même interface, trois accès (tableaux de bords) sont possibles : un pour l’INAO, un pour l’ODG et un pour les producteurs. La méthode fixée par l’INAO vise à mener une première étude de chaque climat, évalué comme s’il s’agissait d’une appellation. C’est pour cette raison que l’intégralité des données concernant les revendications de climats doit être disponible et accessible. Il y a ainsi toute une première phase d’éligibilité, pour ensuite savoir si le lieu-dit peut rentrer dans une phase d’étude technique.

« D’ici fin juin, tous les opérateurs auront accès au portail », assure Kevin Tessieux. L’objectif est simple : cumuler l’ensemble des données de notoriété et de revendication relatives aux climats au sein d’une unique base, donnant également accès à une carte interactive. Un viticulteur a d’ailleurs spontanément pris la parole pour souligner l’aspect intuitif de cet outil et la facilité de prise en main. Ce dernier se veut simple et pratique : pari réussi. Les champs à remplir avaient été validés, en amont, avec l’INAO. Cet outil présente donc de nombreux avantages ; « il permet un traitement, une analyse et une exportation des données à distance », affirme Kevin Tessieux. « L’ODG n’a pas le pouvoir de forcer l’entrée d’un climat mais bien d’apporter le soutien logistique nécessaire », explique-t-il. Exemple concret : récupérer l’ancienneté d’un parcellaire. Des statistiques pourront également être effectuées en fonction des écarts de prix renseignés. Chaque viticulteur se doit de remplir directement sa déclaration de récolte, et ce tous les ans, car personne ne sait combien de temps va durer l’instruction du dossier. Il peut bien sûr y ajouter des informations issues de la presse et/ou de concours. « La base est toujours vivante, les choses ne sont pas déconnectées », souligne le président sortant. Comme il s’agit, en effet, d’un « dossier avec l’impression d’un faux rythme », un climat pourra très bien passer dans une deuxième phase de sélection. D’où l’importance d’alimenter la base au fur et à mesure. Au bilan, cela « donne du crédit sur le sérieux du dossier ». En sachant que c’est la première fois qu’une telle initiative est prise par un ODG.

Les actions communication, quant à elles, ne faiblissent pas. 800 bandes dessinées "Les fondus du vin Saint-Véran" ont déjà été vendues et le rendez-vous est déjà pris pour les Grands jours de Bourgogne 2023.

La fin du climat "La Côte-Rôtie"

L’ODG saint-véran a décidé de mettre fin au litige impliquant les vignerons mentionnant le lieu-dit "La Côte-Rôtie" et les producteurs de l’AOC Côte-Rôtie, dans la Vallée du Rhône. Sur demande de l’INAO, le nom de ce climat, s’étendant sur une dizaine d’hectares, ne peut plus être inscrit sur l’étiquetage des bouteilles. Pour régler ce litige, l’Union des producteurs du cru saint-véran a dû verser, en plus des frais d’avocat, une indemnité de 18.000 € à l’INAO. Un prêt est donc en cours, auprès de la Confédération des appellations des vignerons de Bourgogne (CAVB). « Pour l’instant, on a cette dette vis-à-vis de la CAVB et il y a encore la refacturation à faire auprès des vignerons », explique Kevin Tessieux. L’objectif était de fournir un « accompagnement jusqu’au moment où on trouverait une solution à l’amiable avec l’INAO et l’AOC Côte-Rôtie », poursuit-il. Or, le risque de voir la facture grimper pour tous était fort probable. « L’ODG ne s’engagera plus dans des démarches concernant ce lieu-dit-là », conclut-il. Pour autant, une parade pourrait être bientôt trouvée...