Bio Bourgogne
Usage des PNPP en viticulture bio : nouveau guide d'utilisation

Florence Bouville
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Plusieurs viticulteurs utilisent déjà, depuis des années, des Préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP), que ce soit en tant que régulateur cryptogamique, cicatrisant, stimulateur de croissance… Leurs usages sont très variés. Le 22 avril dernier, les équipes de Bio Bourgogne et Interbio Franche-Comté ont créé un guide de pratiques, à destination en amont, des producteurs de plantes et en aval, des viticulteurs de la région.

Usage des PNPP en viticulture bio : nouveau guide d'utilisation
Depuis avril 2023, un guide de pratiques sur l'usage des PNPP en viticulture biologique est diffusé par Bio Bourgogne et Interbio Franche-Comté.

Dans un article paru fin mars, nous vous avions déjà parlé des Préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP), au travers d’un projet de recherche participatif (Vitirepere), coordonné par l’Inrae. Cette fois-ci, il s’agit d’un guide de pratiques développé par les associations Bio Bourgogne et Interbio Franche-Comté, à destination des viticulteurs bio du territoire BFC.

Tout est né des travaux de deux animatrices de groupes Dephy : Bérengère Thill, en charge du secteur jurassien, et Sarah Lagarde, couvrant principalement la côte chalonnaise. Bérengère étudie depuis des années les PNPP et leurs usages sur le terrain. Il y a un an et demi, lorsque Sarah a rejoint la structure, elles ont rapidement échangé sur ce sujet et mutualisé leurs retours d’expérience. D’où l’idée et l’envie de rédiger un guide de recensement des pratiques, basé sur des témoignages. L’objectif du support ne s’arrête pas là, les deux animatrices sont aussi allées à la rencontre de producteurs locaux de PNPP.

Contrairement à certaines idées reçues, les PNPP ne sont pas seulement utilisées en agriculture biodynamique. Tous les types de production peuvent y recourir et il existe une multitude de façons de les préparer (infusion, décoction, macération…). En biodynamie, les substances de base peuvent être "dynamisées" et constituent donc des préparations spécifiques. En résumé, l’usage des PNPP reste majoritaire en biodynamie, mais les deux termes ne sont pas synonymes.

Des données déjà à disposition

Grâce à leur travail quotidien mené au sein des groupes Dephy, Sarah et Bérengère ont à disposition une grande quantité de données agronomiques, notamment via les calendriers de traitement. Elles ont d’ailleurs l’habitude de mettre en parallèle les rendements obtenus avec les objectifs initiaux de l’agriculteur, très différents d’un cas à l’autre. Dans chaque groupe Dephy, il y a en réalité des sous-groupes. Sur son secteur, Bérengère a constaté la chose suivante : les viticulteurs utilisant le moins de cuivre sont ceux qui ont le plus recours aux PNPP, tel un mécanisme de compensation.

Que ce soit dans le Mâconnais ou dans le Chalonnais, Sarah organise une réunion avec les membres du groupe qu’elle anime toutes les trois semaines environ. Parmi les sujets abordés, revient fréquemment l’usage des PNPP et des questions précises sont posées sur les préparations. « Les échanges se font spontanément, au sujet de préparations biodynamiques, plus largement sur des tisanes, ou sur le traitement de maladies en particulier », confie Sarah. Même si l’animatrice est consciente d’avoir un « énorme filtre sur la viticulture du département », via la vision de l’agriculture biologique ; cela montre toute la dynamique et l’intérêt croissants autour de cette thématique.

« Capitaliser et valoriser les retours »

Au début du guide, figure un rappel de la réglementation en vigueur. Du fait de son caractère évolutif, les équipes de Bio Bourgogne et Interbio Franche-Comté réalisent une veille réglementaire constante, ciblant à la fois les produits phytosanitaires et les PNPP (liens internet mis à jour dans le support). Autre contenu important, un tableau synthétique des plantes et de leurs usages, compilant substances de base (prêle, ortie, saule) et biostimulants (pissenlit, camomille, bourdaine…). On distingue ainsi les propriétés physico-chimiques, le mode de préparation, les effets recherchés et l’utilisation.

Dans la partie purement dédiée aux témoignages, les viticulteurs interrogés ne font pas tous partie du groupe Dephy de la côte chalonnaise. Cependant, ils sont tous adhérents du Gabsel, regroupant les agriculteurs bio de Saône-et-Loire. L’ensemble des propos a été récolté à l’automne 2022. Ces « témoignages de ressenti » sont très variés. Ils mettent également en lumière les difficultés rencontrées et les erreurs à éviter. Outre l’aspect "diminution de phytos", dans un contexte de changement climatique, certaines plantes peuvent constituer un moyen de lutte contre la sécheresse. C’est par exemple le cas de la camomille et de l’achillée. Fabio Montrasi, producteur au Château des Rontets à Fuissé déclare : « ces dernières années, j’ai fait beaucoup d’achillée et de camomille, surtout durant les périodes de grosses chaleurs : cela me semble efficace. Je ne fais jamais de passage uniquement de plantes, je mélange toujours avec mes traitements cuivre et soufre". Selon lui, « l’efficacité des plantes est difficilement quantifiable […] dans tous les cas, ce n’est pas toujours agréable de faire des traitements antifongiques […] la phytothérapie peut au moins apaiser la vigne ».

Un annuaire des producteurs de plantes

Le guide comprend également un annuaire et une carte des producteurs locaux de plantes et de préparations, consultables en ligne. Pour l’instant, la majeure partie des contacts recensés sont installés dans le Jura. Ils ont été plus nombreux à répondre à l’appel lancé par Bio Bourgogne. Toutefois, les supports seront fréquemment mis à jour, afin d’y intégrer des producteurs supplémentaires.

Les préparateurs n’ont pas forcément pour habitude de fournir des viticulteurs. Leurs produits sont généralement destinés au maraîchage ou aux tisanes alimentaires. Il est donc très intéressant pour eux de connaître, en amont, les usages et savoir-faire des viticulteurs du territoire, pour ensuite, si possible, mieux orienter leurs préparations. Mêmes enjeux pour l’aval, les agriculteurs n’ont pas toujours le réflexe d’acheter leurs plantes à des fournisseurs bio locaux. Ce guide sert ainsi de « coup de pouce pour faire du lien sur le territoire », souligne Sarah. Déjà présenté dans les bulletins techniques de Bio Bourgogne, il est actuellement diffusé via le canal Ecophyto national et les autres relais de l’association (Produire bio, Itab, réseaux sociaux…).