Cuma compost 71
L’agronomie bien appliquée !

Cédric MICHELIN
-

Le 10 septembre au lycée agricole de Fontaines, la Cuma Compost 71 avait invité deux experts de la fertilisation des sols pour son assemblée générale. Des interventions aussi intéressantes que l’activité de la Cuma en elle-même. Cette dernière continue de développer le déchiquetage de bois en parallèle de son activité compost évidemment.

L’agronomie bien appliquée !

Le président de la Cuma Compost 71, Thierry Lacroix était visiblement heureux de faire une assemblée générale Démobilisé par le Covid ? Pas du tout. Les administrateurs l’ont prouvé lors de la présentation de l’activité 2020. L’occasion de présenter la nouvelle animatrice, Camille Petit, arrivée ce 1er mars, en remplacement de Marie-Jo Beauchamps partie au CFPPA de Charolles. Camille est également animatrice à la FR Cuma Saône-et-Loire.
Avec 428 adhérents actifs pour la partie compost, et plus de 500 avec la partie "bois", la Cuma Compost 71 continue de séduire par son utilité. En 2020, le responsable des tournées, avec cinq autres administrateurs, Laurent Meulin présentait l’organisation des tournées, représentant environ 12.000 minutes de rotor. « On a bien travaillé et cette année est aussi en bonne voie puisque nous sommes déjà à 10.500 min rotor, avec peu de frais », se félicitait-il, au côté de Jean-Marc Auduc, responsable du matériel de la Cuma, remerciant au passage le chauffeur pour sa rigueur et les adhérents qui jouent le jeu de bien préparer leurs tas. Pour autant, tout n’est pas parfait. La météo 2020 avec « du fumier sec » a « un peu » ralenti le retourneur d’andain, sans non plus aller jusqu’à jouer « sur le prix » final pour les adhérents. Autre enseignement de l’année passée, « les tas sont de plus en plus importants », nécessitant plus de temps. « N’oubliez pas de vous inscrire sur la tournée. En 2022, les inscriptions se feront jusqu’au mercredi pour envoi de la tournée au chauffeur » pour la semaine suivante. Un chauffeur rigoureux qui a pour consigne de comptabiliser 30 minutes de rotor en plus si des fils-ficelles-filets viennent s’emmêler dans le rotor. Idem si la proportion de cailloux dans le tas est anormale. Une façon indirecte d’entretenir la composteuse qui en est à sa 5e année. Le renouvellement pourrait intervenir en 2023.

Le déchiquetage s’étend vers l’Ain

La Cuma Compost 71 propose également la prestation d’abattage (413 h) et déchiquetage de bois (15.207 MAP). En 2021, la Cuma s’attend à « faire un peu moins d’heures » en raison de plus grandes disponibilités en foins et pailles.
Pourtant, la Cuma Compost 71 ne lève pas le pied, elle qui s’est associée avec une Cuma de l’Ain (de Saint-André-sur-Vieux-Jonc), spécialisée dans l’élagage qui a acquis une déchiqueteuse en 2021. L’objectif, atteindre la saturation du matériel comme avec la Cuma de la Nièvre Terr’Eau (40.000 m3/an), mais cette fois pour la partie sud et limitrophe avec l’Ain. « On travaille ainsi en interCuma. Cela devrait nous permettre de passer une marche supplémentaire en Saône-et-Loire et dépasser les 15.000 m3/an », annonçait Thierry Lacroix. Outre un changement de capital social, au vu des montants parfois conséquents des chantiers, la Cuma sera « vigilante » à ne pas avoir de défaut de trésorerie.
Laitier et voisin de l’Ain justement, un jeune éleveur proposait d’enquêter sur l’opportunité d’investir dans un séparateur de phase de lisier au sud du département, qui selon lui, « marcherait bien ». Va pour lancer une enquête des besoins lui répondait le conseil d’administration « mais attention, après, il faut s’en occuper. On est tous des bénévoles. Être en Cuma à cela d’intéressant que tout le monde s’occupe d’un travail précis. On est un groupe. Ce serait bien que des jeunes rentrent justement au Conseil », rebondissait Thierry Lacroix qui concluait sur cette porte ouverte avant de passer à la convivialité, autour d’un pot de l’amitié à la fin de la réunion.

Compost : « À chacun sa recette »

La conseillère en valorisation des déchets de la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire, Marie-Rachelle Viallet - accompagnée d’Audrey Celary (remplaçante de Françoise Ménégon, partie à la retraite) – a présenté le compostage en long et en large, surtout les bonnes pratiques, l’interprétation des résultats d’analyse et fait un point sur la réglementation. Ce « processus de décomposition et de transformation contrôlé des matières organiques biodégradables » se décompose justement en plusieurs phases. La première est une montée en température (jusqu’à 70 °C), avec dégradation de la cellulose et perte de masse. La deuxième est une phase « plus froide autour de 40 °C » durant laquelle des champignons rendent la matière « plus complexe pour tendre vers de l’humus stable ». Enfin, la troisième et dernière phase survient avec l’apparition de macro-organismes (fourmis, nématodes, acariens, cloportes, vers blancs, lombrics, etc.) qui permet d’équilibrer le pH. Voilà pour la théorie « mais à chacun de faire sa recette », selon les déchets verts ou autres incorporés, car les conditions réelles - humidité, climat sec - influent sur les processus biologiques. « Suivez vos températures, le C/N qui doit être compris entre 20 et 30, l’humidité autour de 40 à 60 %, sinon arrosez… ce sont les clés de la réussite », conseillait Marie-Rachelle Viallet jusqu’à l’analyse en laboratoire pour connaître précisément les apports de votre compost avant épandage. La chambre d’agriculture fait également des analyses et suit les tendances depuis 2013. « Attention, avec la loi sur l’économie circulaire, le compost pourrait avoir de nouveaux seuils d’innocuité à respecter comme pour toutes les matières organiques épandues en France ». La réponse est attendue en décembre.

Pour ou contre le labour ? « Un faux débat ! »

Pédologue à la chambre régionale d’agriculture de Bourgogne Franche-Comté, Christian Barnéoud a délivré d’importants messages autour de la matière organique du sol, en lien donc avec le compost et autres apports. « La vraie question est surtout comment entretenir votre matière organique ? Y-a-t-il toujours intérêt à apporter des composts ou autre à vos sols ? » Pas forcément, prenait-il le temps d’expliquer sous forme d’échanges avec la salle. D’abord, « l’humus, la partie la plus stable de la matière organique de vos sols, a en moyenne 50 ans dans vos parcelles », rappelait-il. Le sol est également constitué de minéral et minéraux, de macro et micro-organismes du vivant (bactéries, champignons, vers de terre, fourmis, etc.) et de résidus observables de cultures. « Tout le monde mange tout le monde, ça respire et dégage du CO2 », schématisait-il, preuve de biodiversité. Portance du sol, porosité pour retenir l’eau, stabilité… en dépendent. « Tout ce que l’on met dans le sol a une incidence ».
Réservoirs à carbone (C), humus et résidus des cultures « servent à nourrir » cette faune (bactéries, champignons…), dégradant alors le carbone en azote (N), ensuite assimilable (nutriments) par les plantes. Un concept clé à garder en tête en toute occasion. Pour l’agronome, « tant que les conditions de terrain ne sont pas connues, un échantillon de terre n’est qu’un sac de poussière », histoire de dire qu’une analyse de sol avec un C/N n’est pas un indicateur suffisant pour savoir quoi faire. En effet, il s’agit d’un rapport (division), n’indiquant pas les quantités de carbone ou d’azote et encore moins dans chacun des quatre compartiments. « Par exemple, un C/N de 14, donc anormalement élevé par rapport à la normale de 8, veut dire qu’il y a trop de carbone dans votre sol, donc soit il n’est pas assez consommé (pas les êtres vivants du sol, NDLR), soit il y a trop d’apport de carbone et le sol n’est pas capable de le digérer. Donc mettez-vous à la place d’une bactérie pour répondre à ces questions », plaisantait-il pour indiquer de regarder leur « habitat et environnement de travail (pH…) ». À l’inverse un C/N de 5, avec « trop d’azote » peut vouloir dire qu’il n’y a plus assez de carbone ou qu’il est « surconsommé » par les être vivants du sol, « typique des élevages à lisier qui font tourner trop vite la machinerie du vivant ». Et de conclure sur la polémique de ces dernières années, entre labour ou non labour : « c’est donc débile d’opposer. Il ne faut pas oublier à quoi sert le labour : enfouir les mauvaises herbes, restructurer (ameublir), enfouir un couvert et exciter les micro-organismes. Et puis, il y a le plaisir aussi de labourer ! Mais, oui, en effet, il ne faut pas non plus sortir la charrue chaque année ».