Un rebond des surfaces trop modeste
Les prévisions de semis d’hiver diffusées par le ministère de l’Agriculture font apparaître, à la date du 1er février, une reprise sensible des céréales d’hiver qui ne permet cependant pas de rattraper les retards de la moyenne quinquennale. Pour le colza, en revanche, ces derniers chiffres confirment la dégradation.

La note Agreste, du service prévisions du ministère de l’Agriculture a publié, le 9 février, ses nouvelles estimations de semis d’hiver, au 1er février. Elles confirment la reprise des emblavements en céréales d’hiver qui, avec 6,85 millions d’hectares (Mha), enregistreraient une progression sur l’an dernier, même date, de 12,9 %, mais resteraient toutefois inférieurs de 1,9 % à la dernière moyenne quinquennale. Les semis de blé tendre ont légèrement augmenté depuis la dernière note et ont été portés à 4,86 Mt soit 15 % de mieux qu’en février 2020 et en légère progression (+0,7 %) sur la moyenne quinquennale. Les surfaces de blé dur rebondiraient de 14,6 % par rapport à février 2020, mais accuseraient encore un gros retard (- 19,3 %) sur la moyenne des cinq années précédentes, avec 250.000 hectares. La surface en orge d’hiver progressait de 3,1 % sur 2020 et accuserait encore un retard de 9,1 % sur cinq ans. La superficie de colza d’hiver continuerait de régresser, avec 1 Mha, soit un recul de 9,8 % sur décembre dernier et de 26,6 % sur la moyenne quinquennale ; c’est le plus bas niveau enregistré depuis 1997.
Baisse probable des semis de printemps 2021
À partir des enquêtes d’intentions de semis réalisées auprès d’un échantillon d’agriculteurs, le ministère envisage, très prudemment, une baisse des semis de printemps, compte tenu de l’augmentation des emblavements du printemps 2020 pour compenser la baisse des semis d’hiver contrariés par les facteurs climatiques. Donc, sous toute réserve, les emblavements en orge de printemps reculeraient de 40 % par rapport à l’an dernier retrouvant son étiage historique. Le tournesol reculerait de 25 % et le soja de 25 à 35 %. La baisse serait beaucoup plus limitée, 7 % pour les pois protéagineux. Les intentions de semis de maïs (grains et fourrages) atteindraient de 15 à 18 %. Les services de prévisions du ministère ne prévoient pas de rebond des surfaces betteravières mais un coup de frein à l’expansion des surfaces de pomme de terre. Outre ces prévisions, la note Agreste a apporté quelques ajustements à ces précédentes annonces de décembre dernier. Ainsi, la production de blé tendre (récolte 2020) est légèrement revue à la hausse, avec 29,1 Mt, celle d’orge étant abaissée à 10,4 Mt. La production de betteraves industrielle est augmentée de 140.000 t, à 26,4 Mt.
Blé dur : une relance ?
Depuis le rebond enregistré en 2016, les surfaces consacrées au blé dur dans l’hexagone n’ont cessé de se dégrader. Malgré les intentions de relance manifestées par la filière, elles sont tombées de 386.600 hectares en 2016 à 219.000 ha (semis d’hiver) en 2020 pour rebondir de près de 15 % cette année, mais accusant encore un retard de 19 % cette année, sur les cinq précédentes. Les raisons de cette dégradation sont diverses : succession de mauvaises récoltes, différentiel de prix avec le blé tendre insuffisant, abandon accéléré dans les régions méridionales traditionnelles, (pas d’aides spécifiques, etc.). Pourtant la demande est présente, de la part des semouliers, des producteurs de pâtes et des exportateurs. Lors de la récente journée Blé dur organisée par Arvalis-institut du végétal, le représentant de l’AGPB, a annoncé le lancement d’une étude stratégique menée par l’ensemble de la filière et visant à l’élaboration d’un plan d’action dès la fin de cette année.
Le colza au plus bas depuis 1997
Le service statistique du ministère de l’Agriculture (Agreste) a revu à la baisse, le 9 février, ses estimations de semis de colza qui tombent au « plus bas depuis 1997 ». « La sole de colza d’hiver baisserait de 9,8 % sur un an et de 26 % par rapport à la moyenne 2016-20 pour s'établir à 1 million d'hectares, niveau le plus bas depuis 1997 », selon une note. Ce recul concerne principalement deux régions de l’Est : la Lorraine passerait de 95.000 à 43.000 ha (-55 %) entre 2020 et 2021, la Champagne-Ardenne de 128.000 à 81.000 ha (-39 %). Principale région productrice, le Centre-Val de Loire verrait à l’inverse ses surfaces augmenter de 11.000 ha. En blé tendre, Agreste table sur 4,9 Mha, soit une progression de 15,2 % par rapport à 2020, année de fortes intempéries, mais de seulement 0,7 % par rapport à 2016-20. « Toutes les régions verraient leurs surfaces augmenter sur un an », indique le ministère.
Le colza «essentiel» dans la succession des cultures
«Première grande culture mellifère», le colza est «essentiel» dans l’assolement, ont souligné le 9 février la Fop (producteurs d’oléoprotéagineux, FNSEA) et Terres Inovia (institut technique), suite à l’arrêté néonicotinoïdes qui limite son implantation après la betterave traitée avec de tels insecticides. La place de l’oléagineux, «dans l’apiculture comme dans le système de culture de l’exploitation», est telle qu’il faut «permettre la culture de colza en année N+2, après une betterave» enrobée, affirme le président de Terres Inovia Gilles Robillard. Cette possibilité d’anticipation figure dans l’arrêté néonicotinoïdes, publié le 6 février. Mais elle est conditionnée à des mesures d’atténuation et de compensation, sinon le colza ne peut être semé qu’en N+3 après la betterave traitée avec des néonicotinoïdes. Appelant à «consolider l’avancée obtenue», le président de la Fop Arnaud Rousseau déclare: «Toutes les filières, qu’elles soient agricoles ou apicoles, doivent agir de concert» pour cela. Le colza est «la première grande culture mellifère française en termes de surfaces», représentant 9% de la production nationale de miel, d’après le communiqué.