Flavescence dorée
La situation appelle à la mobilisation

Françoise Thomas
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Devant l’aggravation de la situation, plusieurs réunions d’information concernant la propagation de la flavescence dorée sont organisées actuellement. La première s’est déroulée jeudi 13 janvier à La Chapelle-de-Guinchay. Trois autres ont suivi cette semaine, plus du côté du Rhône. Ces rendez-vous représentent la base d’une lutte fondée sur la prise de conscience de l’intérêt de la mobilisation de tout le secteur viticole.

La situation appelle à la mobilisation
Une cinquantaine de viticulteurs sont venus participer à la première des quatre réunions d’information sur la flavescence dorée organisées dans le Beaujolais, entre état des lieux et moyens de lutte.

Les réunions d’information concernant la propagation de la flavescence dorée sont initiées par l’ODG Beaujolais & Beaujolais villages et l’ODG des crus du Beaujolais, en partenariat avec les Draaf et les Fredon Auvergne-Rhône-Alpes et Bourgogne Franche-Comté. Deux régions pour deux départements se départageant le vignoble beaujolais. Il faut dire que le nord du Rhône et le Sud de la Saône-et-Loire sont particulièrement impactés par la flavescence dorée. Si le foyer « historique » saône-et-loirien est dans le Nord mâconnais, désormais sept communes de l’extrême sud du département ont au moins eu un résultat positif lors de la dernière prospection (Romanèche-Thorins, La Chapelle-de-Guinchay, Saint-Symphorien-d’Ancelles, Saint-Amour, Chânes, Crèches et Pruzilly).

« Plus de 3.000 échantillons ont été prélevés sur la Bourgogne. 132 se sont révélés positifs à la flavescence dorée et 115 d’entre eux sont en Saône-et-Loire ! », relate d’entrée de jeu Sylvie Jacob de la Fredon BFC. En tout, ce sont désormais 34 communes du département qui sont concernées.

D’année en année, les signalements et les prospections confirment la progression importante de la maladie lorsqu’il s’agit d’une souche épidémique : « en 2013, seul un échantillon à la Chapelle-de-Guinchay s’était révélé positif mais d’une souche non épidémique. En 2019, un foyer épidémique a été découvert à Romanèche, en limite de la Chapelle. Cette année, sur 36 prélèvements réalisés sur cette commune, 27 sont positifs… », prend comme exemple Sylvie Jacob.

Une procédure en cinq points

Le propos des réunions est véritablement d’inciter à la lutte contre les jaunisses tout au long de l’année. Une lutte qui se déroule en cinq points principaux. Il convient déjà de procéder à l’arrachage de tout cep marqué (bois noir (BN) ou flavescence dorée (FD)) avant le 1er avril, et à l’arrachage de la parcelle à partir de 20 % de ceps contaminés (1). « Couper ras ne suffit pas », ont insisté les intervenants, la maladie restant alors présente dans les racines. En revanche, les brûler une fois arrachés n’est pas utile. Il faut savoir qu’en raison du caractère obligatoire de cette lutte, toute une procédure est prévue pour la bonne (pour ne pas dire stricte ou obligatoire) application de cet arrachage. Il faut également respecter le nombre de passages et les dates et modalités des traitements décrétés par arrêté préfectoral et « déterminés selon l’infestation repérée sur le secteur », a rappelé Jérôme Boyer de la Draaf BFC ; traiter les nouveaux plants à l’eau chaude ; participer aux opérations de prospections collectives ; bien nettoyer le matériel en sortie de parcelles contaminées pour éviter tout essaimage de la maladie.

La lutte demande des années

La grande problématique de ces jaunisses, BN et FD, est le délai entre la contamination et l’expression des symptômes qui conduit à la mise en place des traitements. En effet, il faut un an minimum avant l’apparition de la maladie. « Cela fait donc pratiquement deux saisons de latence ce qui laisse largement le temps à l’insecte de contaminer une large zone », d’où le caractère exponentiel de cette maladie. Ainsi, taire un signalement ou faire fi d’une prospection, « c’est le risque de passer à côté d’un foyer, et chaque année, on peut multiplier par dix le nombre de pieds contaminés », a insisté Sylvie Jacob.

Cependant, les intervenants se sont montrés encourageants : certes la lutte est longue « mais là où le traitement est bien fait, ça marche ». Et Bernard Dandalet de poursuivre « cette lutte est un vrai travail de pro, vous êtes responsable sur votre parcelle et sur celle des voisins. Quand tout le monde traite en même temps, on constate rapidement une chute de la contamination ». D’où l’importance de mobiliser l’ensemble des acteurs du secteur viticole et de convaincre les plus dubitatifs.

 

(1)    Désormais la nouvelle règle consiste à additionner le nombre de ceps arrachés sur trois ans, et non plus seulement à l’échelle d’une seule campagne comme jusqu’à présent. Cela fait que l’on peut arriver beaucoup plus vite au seuil limite des 20 % avant arrachage...

Le bois noir, « gentil » cousin ?
Dans le sud du département, en rouge, les échantillons positifs à la flavescence dorée, en orange ceux au bois noir.

Le bois noir, « gentil » cousin ?

Flavescence dorée et bois noir sont deux jaunisses de la vigne, qui ne peuvent être distinguées que par analyse en laboratoire… À côté du caractère épidémique et donc de la rapidité de progression de la flavescence dorée, le bois noir aurait presque tendance à passer pour un gentil cousin, pauvre victime de sa trop proche ressemblance avec la flavescence dorée. Or le discours a véritablement été nuancé lors de la réunion. Les représentants de la Fredon ont rappelé que le bois noir s’avère lui aussi très préjudiciable pour la vigne, mettant simplement un peu plus de temps à agir, mais avec une forte baisse de productivité. Par ailleurs, autant pour la flavescence dorée, un plan d’action rigoureux et parfaitement coordonné montre son efficacité et réduit son impact, autant pour le bois noir ces mêmes solutions se révèlent bien moins efficientes. Par exemple, l’arrachage n’empêche pas d’avoir tout autant d’expression de BN l’année suivante, d’après le témoignage de plusieurs viticulteurs présents. Les traitements insecticides, utilisés pour la flavescence, sont sans effet : l’insecte porteur et transmetteur de la maladie est moins connu et ne vit pas exclusivement dans la vigne, par ailleurs ses larves sont souterraines. Le BN peut également masquer la contamination à la FD.
Le bois noir est donc à prendre très au sérieux et il est demandé de procéder à l’arrachage de tout cep présentant des symptômes de jaunisse.

La flavescence ne connait pas de frontière

Du côté du Rhône, et donc du nord Beaujolais, la situation progresse aussi de façon exponentielle, comme l’attestent les chiffres rapportés par Denis Bec de la Fredon Aura : dans le Rhône, 8.158 ha ont été prospectés, 4.441 échantillons ont été envoyés au laboratoire Agrivalys 71. 4.016 parcelles sont ressorties positives à la jaunisse, « 3.401 au bois noir, 615 à la flavescence dorée », et de rappeler là aussi l’historique des contaminations. Le premier foyer découvert à Lachassagne remonte à 2014. La première parcelle arrachée le fut à Létra en 2016. En 2018, le Rhône passait de cinq à 12 communes contaminées autour du foyer de Saint-Étienne-la-Varenne.

Aujourd’hui, 43 communes du Rhône sont concernées, pour près de 8.500 ha et des milliers de ceps contaminés.

Cette année, deux parcelles vont être arrachées, plus au sud dans le département, à Saint-Germain-Nuelles.