TERRITOIRE
Contourner les effets de la sécheresse

Afin d’aider les producteurs à s’adapter aux aléas climatiques, les filières de l’élevage et de la viticulture prennent part à divers projets d’expérimentations et de recherches.

Contourner les effets de la sécheresse
Le projet Resyf vise à améliorer la performance et la résistance des systèmes fourragers en élevage face au changement climatique. ©Ceraq

Depuis 1980, le grand Sud de la France et la région Auvergne-Rhône-Alpes connaissent un changement climatique significatif. En 30 ans, les températures ont bondi de 2 °C sur la période de juin, juillet et août. L’air est également plus sec et l’augmentation de l’évaporation affecte les cultures. Mais ces changements s’accompagnent d’un autre phénomène : le territoire rhônalpin est marqué par un réchauffement général plus important en montagne qu’en plaine (+ 0,35 °C par décennie en plaine, + 0,37 °C en moyenne montagne et + 0,45 °C en montagne).

Un déséquilibre entre les ressources fourragères produites sur les exploitations et les besoins des bovins est de plus en plus souvent constaté. Améliorer et optimiser l’accès à l’eau sont également indispensables. « Surtout lorsque la transformation se fait à la ferme, comme dans les alpages de Haute-Savoie, où les exploitations sont connectées à des sources d’eau qui se tarissent », explique Christophe Berthelot, coordinateur au centre de ressources pour l’agriculture de qualité et de montagne, pour les filières laitières AOP-IGP des Savoie.

Améliorer la résilience des systèmes

En 2022, le projet Resyf a démarré afin d’améliorer la résilience des systèmes fourragers des exploitations d’Auvergne-Rhône-Alpes. Dans un premier temps, les techniciens ont repéré les pratiques innovantes développées par une quarantaine d’éleveurs régionaux. Une dizaine d’entre elles a été retenue. L’année 2023 est dorénavant dédiée à la phase de test sur les exploitations. Parmi les expérimentations en cours, figurent notamment la rénovation des prairies et l’intégration de dérobées, tel que le sorgho, entre deux cultures principales à la fin du printemps et durant l’automne. « L’objectif est bien de sécuriser la production fourragère », rappelle le professionnel. La gestion troupeau constitue un second levier à actionner. « Pour réduire les besoins, des éleveurs décalent les vêlages ou révisent les effectifs du troupeau, ajoute le coordinateur. Certains mettent un lot de génisses en pension sur d’autres exploitations. La clé, c’est d’associer plusieurs stratégies de diversification des ressources. Si la taille du cheptel diminue, il faut alors coupler avec la recherche de valeur ajoutée. »

Adapter les cépages

Depuis plusieurs années, le vignoble jurassien intensifie ses recherches afin de lutter contre le gel et la sécheresse. En 2021, le département a été l’un des plus touchés par le gel et les pluies intenses au printemps, abaissant le rendement à 17 hl/ha. En 2022, ce sont surtout les jeunes plantations qui ont le plus souffert de la sécheresse. « À la suite de l’épisode de gel survenu en 2021, nous avons travaillé sur un plan de résilience et établi une cartographie des zones sensibles au gel, relate Laetitia Buffet, responsable d’équipe à la Société de viticulture du Jura. Cette année, nous lançons notre plan de transition dans lequel tout un volet est dédié à la stratégie sécheresse. » Ce plan de transition a également permis un rapprochement avec les projets Vitaf (Viticulture agroforesterie) et Oasis. Ce dernier permet d’utiliser une chambre à pression pour mesurer l’état hydrique et la température du végétal. « Ces tests vont démarrer durant la prochaine campagne et vont se concentrer sur le chardonnay, qui servira de témoin, et le savagnin, qui est le cépage qui donne le vin jaune, mais qui souffre du manque d’eau. » La société suit également de près les tests de porte-greffes, menés par la chambre d’agriculture de la Côte d’Or. Autre mesure phare : l’introduction de variétés d’intérêt à fin d’adaptation (Vifa). L'Institut national de l'origine et de la qualité (Inao) a ouvert cette possibilité pour les AOC côtes-du-jura et arbois. « Les Vifa peuvent rentrer à hauteur de 5 % de l’encépagement de l’exploitation, et à hauteur de 10 % de l’assemblage final, détaille la professionnelle. Le cépage enfariné, présent dans notre conservatoire, sera formidable pour apporter de l’acidité et contrebalancer la sécheresse. » 

Léa Rochon