Gaec Nugues à Dompierre-sous-Sanvignes
Moins de paille consommée grâce aux aires raclées

Marc Labille
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Au Gaec Nugues, aucune vache à veau ne passe l’hiver sur une aire paillée en litière accumulée. Dès la première stabulation libre construite sur l’exploitation il y a 28 ans, la famille Nugues a privilégié des aires raclées pour acheter moins de paille et avoir des charolaises toujours bien blanches !

Moins de paille consommée grâce aux aires raclées
Au Gaec Nugues, la stabulation à logettes sur aire d’exercice raclée est la plus économe de toutes.

À Dompierre-sous-Sanvignes, le Gaec Nugues réunit deux associés – Sébastien et Mathieu - pour un troupeau charolais de 210 vaches inscrites. Les vêlages se déroulent de fin décembre à fin avril et le cheptel est nourri principalement avec du foin et de l’enrubannage. En dépit d’un troupeau de taille importante, aucune des vaches de l’élevage n’est hivernée sur une litière accumulée classique. La seule stabulation de ce type reçoit les jeunes bêtes. Toutes les vaches allaitantes sont logées dans des bâtiments équipés de surfaces raclées. La première stabulation de ce genre a vu le jour en 1993. À l’époque déjà, Bernard, le père de Sébastien et Mathieu, avait opté pour une aire paillée avec un couloir raclé de 3,50 m parcouru par un racleur à chaine. « Il n’y en avait pas beaucoup à l’époque », confirme Sébastien Nugues. La recherche d’un système économe en paille et le souci de la propreté des animaux avaient guidé Bernard dans ce choix avant-gardiste. 

Depuis, la famille Nugues n’a pas changé de stratégie. Et ce même avec un système d’élevage qui n’est pas le plus gourmand en paille du fait d’une ration modérément humide et de vêlages non précoces. Les associés n’ont pas cédé aux sirènes d’une litière accumulée, redoutant les difficultés d’approvisionnement en paille et ne disposant, à l’époque, que de cinq hectares de céréales sur l’exploitation.

64 logettes + aire raclée

La deuxième stabulation raclée a vu le jour en 2011 et « elle est la plus économe de toutes », fait valoir Sébastien Nugues. Ce bâtiment pour 64 vaches à veaux a la particularité d’être équipé de 64 logettes. Ces logettes sont disposées en deux rangées de 32 avec vue sur les cases à veaux occupant un couloir central sur terre battue de 3,60 m de largeur sous le faîtage du bâtiment. Les vaches sont ainsi réparties en huit cases pour huit vaches à veaux. D’un côté se trouve le cornadis avec à son pied une marche de 45 cm de large (où sont fixés les abreuvoirs), suivie d’une large aire bétonnée raclée de 3,90 m de large. Cette aire d’exercice dessert des logettes larges de 1,30 m par 2,40 m de long. Ainsi couchées, les vaches ont leurs petits veaux sous les yeux parqués dans des cases de 1,80 m de largeur. Ces cases à veaux sur litière accumulée sont entièrement démontables pour le curage. Elles sont aménagées avec des barrières et des râteliers de type ovin. 

Les deux rangées de cornadis sont desservies par deux larges couloirs de service. L’un d’eux dessert également une rangée de dix cases à taureaux. 

Le sol des cases à vaches est entièrement bétonné. Les frères Nugues ont aussi choisi ce système pour ne pas avoir de grandes marches au sol. Celle des logettes n’est haute que de 20 cm.

Les deux larges couloirs séparant les logettes aux cornadis sont raclés une fois par jour par un rabot mécanisé. « Nous paillons les logettes pour un meilleur confort du couchage des vaches et pour que les effluents soient moins liquides », fait remarquer Sébastien. Les logettes concentrent les effluents sur l’aire raclée. Les deux racleurs poussent le fumier vers une vaste fumière couverte et fermée au bout du bâtiment. 

Environ 2 kg de paille par vache et par jour

Ce bâtiment accueille les mères lorsque leurs petits veaux atteignent une quinzaine de jours d’âge. « Ils commencent à être bien dégourdis », confie Mathieu Nugues qui précise qu’à cet âge-là, les veaux risquent moins de glisser sur le béton et la paille améliore leur aisance. Pour rejoindre leurs mères et téter, les veaux doivent en effet passer à travers les logettes, chose qu’ils accomplissent sans difficulté, rapportent les éleveurs.

Sous cette stabulation à logettes et aire raclée, la consommation de paille se rapproche de celle d’une étable entravée (de l’ordre de 2 kg par vache et par jour), fait valoir Sébastien. Les associés sont satisfaits de ce système. Les bêtes y sont calmes. Couchées dans leurs logettes, les vaches ont leurs veaux devant elles, observent-ils. La propreté est au rendez-vous avec « des charolaises qui restent blanches », apprécient Mathieu et Sébastien. Relativement compact en comparaison d’une stabulation avec une vaste aire paillée, ce bâtiment est aussi confortable pour les hommes avec un sol en dur, sans haute marche ni grandes distances à traverser.

« On l’emploie beaucoup tout au long de l’année », confie Sébastien. C’est en effet là que sont logées les vaches destinées à l’engraissement en septembre par exemple.

Problème pour les chaleurs et les taureaux…

Au chapitre des inconvénients, les frères signalent qu’il arrive que quelques vaches (environ 5 %, évaluent-ils) refusent de monter sur les logettes. Certaines, rares, peuvent tenter de faire demi-tour pour ressortir. Enfin, quelques bouses sont parfois déposées sur le béton de la logette. Le seul véritable bémol que pointe Mathieu, c’est pour la mise à la reproduction. La détection des chaleurs est en effet plus délicate, voire dangereuse, avec des vaches qui cavalent sur un sol en béton. « Et on ne peut pas mettre de taureaux avec les vaches dans ces conditions », regrette l’éleveur. C’est d’ailleurs ce seul inconvénient qui a conduit les associés à renoncer aux logettes pour leur dernier bâtiment en date (lire encadré). 

Enfin, le coût d’un tel aménagement est relativement élevé : 213.000 € il y a dix ans pour 64 vaches et dix taureaux, fumière couverte incluse. Le prix du racleur était alors d’environ 13.700 €, informent les deux éleveurs. 

Fumière couverte et fermée
La fumière couverte qui reçoit le fumier des racleurs est fermée par une porte rideau motorisée de 10 m de large.

Fumière couverte et fermée

Une imposante fumière couverte recueille le fumier poussé par les deux racleurs mécaniques de la stabulation à logettes. Implantée entre deux bâtiments de l’exploitation, elle est fermée sur ses quatre côtés. Le mur du fond présente une large ouverture sur la partie haute qui assure la ventilation de la fumière. L’accès est obturé par une immense porte rideau motorisée et télécommandée de 10 m de largeur. Une dimension qui facilite les manœuvres pour la manipulation et l’enlèvement du fumier. Car le fumier déposé par les rabots doit être déplacé tous les trois jours pour ne pas gêner le fonctionnement du racleur, signale Sébastien Nugues. Recommandée par le GDS, cette porte permet de séparer la zone de stockage des effluents du reste des bâtiments. Une précaution sanitaire qui préserve des odeurs, fait valoir l’éleveur. 

Une aire paillée avec couloir raclé pour la mise aux taureaux

Une aire paillée avec couloir raclé pour la mise aux taureaux

Pour pouvoir introduire des taureaux dans les cases pour la reproduction des vaches en fin d’hiver, le Gaec Nugues a opté pour une troisième stabulation avec une aire paillée sur un couloir raclé au tracteur. D’une largeur de 3 m, la partie bétonnée précède une zone en terre battue de 12 m de profondeur. Une stalle surélevée et bétonnée de 2 m sépare le couloir raclé du cornadis. Les vaches y sont maintenues bloquées pendant le curage réalisé au tracteur. Les cases sont prévues pour 24 ou 25 vaches à veaux plus un taureau. 

Le curage au tracteur est réalisé tous les dix jours. Il faut compter deux heures pour charger le fumier frais déposé sur la partie bétonnée et l’exporter à l’aide d’une remorque vers une fumière. Plus économe en paille qu’une litière accumulée intégrale, ce bâtiment consomme tout de même plus du double (5-6 kg de paille par vache et par jour) que l’équipement à logettes, confie Mathieu. Moins cher en investissement (195.000 €), ce type de bâtiment implique moins de béton, moins de tubulaires, mais comme il privilégie plus d’espace pour les animaux, il demande plus de mètres carrés de toiture. 

Filets brise-vents amovibles et bandeaux de lumière
Sur le long pan, un rideau amovible apporte de la clarté et permet d’augmenter la ventilation par un grand bol d’air frais en fin d’hiver. En position ouverte, il laisse sortir la poussière pendant le paillage.

Filets brise-vents amovibles et bandeaux de lumière

Dans leurs deux bâtiments les plus récents, les associés du Gaec Nugues ont soigné les éléments d’ambiance. Sur les longs pans orientés sud-est, les deux stabulations sont équipées de filets brise-vent amovibles. Ils permettent d’ouvrir la partie supérieure de la paroi latérale du bâtiment. Le filet descend le long du mur créant ainsi une entrée d’air juste sous le toit. Le mouvement de ces rideaux est actionné manuellement par une manivelle dans la première stabulation et à l’aide d’une télécommande électrique dans la seconde. « Ce rideau apporte de la clarté et il permet d’augmenter la ventilation par un grand bol d’air frais, en particulier en fin d’hiver. On le baisse aussi à chaque fois qu’on paille. Cela permet de faire sortir la poussière », confie Sébastien. Pour optimiser la clarté de leurs bâtiments, les associés ont prévu des « bandeaux de lumière » (panneaux translucides en polycarbonate) au niveau des pignons. Avec les filets brise-vents, le bandeau de lumière se prolonge sans interruption sur trois des quatre côtés de la stabulation conférant une grande luminosité à l’intérieur. Le filet de la première stabulation est revenu à 3.800 € ; celui du dernier bâtiment en date, télécommandé, a coûté 8.000 €, complètent Sébastien et Mathieu.