Centre de sélection de Béchanne
Projet de fusion avec les couvoirs de Bresse réunis

Margaux Legras-Maillet
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Le centre de Sélection de Béchanne et les Couvoirs de Bresse réunis ont tenu leur assemblée générale le 26 juin dernier à la Maison des Pays de l’Ain à Saint-Étienne-du-Bois. Un moment décisif pour l’avenir des deux structures.

Projet de fusion avec les couvoirs de Bresse réunis
Gilbert Limandas, président-gérant du Centre de sélection de Béchanne dont les Couvoirs de Bresse réunis sont la filiale. Photo/MLM 

Depuis plusieurs mois, les choses bougent à Béchanne. Édouard Jannot, ancien directeur de la FDSEA, a tout d’abord pris la succession de Florence Petijean à la direction du centre de sélection mi-février. La plupart des bâtiments du site sont aussi en cours de rénovation ou le seront à l’horizon 2024 (voir encadré). L’année dernière, le Centre de sélection comme les Couvoirs de Bresse réunis ont également subi de plein fouet l’inflation. Le poste alimentation représente à lui tout seul plus d’un quart des charges du site pour un coût en hausse de plus de 60 % entre 2020 et 2022. Quant à l’énergie, le prix de l’électricité et du gaz était assez stable en 2022 et affichait même une légère baisse en raison d’une diminution de la consommation, mais une recrudescence est à prévoir pour l’année 2023. De manière générale, les charges entre 2021 et 2022 ont augmenté de plus de 100.000 €. Cette conjoncture a enfin été compliquée par les nombreux mouvements de personnels l’année dernière. En février, la moitié des effectifs avait moins d’un an d’ancienneté.

Le site peut toutefois se targuer d’une santé financière plutôt saine et à l’équilibre, grâce à des produits d’exploitation également en hausse et qui compensent l’élévation des charges. Que ce soit pour le centre de sélection ou de sa filiale, les résultats d’exercices sont positifs.

 

L’appui des acteurs de la filière sollicité

 

Le site veut néanmoins repenser « l’ensemble de son fonctionnement et de son activité afin de lui donner des perspectives de développement », outre le projet de rénovation de bâtiments (voir encadré), souligne Gilbert Limandas dans son rapport de gérance. En effet, spécialisé dans l’amélioration de semences souches, en particulier de « Bresse », le Centre de sélection se heurte à une certaine atonie de la filière volaille de Bresse dont le chiffre d’affaires dépend pourtant majoritairement. « Aujourd’hui, notre équilibre économique dépend fortement de la commercialisation de la volaille de Bresse. Nous devons à la fois anticiper cette baisse et trouver d’autres ressources financières », ajoute Gilbert Limandas.

Aussi, Béchanne souhaiterait impliquer l’ensemble de la filière avicole afin de l’aider à financer ses investissements, : des éleveurs, aux organismes de recherche et d’accompagnement, en passant par les abatteurs et des collectivités locales. Et Gilbert Limandas de marteler : « Nous pensons qu’une action engagée de la filière pourra sinon stabiliser, au moins inverser la vapeur ».

 

Quelques projets de développement

 

Plusieurs pistes de développement commercial sont aujourd’hui envisagées, afin d’augmenter mais aussi de diversifier les ressources du site. Tout d’abord, la valorisation de l’ensemble des volailles produites, de tri comme de réforme. « Nous avons démarré avec l’élevage de 900 coqs que nous commercialiserons d’ici à quelques semaines », confie Gilbert Limandas.

Le site cherche également des solutions pour valoriser les œufs produits. Pas moins de 860.000 œufs sont produits chaque année à Béchanne. La commercialisation des œufs destinés actuellement à la casserie nécessiterait la création d’un centre de conditionnement et l’achat d’une calibreuse-mireuse-tamponneuse. Des investissements somme toute assez modiques, la plupart des locaux étant déjà adaptés à la réalisation de ce projet.

Une modification de la gestion et de l’entretien est également étudiée pour réduire la consommation d’énergie du site. De même que l’installation de panneaux photovoltaïques sur les toits des bâtiments.

 

Pour une entrée au capital de l’ensemble de la filière

 

Afin d’amener de la simplification dans la gestion de l’entreprise et limiter quelques charges, « nous avons également travaillé à la fusion du Centre de sélection et des Couvoirs de Bresse réunis », poursuit Gilbert Limandas. Un changement décisif s’il a lieu puisqu’il doit coïncider, selon les plans de la gérance du site, avec une entrée au capital des acteurs de la filière.

Or, si les projets de développement ont généralement convaincu l’ensemble, l’appui de certains acteurs n’est pas sans conditions. Julien Ducros, des abattoirs LDC (seul abattoir industriel du territoire), a ainsi sollicité la réalisation d’une étude technico-économique « afin de crédibiliser la demande de participation (du centre de sélection, N.D.L.R.) à la recapitalisation », a précisé Gilbert Limandas.

Autre condition, la création d’un collège « abatteurs » dans le cadre d’une éventuelle entrée au capital. Dans le projet de fusion, trois autres collèges seraient également constitués. Le premier regrouperait les chambres consulaires (la Chambre du commerce et de l’industrie (CCI) Métropole de Bourgogne, la Chambre d’agriculture de l’Ain, la CCI de l’Ain et la Chambre d’agriculture de Saône-et-Loire). Un deuxième collège serait quant à lui constitué d’entités représentant les intérêts des producteurs de volailles utilisateurs de la génétique du Centre de sélection de Béchanne (Comité interprofessionnel de la volaille de Bresse (CIVB), le Groupement des éleveurs de la Volaille de Bresse (GEVB) et les FDSEA de l’Ain et de Saône-et-Loire). Enfin, un dernier collège serait formé d’acteurs autres que personnes physiques ayant un intérêt dans les activités de la filière issues du Centre de sélection (société d’assurance mutuelle La Bressane, Groupama Rhône-Alpes Auvergne, Itavi, Oxyane et CAVS).

 

Un positionnement timide des abatteurs

 

Pour ce qui est de l’étude demandée, « elle a été réalisée par la Chambre d’agriculture et l’objectif était de pouvoir apporter une réalité sur le fonctionnement de notre structure consolidée (des comptes des deux structures, N.D.L.R.) et d’anticiper un prévisionnel selon deux hypothèses d’évolution de la commercialisation du Bresse : une stabilisation et une baisse des effectifs à 700.000 poussins, explique Gilbert Limandas avant de préciser : Nous avons fait le choix de ne pas étudier d’hypothèse plus pessimiste qui selon nous serait une capitulation face à cette situation décroissante. »

Plusieurs paramètres ont par ailleurs été pris en compte : une baisse du prix de l’alimentation en 2023 et 2024 pour arriver au niveau de 2021 ; l’augmentation du prix du poussin de 3 % par an ; l’augmentation 50 % des charges d’électricité en 2023 ; l’augmentation du coût des assurances de 10 % en 2023 puis de 3 % les autres années ; la construction de bâtiments neufs qui devrait mener vers une baisse des charges d’entretien et l’amélioration de l’indice de consommation ; et enfin la stabilisation masse salariale.

La plupart des structures et/ou personnes morales sollicitées pour devenir actionnaires du site ont déjà donné leur accord oral. Le changement de statut en SAS a même été adopté le jour de l’assemblée générale des deux structures. En revanche, plusieurs abatteurs ne semblent pas encore vouloir se positionner. Dans le sillage de LDC, le syndicat des expéditeurs de Volailles de Bresse, dont Valéry Miéral est le président, a également affiché son refus d’entrer pour l’instant au capital. Le syndicat explique ce choix dans un courrier envoyé à Béchanne, en se référant notamment à l’étude réalisée par la chambre d’agriculture qu’il ne juge pas assez réaliste. Selon le syndicat, elle ne prendrait pas en compte la baisse moyenne des volumes connus depuis cinq ans. D’autres arguments ont été mis en avant, comme « l’exigence de différenciation du prix du poussin entre le festif et le reste de l’année », précise Gilbert Limandas. Une grande déception pour le gérant de Béchanne, mais pour lui, il n’est désormais plus question d’attendre les retardataires.

Rénovation des bâtiments : « le projet avance bien »  

Le projet de rénovation comporte la construction de quatre nouveaux bâtiments : un bâtiment de multiplication, deux poussinières et un bâtiment d’entretien et de lavage, ainsi que la démolition des bâtiments les plus anciens.

Gilbert Limandas s’est montré optimiste à ce sujet : « Le bâtiment de lavage et d’entretien est en cours de construction et les poulaillers seront construits avant juin 2024. La plupart des devis ont été validés et le permis de construire va être déposé dans les prochains jours. » Le président a également admis « chercher à optimiser les accompagnements financiers », certains achats n’ayant pas été éligibles au plan de Relance. Quant aux travaux de terrassement et de maçonnerie, ils n’ont pas été inclus dans le projet et la gérance recherche activement des possibilités de subventions pour soulager la capacité d’autofinancement.

Le coût total de l’investissement s’élève à plus de 1,8 million d’euros dont 264.000 € en autofinancement. Le plan de Relance devrait permettre de financer un peu moins de la moitié du projet et un prêt d’un million d’euros le restant.

Le site de Béchanne en chiffres

2 structures actuellement : le centre de sélection et les couvoirs de Bresse réunis ;

2 métiers : la sélection et la multiplication ;

15 races de poules anciennes en propriété ou en conservation ;

3 bâtiments de sélection : 2 300 m² ;

7 poussinières dont 2 spécifiques à la volaille de Bresse : 3 500 m² ;

3 bâtiments de multiplication spécifique Bresse : 2 200 m² ;

1 couvoir ;

1 hangar de stockage ;

1 bâtiment technique en construction.