Réguler les prédateurs
Une condition nécessaire du bien-être agricole

Avec plus de 800 000 sangliers prélevés annuellement et près de 12 000 animaux domestiques prédatés annuellement par le loup, l’ours, le lynx et le vautour, la situation est particulièrement problématique pour l’activité agricole. Au-delà des pertes économiques considérables, les agriculteurs sont confrontés à une véritable usure psychologique.

Une condition nécessaire du bien-être agricole

L’absence de solution de régulation efficace et d’indemnisation réelle du préjudice subi inquiète au plus haut point. Face à l’activisme des organisations de protection de la nature, il devient urgent que les pouvoirs publics se positionnent clairement en faveur d’une régulation des espèces qui nuisent au développement des activités agricoles.

Quelle réponse apportez-vous aux agriculteurs qui subissent les attaques d’espèces protégées sans capacité de pouvoir se défendre efficacement et sans réparation du préjudice subi ?

Loïc Scalabrino* : Les FDSEA et JA départementaux sont aux côtés des agriculteurs pour les aider économiquement et les soutenir psychologiquement. Nous agissons collectivement avec nos associations spécialisées pour obtenir des mesures de régulation et une juste indemnisation des dégâts causés aux agriculteurs.

Cédric Tranquard* : Nous avons aussi travaillé d’arrache-pied pour que les pertes indirectes soient réellement prises en compte. Le gouvernement doit réviser ses processus d’indemnisation et débloquer une enveloppe financière suffisante. L’État doit assumer un véritable soutien moral à la profession : les travaux de la MSA sont très clairs sur les risques psychologiques que génère la prédation.

Comment FNSEA et JA interpellent les pouvoirs publics sur la détresse des éleveurs prédatés ?

Bernard Mogenet* : On a des positions très fermes et on confronte l’État à la réalité en invitant ses représentants sur le terrain. On fait constamment pression pour qu’ils assouplissent le système et ne flanchent pas devant les ONG environnementalistes qui attaquent en justice leurs décisions.

Face aux aspirations écologiques de la société, quelle réponse apporte l’élevage extensif ?

L.S. : On entend souvent des raccourcis grossiers tels que « protéger les prédateurs égale protéger la biodiversité ». Par l’entretien des paysages, l’élevage favorise le stockage du carbone, limite les risques d’avalanche et d’incendie. Sa disparition entraînerait un ensauvagement des territoires, la fin de l’économie rurale et appauvrirait terriblement la biodiversité.

B.M. : On encourage l’élevage en plein air au titre du bien-être animal, mais on traumatise les troupeaux en leur imposant la prédation. Et sur ce plan-là les animalistes sont étrangement silencieux. Résultat, on rentre les bêtes faute de solution pour les protéger, on perd en productivité et en qualité. Quelle incohérence !

(*) Loïc Scalabrino est secrétaire général adjoint de Jeunes Agriculteurs. Cédric Tranquard est membre du Bureau de la FNSEA. Bernard Mogenet est président de la FDSEA des Savoie.

JA et FNSEA de la Drôme : « Ça ne peut plus durer ». Le ras-le-bol des éleveurs drômois face à la prédation

Institutionnels, parlementaires et agriculteurs se sont réunis lundi 16 septembre dans une exploitation de Saint-Nazaire-le-Désert, dans le département de la Drôme. L’occasion pour Alexis Beynet, jeune agriculteur de 23 ans, éleveur d’ovins, d’exposer avec beaucoup de dignité les conséquences qui impactent sa famille depuis des années à cause du loup. “Depuis 2010, nous avons perdu 575 brebis. C’est l’équivalent d’un troupeau entier puisque j’ai actuellement 600 animaux” a expliqué le jeune éleveur qui venait d’apprendre le matin même qu’une attaque était survenue la nuit passée. “Ce n’est pas pour cela que j’ai choisi d’être agriculteur, mon métier ne consiste pas à ramasser des bêtes dévorées”. Théâtral et authentique, il a pris son téléphone et simulé ce qui constitue son quotidien frôlant parfois l’absurdité : contacter le département, signaler une prédation, répondre à de multiples questions, demander une indemnisation ; puis raccrocher pour remplir des formulaires où il doit indiquer les mêmes informations. En entendant Alexis, chacun pouvait réaliser l’ampleur des tâches à gérer simultanément : aller rechercher une brebis perdue, à condition que le vautour n’ait pas été plus rapide, tout en assurant le remplacement du berger, sans omettre de parquer ou rentrer les lots d’animaux. Les attaques ne cessant de se multiplier, elles ont généré un stress très important dans la profession. La pression de prédation oblige une présence à plein temps, et les quelques temps de vacances loin de la ferme risquent souvent d’être compromis par l’annonce d’une prédation et la nécessité de réagir sur le terrain.