Maïs
Une année record et des inquiétudes

Cédric MICHELIN
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L’Association générale des producteurs de maïs (AGPM) a tenu son assemblée générale au Parc des expositions de Tours les 9 et 10 novembre. La conjoncture favorable n’occulte pas les nombreux défis auxquels la filière maïs est confrontée.

Une année record et des inquiétudes

Le président de l’Association générale des producteurs de maïs (AGPM), Daniel Peyraube, a rapporté une récente conversation avec un vieil agriculteur. Ce dernier lui a dit que tout au long de sa carrière, il n’avait « jamais connu une période avec des rendements aussi élevés et des prix aussi hauts ». En effet, la moyenne nationale pour la récolte 2021 devrait s’établir à environ 110 quintaux/ha et les cours atteignent environ 250 €/tonne, en augmentation de près de 50 % depuis un an. Une telle conjoncture devrait par conséquent réjouir les producteurs de maïs qui, en 2020, avaient traversé une période difficile.

Rythme et délais

Cependant, certains maïsiculteurs se plaignent d’une mauvaise répartition de la valeur ajoutée au sein de la filière, notamment au bénéfice des entreprises de l’aval et au détriment des producteurs. « Nous travaillons à mieux structurer les choses », a tenté de rassurer le président de l’AGPM. Les maïsiculteurs s’inquiètent surtout de la future Pac qui pourrait remettre en cause une partie de la production française de maïs. Les 500 congressistes présents ont d’ailleurs écouté de manière stoïque Pierre Bascou, directeur durabilité et aide au revenu à la direction de l’Agriculture de la Commission européenne, qui a présenté les principaux objectifs du Pacte Vert (Green Deal) et de la future Pac. « On a limité les dégâts. Il faut voir d’où l’on partait avec les -15 % de budget présentés en 2018 par le commissaire Phil Hogan », a affirmé Christiane Lambert présidente de la FNSEA. Mais la rotation est bien inscrite et la diversité des assolements est reconnue, a précisé Franck Laborde, secrétaire général de l’AGPM. D’une manière globale, les producteurs de maïs qui nourrissent des inquiétudes sur l’article 83 de la loi ÉGAlim sont d’accord sur le principe d’un verdissement, encore faut-il savoir la manière dont il sera traduit dans le Plan stratégique national (PSN) et comment la Pac et ce PSN s’articuleront avec le Varenne de l’eau.

Être compétitifs

Intervenant à distance, le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, a certifié que les spécificités du maïs étaient inscrites dans le PSN et que lors de la présidence française de l’Union européenne (du 1er janvier au 30 juin 2022), il défendrait « la réciprocité des normes. J’en fais une priorité », a-t-il déclaré. Sur ce dernier point, les maïsiculteurs s’agacent des distorsions de concurrence sur les charges environnementales, ainsi que sur « l’accès aux molécules et à la génétique », a souligné Jean-Marc Schwartz, secrétaire général adjoint de l’AGPM. Le président de l’UFS, Claude Tabel, lui a fait écho en appelant de ses vœux que « ni la France ni l’Europe ne ratent le virage des NBT (New breeding technologies, N.D.L.R.) comme elles avaient raté celui des OGM de première génération ». Ce que souhaitent aussi les producteurs de maïs, « c’est augmenter leur production et être compétitifs », a mentionné Jean-François Loiseau président d’Intercéréales. Compétitifs, comme ils le sont dans la filière semence et pour faire en sorte que l’Europe « ne reste pas la première région importatrice de maïs au monde », a rappelé Anne-Claire Vial, présidente d’Arvalis. En effet, bon an mal, le vieux continent importe 17 millions de tonnes de maïs « avec un récent pic à 24 Mt », a-t-elle précisé.

Une filière semence dynamique mais…. 

La France est le premier exportateur mondial de semences et contribue à hauteur d’un milliard d’euros à l’excédent de la balance commerciale. Mais comme de nombreuses productions, elle fait face à la flambée des prix, qui grève le budget des exploitations. Cette année, la récolte des semences sur près de 90.000 ha (89.581 ha exactement) a pris du retard. Seules 55 % des surfaces avaient été battues. « Il faut s’attendre à une baisse d’environ 7 % » de la production totale de semences maïs, a indiqué Daniel Peyraube. Même si le résultat technique est meilleur cette année (95 %) que l’an dernier (86 %), les producteurs de semences souhaiteraient qu’on leur redonne une part de la valeur ajoutée qu’ils créent et qui part, un peu trop à leur goût, dans les usines d’aval. 

L’impact négatif de l’article 83 de la loi ÉGAlim

Selon une enquête de l’Union française des semenciers, « plus d’un tiers des entreprises semencières envisagent une répercussion de 20 à 30 % sur le chiffre d’affaires », soit une perte de globale de 330 millions d’euros à l’échelle française, si l’article 83 de la loi ÉGAlim est appliqué en l’état. En effet, cet article interdit à compter du 1er janvier 2022, « la production, le stockage et la circulation de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées (…) ». La moitié des usines de production de semences ont prévu de délocaliser leur activité. À terme, on « met en péril notre filière semencière », se sont inquiétés les dirigeants de l’UFS et de la Fédération nationale de la production des semences de maïs et de sorgho (FNPSMS). Le décret d’application n’est pas encore sorti. Les organisations professionnelles font pression sur le gouvernement pour rectifier le tir.