Fertilité des sols
Bientôt un groupe Gaïa dans l’Autunois

Marc Labille
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Préoccupé par le changement climatique et ses effets sur les prairies, le GIEE de l’Autunois souhaite créer un groupe de travail innovant autour de la santé des sols. 

Bientôt un groupe Gaïa dans l’Autunois
Pédologue à la chambre régionale d’agriculture, Christian Barnéoud préconise une méthodologie ultra-rapide d’observation de mini-profils de sols effectués à l’aide d’un chargeur frontal.

Le 26 octobre dernier, les agriculteurs de l’Autunois-Morvan avaient rendez-vous à Monthelon pour le projet de création d’un groupe Gaïa : Groupe d’Aagriculteurs pour innover en agronomie (1). Ce projet a germé au sein du GIEE (Groupement d’intérêt économique et environnemental) de l’Autunois dont plusieurs adhérents, préoccupés par l’impact du changement climatique sur leur système prairial, explorent déjà les questions d’agronomie et de vie du sol. « Le groupe Gaïa est une suite à notre travail sur l’observation des sols et nos réunions bout de champs », introduisait Michel Joly, agriculteur à Monthelon et responsable du groupe agronomie au sein du GIEE. Des techniques de cultures alternatives telles que le strip-till et le semis direct ont déjà été expérimentées par le GIEE.

« J’apprends à lire mon sol… »

Déjà habitués aux projets collectifs, les agriculteurs de l’Autunois s’apprêtent à se lancer dans une démarche originale d’approche des sols dont ils souhaitent mieux maîtriser la fertilité. Proposée par la chambre d’agriculture, il s’agit d’une méthode adaptée aux agriculteurs, de sorte qu’ils puissent aborder la vie de leurs sols en toute autonomie, présentait Agathe Dangel, conseillère grandes cultures à la Chambre de Saône-et-Loire. Christian Barnéoud, pédologue à la Chambre régionale est venu exposer les principes des groupes Gaïa qu’il accompagne en Bourgogne Franche-Comté depuis plusieurs années.

Bâtis sur le volontariat, ces collectifs proposent, dans un esprit "club", des méthodes simples d’étude des sols, à mettre en œuvre sur le terrain. « J’apprends à lire mon sol. J’apprends à en parler. Cela me permet d’établir un diagnostic et donc de refaire de l’agronomie », présente Christian Barnéoud.

Un diagnostic « ultra-rapide »

La méthodologie repose sur des mini-profils de sols effectués dans les parcelles étudiées. Pour permettre un diagnostic « ultra-rapide », le pédologue préconise l’usage d’un chargeur frontal équipé d’une fourche à palettes. Plantées dans le sol, les lames d’acier extraient en quelques secondes un bloc de sol « en 3D » d’une quarantaine de centimètres de profondeur. L’observation du profil est complétée par une analyse de fertilité biologique assez poussée (laboratoire Celesta-Lab). « Avec ce type d’analyse, on va plus loin que le simple rapport C/N (carbone/azote). Tout ce qui touche à la matière organique est pris en compte pour un état des lieux complet comprenant le passé du sol (ce qu’on lui a fait) ; ce qu’il nous lègue à travers son carbone microbien ; et l’avenir avec son potentiel », explique Christian Barnéoud. Cette étude de la vie du sol débouche sur les éventuelles corrections agronomiques à lui apporter, poursuit le pédologue qui parle d’un processus de réparation d’une durée d’au moins cinq ans.

Des rendez-vous sur le terrain

Les modalités du futur groupe Gaïa de l’Autunois sont encore à définir avec les intéressés. S’appuyant sur son expérience, Christian Barnéoud parlait d’une durée de trois ans et une huitaine de journées de terrain par an. Les futures actions seraient animées par lui-même et les conseillers de la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire. Le programme peut s’enrichir au gré des « envies des agriculteurs », font valoir les intéressés qui évoquent aussi formations, voyages d’étude, essais aux champs…

Un financement devrait être trouvé pour accompagner la démarche. Les premiers groupes Gaïa étaient soutenus par la Région. Bien que ce soutien ne soit plus d’actualité, les intéressés ont bon espoir qu’une autre formule de financement prenne le relais. « Le futur groupe est ouvert à tout agriculteur intéressé », concluaient les intervenants.

(1) Gaïa, nom de la déesse personnifiant la Terre dans la mythologie grecque.

Des mini-profils de sol riches en enseignements !

Des mini-profils de sol riches en enseignements !

Pour ce premier contact en vue de la constitution d’un groupe Gaïa en Autunois, le pédologue Christian Barnéoud a procédé à une démonstration dans des parcelles de l’exploitation du Gaec Joly à Monthelon. Dans du blé et de la prairie temporaire, l’expert a commenté deux « mini-profils de sol » réalisés au chargeur frontal. Avec cette méthode simple et rapide, « il s’agit de porter le regard entre 0 et 40 cm de profondeur, au niveau de la zone de transition constitué de cet horizon à responsabilité (0 – 25 cm) qui surmonte une couche plus profonde correspondant à l’offre du sol », décrivait-il. « Plus la limite entre ces deux horizons est progressive, plus c’est favorable. Plus cette limite est nette et continue, plus il y a de contraintes et de problèmes ». Outre ce critère visuel très révélateur, le pédologue appréhendait aussi la porosité de la terre ainsi que la friabilité des mottes. Ces trois paramètres simples donnent un bon aperçu de l’état d’un sol et permettent d’ores et déjà d’imaginer les réparations possibles (outils mécaniques, implantation de couverts, etc.), expliquait l’expert. Dans un système prairial, cette observation permet de « voir comment le système racinaire peut descendre », complétait-il.