Démarche C’est qui le patron ?!
Changer de point de vue

Françoise Thomas
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La démarche C’est qui le patron ?! est l’une des nombreuses filières de valorisation proposées aux éleveurs coopérateurs de Sicarev Coop. Pour l’heure, en viande bovine, seul le steak haché est disponible à la vente mais il part d’une démarche bien particulière, amenée à encore évoluer, répondant aux attentes des consommateurs et aux besoins des éleveurs. Rencontre avec l’un d’eux et avec François Chaintron, directeur délégué de la section Charolais Horizon et directeur promotion des filières du groupe Sicarev.

Changer de point de vue

Si on lui demandait de passer l’ensemble de ces bêtes en C’est qui le patron ?!, Benoît Pingeot n’hésiterait pas une minute. « Cela répond aux attentes des consommateurs et offre des plus-values garanties pour nos exploitations », met en avant le jeune éleveur. Jusqu’à présent, six de ses vaches ont été fléchées en C’est qui le patron ?! en 2020, sept l’avaient été en 2019.
Benoît Pingeot, en Gaec avec ses parents et son frère du côté de Saint-Martin-du-Tarte, comptabilise 160 vêlages par an. La SAU de 345 ha comprend 175 ha de céréales, en partie autoconsommées, plus quatre hectares de vigne.

Jusqu’à 70 % en steak haché

Avant C’est qui le patron ?!, le Gaec entrait déjà dans plusieurs cahiers des charges dont le label Rouge, l’IGP Charolais de Bourgogne, Casino primeur, etc. « Puisque nous adhérions déjà à la Charte des bonnes pratiques, nous n’avons rien dû modifier de particulier pour correspondre au cahier des charges de cette marque », se rappelle Benoît Pingeot. « Avec 25 centimes de plus par kilo, la valorisation C’est qui le patron ?! est actuellement l’une des plus élevées. Au final, la plus-value sur chaque bête n’est pas négligeable », précise-t-il encore. Et c’est bien l’addition de ces différentes valorisations qui va permettre cette année une plus-value totale de plusieurs milliers d’euros au Gaec… 
Si la plupart du temps, 20 % d’une bête est transformée en steak haché, cette démarche-là, basée sur du 100 % muscle et sur sa texture, en valorise jusqu’à 70 %. « Je sais que ce n’est pas dans les habitudes de transformer une charolaise en steak haché, mais si c’est que veulent les consommateurs pourquoi pas ! », souligne le jeune éleveur.

Admettre 15 € le kilo

Et c’est bien là tout l’enjeu du moment : passer outre les a priori, faire évoluer les points de vue et répondre aux attentes du marché.
« Cette marque reste une niche mais elle traduit bien que le marché du steak haché est en pleine évolution, intervient François Chaintron. De la même façon qu’il faut repositionner le vrai prix de la viande, nous devons repositionner le vrai prix du steak haché et faire comprendre aux consommateurs que pour avoir un produit de qualité il ne faut pas payer 10 € le kg mais plutôt 15 € le kg ». L’idée étant bien là de faire un produit de qualité, correspondant au prix que le client est prêt à y mettre, tout en rémunérant l’éleveur.
À l’instar des produits laitiers, le directeur promotion des filières revendique une montée en gamme et une segmentation de ce produit « car c’est finalement un produit beaucoup plus technique que l’on pense ».

Les autres pièces aussi…

Il faut dire que le steak haché C’est qui le patron ?! n’a rien à voir avec les produits secs et striés que l’on rencontre souvent. À 12 % de matière grasse et avec un hachage « façon bouchère », il apporte la garantie d’un moelleux et d’une texture.
« Les confinements ont fait exploser le marché du steak haché, détaille François Chaintron, en revanche la valorisation des autres pièces se dégradent ». D’où de nouvelles réflexions en cours…
Si une nouvelle enquête consommateur devrait prochainement être lancée (voir encadré), il se pourrait aussi que l’on puisse également bientôt trouver « d’autres produits », esquisse François Chaintron.
La marque C’est qui le patron ?! avait été précurseur sur une nouvelle approche des rapports qualité/ prix sur différents produits, le confinement aura de son côté accéléré une certaine prise de conscience sur la recherche de qualité des produits.

Toute la filière

Depuis le lancement du produit, Sicarev abat environ 500 bovins par an dans le cadre de cette marque.
Collecteur, abatteur, transformateur, le groupe coopérateur est le seul à utiliser la marque C’est qui le patron ?! pour les steaks hachés.
 « Il fallait des outils de capacité importante, nous avions déjà l’abattoir et l’atelier de découpe industriels de Roanne, rappelle François Chaintron. Le rachat de la société Convivial à Vichy nous a apporté l’usine de steak haché surgelé ». Pour le stockage et la congélation, le groupe s’est depuis impliqué dans le centre logistique frigorifique TVE à Lapalisse.
Au final, tout est traité dans un rayon d’une centaine de kilomètres avant que les produits finaux ne soient expédiés partout en France.

Prendre les produits à la racine

Prendre les produits à la racine

La demande des consommateurs évolue et il faut en prendre conscience et l’accompagner. En cela, la démarche C’est qui le patron ?! a été précurseur en remettant les attentes de certains clients au cœur de la réflexion tout en se basant sur une rémunération correcte et garantie aux éleveurs. Le lait C’est qui le patron ?! a ainsi représenté une petite révolution dans l’approche commerciale lorsqu’il est sorti il y a cinq ans maintenant. Les producteurs laitiers adhérents de la démarche ont connu là une véritable bouffée d’oxygène en étant enfin rémunérés selon leur coût de production. Depuis, ce modèle a été plusieurs fois repris.
Forte de ce premier succès, la marque C’est qui le patron ?! a récidivé sur plusieurs autres produits : pommes de terre, yaourts, vin, sardines, chocolat, œufs, etc.
Le produit qui nous intéresse se décline actuellement en pack de quatre steaks hachés surgelés de 100 gr vendu 5,65 €.
Comme à chaque fois, le cahier des charges avait été élaboré à la suite d’une enquête consommateur. « Cela remonte à quatre ans, je pense qu’il est grand temps d’en refaire une », estime François Chaintron. Les envies peuvent en effet changer, mais c’est surtout aussi l’époque qui évolue : « je pense qu’il faudra ainsi proposer aux consommateurs s’ils souhaitent ou non du sans OGM, et intégrer aussi des questions plus poussées relatives au bien-être animal… ». La marque et la coopérative sont actuellement en pleine réflexion à ce sujet.

C’est qui la vache

C’est qui la vache

Issu de race à viande, l’animal donnant les steaks hachés C’est qui le patron ?! n’est pas désigné précisément selon son âge ou son poids. Il doit être né et avoir été élevé en France, avoir passé minimum six mois en pâturage, avoir été nourri avec des fourrages locaux (moins de 100 km). Pour le reste, la plus-value du steak haché est dans sa préparation façon bouchère, avec 100 % de muscle et 12 % de matière grasse. C’est l’ensemble de ces critères qui garantit une texture goûteuse, aérée et moelleuse.

Bientôt un nouveau créneau de valorisation

Bientôt un nouveau créneau de valorisation

Au 1er janvier prochain, le Gaec Pingeot entame sa conversion en agriculture biologique. « C’est la partie céréales qui a enclenché notre conversion au bio, explique Benoit Pingeot, notre zone ne nous permettant qu’un potentiel moyen en conventionnel ». Ainsi, le Gaec allonge progressivement ses rotations « pour passer de cinq à 11 cultures » et intégrer luzerne, pois, féverole, betterave fourragère, etc. Plusieurs semences sont d’ailleurs produites sur la ferme. Seule une petite partie est autoconsommée, le reste est donc vendu. « Le fait de se diversifier nous permet aussi de diluer les risques lorsque les cultures ne fonctionnent pas ». Depuis le printemps dernier, les éleveurs ont commencé à diminuer le nombre de vêlage. Lorsque la conversion sera terminée en 2023, « nous aurons 90 vêlages et nous ferons une quarantaine de broutards ». Les éleveurs testent aussi depuis le printemps dernier quelques croisements avec des angus...