Christophe Cordier
La qualité comme priorité absolue

Régis Gaillard
-

Loin d’être une finalité, la vente d’une bouteille de vin est la suite logique d’un long et patient travail pour Christophe Cordier. Le fruit aussi d’une philosophie qui entend mettre en avant la qualité à toutes les étapes, de la terre jusqu’à la mise en bouteille en passant par la vinification.

La qualité comme priorité absolue
Depuis toujours, c'est la recherche de l'excellence qui guide Christophe Cordier.

Alors qu’il rejoint l’exploitation familiale de six hectares en 1987 après l’obtention d’un BTA, Christophe Cordier a déjà une vision très précise de là où il souhaite aller. « Nous vendions beaucoup au négoce. Seulement un quart de notre vin était mis en bouteilles avec, pour principal débouché, les États-Unis ». Son ambition est de tout mettre et valoriser en bouteille. Débute la prospection pour trouver des clients du côté de la Belgique et des États-Unis. « J’ai la chance que mes parents, Monique et Roger, avec qui j’étais associé, m’ont fait confiance dans mes projets ».

Repéré par Robert Parker

Par ailleurs, Christophe Cordier estime que l’exploitation ne dispose pas d’assez de vignes. Commence l’acquisition de vignes sous forme de locations ou d’achats. « Il y avait aussi la volonté de diversifier les appellations. Et, surtout, de faire du vin de qualité ». L’année 1996 marque une rupture. « Nous avons changé radicalement la réception des vendanges. Nous ne foulions plus. Nous avons acheté un pressoir pneumatique. L’idée était de presser délicatement le raisin. J’ai aussi acheté beaucoup de fûts. Il faut savoir que 90 % de la production est élevée en fût. Il y a eu à cette époque une bascule qualitative ». L’arrivée du nouveau siècle est également à marquer d’une pierre blanche. En effet, le domaine est repéré par un certain Robert Parker en 2001. « Depuis, je surfe dessus. Cela m’a notamment permis d’avoir une bonne valorisation ». Un autre changement majeur a lieu en 2003 puisqu’est créé une partie négoce pour acheter du raisin. « C’était pour faire du négoce qualitatif. Je me suis très vite rendu compte des possibilités de sécuriser, par ce biais, ma production en cas d’année climatique compliquée ».

Un travail de la vigne au cordeau

Aujourd’hui, l’exploitation dispose d’une trentaine d’hectares avec trois à quatre hectares supplémentaires possibles en plantation et compte en son sein cinq salariés. Les vignes sont situées sur les communes de Fuissé, Loché, Charnay-lès-Mâcon, Leynes, Chasselas, Davayé, Vergisson, Milly-Lamartine, Montbellet, Solutré-Pouilly et Viré. « Cela permet d’avoir une large offre de vins du Mâconnais. Il n’y a que Pouilly-Vinzelles que je ne fais pas ». Pour gérer l’éparpillement des vignes, Christophe Cordier fait appel à des tâcherons dans les vignes les plus éloignées. « Dans ce cas, nous nous occupons seulement du traitement et des labours ». L’année 2020 est marquée par la conversion en bio « sans pour autant l’indiquer sur les étiquettes. C’est un atout d’être bio car cela ouvre des marchés. En plus, en bio, on trouve du personnel plus qualifié, plus motivé. Mais il faut le faire en croyant au bio, pas par opportunisme. Il y a aussi un risque important, celui d’avoir une mauvaise année. La vigne, c’est 90 % de la qualité d’un vin. Être en bio donne plus de travail. Je double mon temps de travail et, au printemps, il y a une quinzaine de personnes dans la vigne. Je préfère réaliser du bon travail quitte à rogner sur ma marge. Le travail du sol se fait avec deux chenillards pour moins tasser les sols et consommer moins de carburant. Toute intervention du sol est optimisée, réfléchie. Je réalise également 10 % de mes surfaces avec un cheval. Cela donne un super travail et cela me libère du temps car j’ai recours à une prestation de services. Cela a un réel coût : 1 € par bouteille. Mais je me fais plaisir et je n’utilise pas le cheval comme argument commercial ». Quant à l’enherbement, « je suis réservé car cela participe à créer une concurrence. Je ne retrouvais pas la qualité initiale de mes vins. Je me penche plus sur le couvert végétal permanent qui améliore la régénération des sols. C’est une idée à creuser. Par ailleurs, il faut savoir laisser les sols se reposer avant de replanter de la vigne. On peut attendre quatre à cinq ans ».

Innover pour s’améliorer

Adepte de la biodynamie, Christophe Cordier rappelle que toutes ses vendanges s’effectuent manuellement. Et il n’hésite pas à innover. « Sur une demi-douzaine d’hectares, les vignes ne sont pas rognées. C’est un test débuté en 2019. La vigne reste très fine. Il y a une meilleure ventilation et aussi une meilleure résistance aux maladies. Le tressage multiplie le temps de travail par dix mais il faut enlever le temps autrefois dédié au rognage. Cette année, nous devrions passer à dix hectares pour le tressage. Il faut le faire sur des vignes qui n’ont pas trop de vigueur. Au final, il y a un meilleur équilibre sucre-acidité dans ces vignes. Cette technique peut être un moyen de pallier le réchauffement climatique ».

Côté vinification, toutes les cuves sont thermorégulées. « Je travaille sur de petites cuves de 15-20 hectolitres pour isoler des petits lots. Tout est vinifié avec des levures naturelles. Je souhaite rentrer dans le cahier des charges Demeter. Il y a peu de SO2, une malo naturelle, un travail sans débourbage, une grosse sélection de jus. Les vendanges sont transportées en fourgons pour préserver les raisins. Il y a une fermentation en fût, surtout en fûts de 500 litres dont 30 % en fûts neufs. Tout est fait sur lie jusqu’à la mise en bouteille. Je suis assez peu interventionniste mais vigilant. J’utilise beaucoup de gros contenants comme les foudres pour garder de la fraîcheur aux vins. Le chardonnay a besoin d’espace. Je fais des élevages assez longs, de 18 à 24 mois, pour les meilleures appellations. Je privilégie les transferts par gravité. J’utilise le moins possible les pompes à vins. Mon but est de mettre le moins de SO2 possible. J’utilise des bouchons Diam à base de liège, très technologiques. Cela permet de diminuer d’un quart la dose de SO2. J’adapte la porosité du bouchon au vin ».

Commercialisation majoritairement à l’export

Pour ce qui est de la commercialisation, Christophe Cordier vend chaque année de 250.000 à 300.000 bouteilles. « Mais je ne cherche par le volume à tout prix. 70 % de mes débouchés sont à l’étranger. Je vends dans plus de vingt pays : Grande-Bretagne (mon premier marché), Australie, Japon, Chine, Taiwan, Singapour… Et finalement assez peu aux États-Unis : c’est un marché compliqué. Je vends bien, aussi, en Suède, en Norvège, au Danemark, aux Pays-Bas ou encore à Dubaï. Pendant quatre à cinq ans, j’ai beaucoup voyagé pour aller voir mes clients. La France ne représente que 30 % de mes débouchés, les particuliers 5 %. Je ne suis pas agressif commercialement. Nous fonctionnons bien sans avoir besoin de démarcher ».