Compétitivité des filières bovin lait et viande
Où en est-on ?

À l’export en productions animales, ce n’est pas tant la France qui perd du terrain mais ses concurrents qui en gagnent. Telles sont les conclusions d’une conférence des Rencontres autour des recherches sur les ruminantes (Journées 3R), organisées par l’institut de l’élevage, début décembre. 

Où en est-on ?

Le Brexit et ses conséquences commerciales outrepassent l’ensemble des controverses dont font l’objet les filières “bovins lait” et “bovins viande”, a expliqué Vincent Chatellier, chercheur à l’Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE). Selon lui, l’absence d’accord commercial déstructurait l’ensemble des filières européennes des 27 pays membres. Aucun pays ne serait alors épargné, même les plus compétitifs. Déficitaire de 1,6 milliard d’euros (Mds d’€) en 2019, le Royaume-Uni est le troisième importateur de produits laitiers français. Et si la République d’Irlande ne parvenait plus à exporter ses produits laitiers et ses carcasses de bovins viande vers le Royaume-Uni, ses denrées engorgeraient alors le marché continental français et européen. 

Fin des quotas 

Aujourd’hui, la France est d’abord un grand pays consommateur de produits laitiers (20,9 millions de tonnes par an, 310 kg par habitant) et de viande bovine (23 kg d’équivalent carcasse ; - 5 % en 25 ans). Elle consomme donc une grande partie de ses productions. Toutefois, notre pays demeure, depuis une dizaine d’années, le deuxième pays européen exportateur de produits laitiers (3,3 milliards d’euros-Md€), un montant à peu près stable. Il a été dépassé par les Pays-Bas et est talonné par l’Irlande car les éleveurs français n’ont pas profité pleinement de la fin des quotas laitiers. La contractualisation a contraint leurs velléités et la succession de crises a découragé une partie d’entre eux à produire plus de lait. En conséquence, le solde commercial de notre pays avec ses partenaires européens est passé de 1,7 Md€ en 2011 à 0,44 Md€ en 2019. Dans le même temps, il a plus que doublé avec les pays tiers (1,7 Ms d’€), avec la Chine notamment. Depuis la fin des quotas, les industriels importent des produits laitiers européens plus compétitifs que ceux produits en France. Toutefois notre pays a toujours été déficitaire en crème et en beurre. En revanche, davantage de poudre de lait, de fromages industriels (+ 600 millions d’€ entre 2011-2019) et de yaourts concurrencent les productions françaises. A contrario, les exportations françaises de fromages ont stagné.

Conquérir de nouveaux marchés

Sur les marchés de la viande bovine et des bovins vivants, ce n’est pas tant la France qui perd du terrain mais ses concurrents directs qui en gagnent, profitant des opportunités à l’export qui s’offrent à eux. Le solde commercial irlandais a toujours été supérieur à celui de la France depuis le début des années 2000. Mais il a doublé en vingt ans alors que l’excédent français plafonne autour du milliard d’euros. Entre temps, la Pologne est devenue, le deuxième pays européen exportateur de viande bovine. Les Polonais exportent la viande qu’ils ne prisent pas dans leurs assiettes. Dans le même temps, les exportations françaises stagnent depuis 2013 en volume (autour de 250.000 tonnes équivalent carcasse – téc) après avoir atteint des sommets en 2011 (près de 300.000 téc). Notre pays peine à trouver de nouveaux débouchés vers les pays tiers alors que ses ventes stagnent dans l’Union. Toutefois, notre pays importe moins de viande (environ 350.000 téc, soit - 50.000 téc entre 2019 et 2010). Autrement dit, les Français consomment proportionnellement plus de viandes françaises. Les trois premiers pays fournisseurs sont les Pays-Bas, l’Irlande et l’Allemagne. Les achats de viande en provenance de pays tiers n’excèdent pas 10 % de la totalité des importations. Sur le marché du vif, la France expédie toujours plus d’animaux : 1,45 Md€, environ + 300 millions d’euros depuis 2014. Et l’Italie, l’Espagne et l’Algérie sont ses pays clients fidèles. Mais notre pays ne compte plus les difficultés rencontrées pour conquérir durablement de nouveaux marchés.