Cours des céréales
Vers une explosion des prix et un effondrement ?

La conjoncture des marchés des céréales est fortement liée à l’issue du conflit entre l’Ukraine et la Russie, quelle qu’elle soit. Les prix des grains peuvent aussi bien exploser que s’effondrer. Par ailleurs, aucun pays exportateur majeur n’est à l’abri d’un accident climatique.

Vers une explosion des prix et un effondrement ?

Les céréaliers français sont déboussolés. Les prix des céréales très élevés et très volatils battent régulièrement des records, mais l’été prochain, qu’adviendra-t-il ? Permettront-ils de couvrir les coûts de production de leurs grains ? Selon la période au cours de laquelle les céréaliers ont acheté leurs intrants, le coût moyen de chaque tonne de blé produite sera aussi bien de 250 € dans certaines exploitations que de 350 € dans d’autres, alors qu’il était de 160 € en moyenne l’an passé, selon FranceAgriMer. Quoi qu’il en soit, l’évolution du conflit en Ukraine conditionnera la conjoncture des marchés mondiaux de céréales et de leurs échanges commerciaux au cours des prochains mois. Deux scénarios, aussi redoutables l’un que l’autre, sont envisagés.

Dans le premier scénario, le conflit ukrainien dure et s’amplifie privant le marché, d’ici l’été prochain, d’une partie des céréales produites ou stockées en Ukraine (lire encadré) et en Russie (82 Mt dont 38 Mt exportables selon le conseil agricole ukrainien- UAC). Toutes les conditions seraient alors réunies pour assister à une nouvelle flambée des prix, faute d’offre de grains suffisante. Les pays riches devraient encore avoir les moyens d’en acheter. Mais qu’adviendra-t-il des plus pauvres ? Par ailleurs, aucun pays exportateur majeur n’est à l’abri, d’ici la prochaine récolte, d’un accident climatique qui altérerait alors sa production de grains céréales. « En ce début de printemps, les conditions de cultures de blé sont du reste mitigées dans l’hémisphère nord », rapporte FranceAgriMer.

Rempart contre la flambée

Dans le second scénario, le conflit entre l’Ukraine et la Russie prend fin rapidement. Le retournement conjoncturel des marchés des grains qui en découlerait serait alors inévitable et brutal. L’effondrement des prix des grains ruinerait les producteurs de céréales de l’hémisphère nord. La concurrence entre pays exportateurs serait rude. L’ensemble du blé et du maïs stocké, jusque-là empêché d’être exporté, serait en effet disponible à la vente.

Pour les pays importateurs de céréales, le meilleur rempart contre la flambée et la volatilité des prix est la détention de stocks. À la fin du mois de juin prochain, les stocks mondiaux de blé équivaudront à 37 % des utilisations totales. Mais ils sont inégalement répartis. L’Algérie dispose de stocks importants, équivalents à 61 % de ses utilisations annuelles, lui permettant de différer certains achats alors que l’Indonésie (16 %) ou l’Égypte (20 %) sont particulièrement vulnérables. Au Japon, le ratio est de 17 % mais le pays a les moyens d’acheter des céréales chères. La Chine dispose en stock de près d’une année de consommation de blé et de huit mois de maïs.

Du côté des pays exportateurs, les États-Unis achèveraient la campagne affaiblis avec des stocks de report de blé et de maïs en net repli. Aujourd’hui, ils pallient en partie l’absence de l’Ukraine sur les marchés mondiaux en vendant plus de grains. Après une bonne récolte, l’Argentine et l’Australie auront reconstitué des stocks importants de blé. Quant à la Russie, elle achèverait la campagne avec 12,5 Mt de blé mais le trafic maritime sur la mer d’Azov est ralenti et dangereux.

Prévisions en Ukraine

Au mois de juillet prochain, l’Ukraine aura en stock les 5 millions de tonnes (Mt) de blé et les 16,7 Mt de maïs que le pays ne sera pas parvenu à exporter d’ici la fin du mois de juin. Ces stocks s’ajouteront aux prochaines récoltes de l’été prochain estimées. Le Conseil agricole ukrainien (UAC) estime à 16 Mt celle du blé (- 16 Mt sur un an) et à 19 Mt celle du maïs (- 23 Mt sur un an). L’ensemble accroîtra mécaniquement les quantités de céréales disponibles à la consommation et surtout à l’export.