Installation en bovins viande
La revanche des petits troupeaux ?

Durant les dix dernières années, deux modèles d’installation ont cohabité en élevage allaitant : les fermes familiales historiques – qui atteignent des limites organisationnelles – et les petits troupeaux menés par des éleveurs pluriactifs.

La revanche des petits troupeaux ?

Une récente étude de l’Idele, de la MSA et du ministère de l’Agriculture fait apparaître deux « pôles » au sein des 17.550 éleveurs de bovins viande installés entre 2010 et 2020. Environ la moitié d’entre eux (8.600) s’installent en individuel ; et, parmi eux, un sur deux est pluriactif (exerçant un emploi non agricole), au moins au début de sa carrière. Ces éleveurs pluriactifs sont installés sur des structures de taille modeste : plus de 4.000 d’entre eux élèvent moins de 20 vaches, sur 33 ha en moyenne. Des petits troupeaux « plus accessibles, plus vivables en termes de temps de travail », et dont la dynamique était jusqu’alors « sous-estimée » et « sous-étudiée », résume l’un des auteurs de l’étude, Christophe Perrot (Idele).

À l’autre extrémité du spectre, près d’un tiers des installés (5.700 actifs) rejoignent des Gaec de taille importante. Ces exploitations familiales se sont agrandies au fil des années, pour atteindre aujourd’hui une moyenne de 2,8 équivalents temps plein (ETP), 128 vaches et 211 ha exploités. Un modèle qui atteint ses limites en termes de main-d’œuvre (gestion des vêlages notamment) et de transmission. « Dans ces exploitations, l’intensité du capital est telle que les cédants doivent consentir d’important rabais s’ils veulent installer leurs enfants », constate Christophe Perrot. Là où les syndicats parlent de renouvellement des générations, l’économiste préfère le terme de « renouvellement des actifs » : « La génération qui s’est installée dans les années 1990 s’en va. Le plus probable est qu’elle sera remplacée par une pluralité d’actifs : jeunes et plus de 40 ans, salariés et non salariés, apprentis, sous-traitants, etc. »

Modèle familial « surreprésenté dans les instances »

Cette nouvelle dualité des élevages pose question, d’autant que le modèle traditionnel des Gaec est « surreprésenté dans les instances », note l’économiste de l’Idele. Quant aux pluriactifs, « leur développement fait débat au sein de l’interprofession, car ils ne produisent pas beaucoup de viande ». De quoi inquiéter les abatteurs, qui peinent déjà à amortir leurs outils industriels. Les lignes semblent bouger dans la profession, où la question d’un recul durable de la production de viande n’est plus taboue. Plaidant pour une meilleure adaptation entre l’offre et la demande, l’ancien président de la FNB, Bruno Dufayet, a déclaré lors du dernier congrès du syndicat à Metz : « Il faut avoir le courage de dire que les consommateurs mangeront peut-être un peu moins de viande ».