EXCLU WEB / Conseil Agricole Européen : Vifs débats autour des pesticides

Christophe Soulard
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Les ministres européens de l'Agriculture ont vivement critiqué le 18 juillet le plan présenté par la Commission européenne qui vise  à réduire l'usage des pesticides.

EXCLU WEB / Conseil Agricole Européen : Vifs débats autour des pesticides

La Commissaire européenne à la Santé, Stella Kyriakides a présenté et soumis aux 27 ministres de l’Agriculture européens sa proposition législative sur la réduction des pesticides avec un objectif de -50 % d’ici 2030 par rapport à la période 2015-2017, aussi bien dans les 27 États qu’au plan européen. Une limite basse fixée -35 % pourrait être accordée « lorsque les États pourront le justifier », a-t-elle dit en substance. Ce plan prévoit aussi une interdiction quasi-complète dans les zones sensibles, (espaces verts urbains, aires naturelles protégées…). Bien que les États membres soient tous conscients de la nécessité de préserver l’environnement et qu’ils inscrivent tous dans les objectifs du Green Deal et du Farm to Fork, cette proposition a engendré une levier de boucliers de nombreux pays membres. À commencer par la Pologne qui s’étonne que cette proposition soit mise sur la table « sans aucune donnée scientifique solide » et sans avoir analysé « l’impact sur la sécurité alimentaire ». Beaucoup de ses collègues lui ont fait chorus. « Nous sommes depuis longtemps à un niveau très bas de pesticides, il faut tenir compte du point de départ des États », a pour sa part plaidé le ministre finlandais Antti Kurvinen. Dans le même état d’esprit, le ministre italien Stefano Patuanelli, souhaite la mise en place « d’instruments d’accompagnement dans le secteur agricole ». « Il faudrait autoriser une nouvelle technique d’hybridation génétique », a-t-il plaidé.

Alternatives crédibles

Par l’intermédiaire de son ministre, Marc Fesneau, la France a regretté que la proposition ne porte pas sur une harmonisation des procédures d’autorisation de mise sur le marché des substances actives. Le ministre français souhaiterait également que la Commission s’intéresse plus à l’innovation et au déploiement du biocontrôle, quasiment absent, de manière opérationnelle, de la proposition législative européenne et que les clauses miroirs sont introduites dans le texte. « Les discussions devront porter sur la définition des indicateurs et de la fixation des cibles, la définition des zones sensibles et des restrictions d’utilisation », a ajouté Marc Fesneau. En fait, la plupart des États souhaitent que cette réduction des pesticides soit compensée par la mise en place d’alternatives crédibles et efficaces qui maintiennent le potentiel de production des agriculteurs ainsi que leurs revenus. « Il ne faut pas laisser les agriculteurs sans solutions », a martelé Marc Fesneau. Dans ce concert, seul Cem Özdemir, ministre fédéral de l'Alimentation et de l'Agriculture, a jugé cette proposition « cohérente  (…) qui cherche un équilibre ». L’Allemagne considère toutefois qu’il faut tenir compte des besoins des agriculteurs, notamment en ce qui concerne les zones Natura 2000 et des zones sensibles. Cem Özdemir a demandé des clarifications sur le montant des aides financières prévues. La Commission devrait donner au mois de septembre, la feuille de route pour chaque État membre afin de fixer les objectifs nationaux de réduction des pesticides. Ce qui promet encore de vifs débats à venir.

Ne pas rouvrir l’accord SPS

Le Conseil agricole s’est penché sur l’accord concernant l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires dit '“Accord SPS” adopté durant la 12e conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) le 17 juin dernier. Le ministre, Marc Fesneau, a alerté la Commission européenne sur l’importance de ne pas ouvrir, rouvrir ou renégocier l’accord SPS actuel car celui-ci permet de protéger les normes SPS européennes et donc le modèle européen. C’est une « impérieuse nécessité », a-t-il martelé, avec le soutien d’une très large majorité de ses collègues. L’Union européenne entend, sur ce dossier, se positionner « en leader de la transition mondiale vers des systèmes alimentaires durables ». Mais il n’est pas sûr que les autres grandes puissances (États-Unis, Chine, Russie, Inde, Brésil…) embrayent le pas.