Agrivalys
Animaux, végétaux, humains… la santé avant tout

Cédric MICHELIN
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Blouses blanches, masques, combinaisons, caisson dépressurisé (pour éviter que les agents pathogènes ne sortent), laboratoire classé P3 (sur une échelle de 4)… Bienvenue au laboratoire Agrivalys à Mâcon qui est au cœur des tests Covid-19 en Saône-et-Loire. Mais pas que. Le laboratoire continue d’analyser tout ce qui a trait à la santé des animaux et des végétaux. Bien que les équipes soient particulièrement sollicitées en ce moment, le Département sait qu’Agrivalys a encore du potentiel et aura un rôle crucial à jouer pour l’économie et la santé de tous à l’avenir.

Animaux, végétaux, humains… la santé avant tout

Imaginez que l’Homme soit un animal ? Au sens biologique du terme, pas au sens de l’âme et de l’esprit. Imaginez que le Covid-19 soit une maladie animale ? D’ailleurs, avant qu’elle ne soit une pandémie humaine, l’hôte premier de ce coronavirus n’était-il pas une chauve-souris ? Alors pourquoi nos vétérinaires et nos laboratoires de santé animale et végétale ont-ils depuis le début été écartés de la gestion de la crise sanitaire en France ? La « médecine humaine » a-t-elle peur de perdre de sa superbe à côté des spécialistes des coronavirus ? En tout cas, le Département de Saône-et-Loire a été dans les premiers à vouloir aider à lutter contre le Covid-19 et Agrivalys a été le premier laboratoire "vétérinaire" retenu pour (reconnu par l’ARS le 9 avril).
Car l’agriculture sait faire face et gère régulièrement - et correctement la très grande majorité du temps – des crises sanitaires, citons par exemples : vache folle, grippes aviaires, pestes porcines, FCO, flavescence dorée, BVD… et demain certainement d’autres encore (Xylella fastidiosa…) malheureusement en raison des failles sanitaires de la mondialisation.
Le 10 novembre dernier, le président du Conseil départemental de Saône-et-Loire, André Accary, accompagné par Frédéric Brochot, en charge de l’agriculture, n’étaient pas venu à Agrivalys pour critiquer la gestion face au coronavirus. Ils ont tenu à rendre hommage « à tous ceux qui sont en première, en deuxième et en troisième ligne » dans la lutte contre l’épidémie de Covid-19. Et pas uniquement au sein des services publics. Leurs pensées et encouragements allaient du soignant libéral aux aidants, en passant par les Ehpad et les associations. Laboratoire public-privé, Agrivalys concilie justement ces multiples facettes. Le Département a ainsi « mis en avant » l’équipe « renforcée » d’Agrivalys de Nathalie Pozzi, la directrice, qui effectue des analyses virologiques dans des proportions jamais vues. Le tout au « service de l’intérêt public » comme nombre d’autres personnes et entreprises en ce moment. Honorer lors du premier confinement, l’agriculture en fait toujours partie.

Réduire les délais

Pour André Accary, l’heure est toujours à la crédibilité de la parole politique traduite en actes concrets. « Nous avions anticipé cette deuxième vague et nous avions investi en conséquence dans du matériel (deux automates PCR), des consommables et surtout du personnel compétent avec deux techniciens embauchés en plus ». Nul ne sait encore combien de temps va durer la crise et si cela suffira pour tenir dans la durée mais Marion Chaussat, Catherine Tétard, Lena Raffin et Jacques-Alexandre Perrier sont là, quasiment nuit et jour, « samedi, dimanche », pour faire parfois plus d’un millier de tests Covid-19 par jour (jusqu’à 1.200). Que ce soit pour les hôpitaux de Mâcon, Chalon, Montceau, Louhans, Paray. Tester, tracer, isoler est la stratégie nationale. Agrivalys a déjà réalisé plus de 35.000 tests Covid fiables. Malheureusement, l’épidémie continue de se propager. Seule l’ARS a le droit de communiquer sur les chiffres. Mais André Accary alerte sur « nos petits relâchements » coupables, lors de repas avec des collègues ou en famille. Si le respect des gestes barrières est crucial, « il faut aussi réduire les délais entre le prélèvement et les résultats de l’analyse, sinon le risque de contamination augmente entre temps ». Après la pénurie de masques, les temps d’attente des tests avaient explosé aux retours de vacances à la fin de l’été. Agrivalys promet des résultats individuels entre 4 et 24 heures chrono.
À la question de faire des tests groupés comme en végétal ou en vétérinaire, Nathalie Pozzi se résigne néanmoins. « Cela nous démange mais nous n’avons pas le droit en analyse humaine. Le test doit être individuel ». Pourtant, d’autres pays ne font pas ce choix. En Chine, à la sortie du premier confinement, il a été décidé de faire des regroupements de 30 échantillons. Car aux épidémiologistes des plateaux de TV qui préconisent de tester l’ensemble de la population le 1er décembre, les vrais spécialistes de terrain rétorquent : « on aimerait mais on ne pourra pas », faute notamment de personnes pour faire les prélèvements.

Flavescence dorée et export de broutards

Les différences sont nombreuses donc entre crises sanitaires animale et humaine. Aucun animal n’aurait eu non plus le droit d’être transporté sans passeport sanitaire au statut indemne à l’intérieur ou à l’extérieur de nos frontières à la sortie du premier confinement. Les santés animale et végétale continuent en tout cas d’être analysées par Agrivalys. « Nous sommes en plein dans les analyses flavescence dorée (15.000 tests) et c’est la grosse période des exportations d’animaux (2.000 par jour) ». Un flux extrêmement tendu puisque les exportateurs n’attendent pas les résultats avant de partir mais envoient les échantillons, roulent, et attendent les résultats pour embarquer les animaux sur les bateaux, « parfois, ils sont déjà au port » et le bateau attend pour partir. Frédéric Brochot rassure : « tout ceci a aussi été anticipé et le commerce continue à se faire normalement avec l’équipe renforcée d’Agrivalys ». Lui qui a été président du GDS71 sait aussi que la période des vêlages va être un nouveau « pic » à gérer au laboratoire avec notamment la campagne de dépistage BVD en cours. Cela devrait dépasser les 30.000 analyses par jour donc.
André Accary le redit : « voici un maillon de la chaîne mais il y a beaucoup de gens de l’ombre qui œuvrent pour la santé de la population. Tous la main dans la main pour traiter cette crise ». À n’en pas douter, l’agriculture et la viticulture auront apporté une pierre de plus dans cette lutte. Avec 600.000 bovins dans le département et des millions de ceps de vignes déjà surveillés, nous n’en doutions pas...

Une seule santé

Lors du Forum de Paris sur la paix le 12 novembre, le ministre de l'Europe et des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a annoncé la création d'un conseil international d'experts consacré à l'approche « Une seule santé », intégrant les « santés humaine, animale et environnementale ». « L'Humanité ne saurait bien vivre sur une planète malade », a résumé le locataire du Quai d'Orsay lors d'une réunion de l'Alliance pour le multilatéralisme, en présence du ministre allemand des Affaires étrangères, des dirigeants de trois organisations onusiennes (PNUE, FAO, OMS), ainsi que de l'OIE (santé animale). À la manière du Giec (groupe d'experts sur le climat), ce « conseil d'experts de haut niveau » aura pour rôle in fine « d’aider les responsables publics à prendre les décisions utiles pour répondre aux futures crises sanitaires ». Le conseil regroupera les quatre organisations internationales présentes le 12 novembre, ainsi que « des experts internationaux en sciences humaines, animales, sociales et de l’environnement ».