Marchés des céréales
La tonne de blé à plus de 300 € en 2022-2023 ?

Cédric MICHELIN
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La guerre d’Ukraine passée, les cours des céréales devraient s’assagir si la production mondiale de maïs 2022-2023 est abondante. Toutefois, les marchés des céréales resteront essentiellement portés par la demande mondiale.

La tonne de blé à plus de 300 € en 2022-2023 ?

« Il va falloir s’habituer à acheter des céréales chères », a déclaré Laurent Berthelier, directeur trading et trituration de Feed Alliance en participant à la Journée des matières premières 2022 du club Aftaa. « Comme dans les prochains mois les marchés mondiaux de céréales seront tirés par la demande, on n’imagine pas le prix de la tonne de blé inférieur à 300 € et ne pas couvrir les coûts de production de céréales », a-t-il ajouté.

Les besoins en grains ne devraient pas faiblir en 2022-2023. Les pays importateurs de céréales – africains notamment – resteront aux achats. Le Fonds monétaire international serait disposé à accorder, à certains d’entre eux, des prêts pour subventionner abondamment le prix du pain vendu à la population. Car tout doit être mis en œuvre pour éviter des émeutes urbaines comme en 2008.

Pour toutes ces raisons, « il ne faut pas s’attendre à un effondrement rapide des prix des grains, défend encore Laurent Berthelier. Par ailleurs, le coût du fret est très élevé et la faible parité du dollar renchérit les prix en euros des céréales ».

Or la planète a besoin de maïs. Aussi, les cours des céréales évolueront avant tout en fonction des quantités de maïs qui seront récoltées au cours des douze prochains mois. Ces dernières semaines, c’est le prix du blé qui a flambé sur les marchés physiques. L’invasion de l’Ukraine par la Russie a surpris les opérateurs aux achats. Pourtant les "farmers étasuniens" seraient tentés de semer du soja aux dépens du maïs, moins exigeant en azote pour se développer. À la fin du mois de mars, l’USDA, l’institut de statistiques américain, estimait qu’entre 35 et 36 millions d’hectares de soja pourraient être plantés ce printemps. Dans le même temps, le prix attractif du bioéthanol de maïs et l’absence de l’Ukraine à l’export pourraient inciter ces mêmes "farmers" à revoir leurs choix lorsqu’ils s’apprêteront à semer leurs champs. N’observe-t-on pas les cours du soja et du maïs se rééquilibrer en faveur du dernier ?

Accessible et bon marché 

En 2022-2023, la planète ne devrait pas manquer de céréales si aucun accident climatique majeur ne survient. Mais la production mondiale de grains exportables sera répartie différemment entre les pays producteurs.

« En Ukraine, si le front se concentre à l’est du pays, les agriculteurs des régions centrales et occidentales pourraient avoir accès à leurs terres et les mettre en culture, explique Laurent Berthelier. Dans ce cas de figure, plus de la moitié du potentiel de production du pays pourrait être sauvé ». D’ici l’été prochain, la Russie se remettra aussi à exporter des céréales car elle a besoin de devises. Mais les ports de la Mer Noire et de la mer d’Azov, paralysés, bombardés et minés, ne pourront pas être pleinement opérationnels.

Par ailleurs, le gouvernement russe et le gouvernement ukrainien prioriseront l’approvisionnement de leur pays afin de rendre les denrées agricoles accessibles et bon marché. Ces dernières semaines, les fonds financiers n’ont pas particulièrement accentué l’inflation des prix du blé. Leur pression s’est davantage portée sur les marchés du maïs car les stocks de fin de campagne des principaux pays exportateurs étaient bien faibles pour compenser l’absence de l’Ukraine. Du reste, les cours des céréales avaient fortement augmenté les mois précédents l’invasion du pays. La demande mondiale de grains avait été très importante dès le début de la campagne et les stocks alors disponibles étaient déjà insuffisants pour parer à tout accident.