Paille
Une relation de confiance qui se construit

Marc Labille
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Dans la région du Creusot, un agriculteur-éleveur a pour habitude de presser de la paille en bottes carrées pour quatre exploitations. Une paille qui est réservée chaque année chez les mêmes céréaliers dans une relation de confiance qui s’est construite au fil du temps.

Les moissons débuteront dans quelques semaines et si la première question qui vient à l’esprit est bien quelle sera la récolte de grains, la question de la paille est l’autre préoccupation majeure du monde de l’élevage. On le répète d’année en année ; la consommation de paille des zones d’élevage a explosé ces dernières décennies avec la généralisation des stabulations sur aires paillées. Et la dépendance des exploitations à cette paille est largement aggravée par la répétition des sécheresses. La chaleur et l’absence de pluviométrie de mars-avril ont eu à nouveau de quoi inquiéter. En élevage, le premier challenge sera de reconstituer les stocks de fourrages ainsi que de nourrir les animaux le plus longtemps possible au vert. L’autre défi de saison est d’approvisionner des réserves de paille suffisantes pour l’hiver. Dans le contexte décrit plus haut et alors même que les rendements céréaliers pourraient décrocher, l’anticipation est plus que jamais recommandée.

Entre 160 et 180 hectares de paille pour quatre

Dans la région du Creusot, plusieurs éleveurs ont déjà leurs habitudes pour la paille. C’est le cas de Jean-Philippe Nivost qui avec trois autres collègues des communes de Saint-Firmin, Antully et Saint-Sernin-du-Bois s’approvisionnent d’un peu plus de 160 hectares de paille auprès de trois céréaliers de la région. C’est une longue histoire qui remonte à près de 40 ans, rapporte Jean-Philippe. Son père avait déjà pris l’habitude de se fournir en paille chez un agriculteur du Couchois. Bien qu’informel, le partenariat a perduré jusqu’à aujourd’hui. Pour plus d’efficacité, Jean-Philippe dispose de sa propre presse à balles cubiques et c’est lui qui assure la prestation de pressage pour les quatre élevages. Pour plus d’efficacité, Jean-Philippe dispose de sa propre presse à balles cubiques et c’est lui qui assure la prestation de pressage pour les quatre élevages. « Chaque éleveur achète sa paille en andain directement aux céréaliers. On n’achète pas des tonnes de paille mais des hectares, sachant que le rendement peut varier de 2,5 tonnes/hectare à 5 tonnes d’une année sur l’autre », explique l’éleveur de Saint-Firmin. Ce dernier part presser de la paille dans la vallée de la Dheune, à Gergy et tout près de Beaune et chaque éleveur vient récupérer sa paille bottelée dans les champs.

Les 160 à 180 hectares couvrent les besoins des quatre exploitations. Cette année, dix hectares supplémentaires ont été réservés chez l’un des céréaliers. « Je réserve toujours largement de quoi couvrir mes besoins », confie Jean-Philippe qui a pour coutume de « dépanner » des voisins pris de court dans l’hiver.

« Conscience professionnelle »

La pérennité de cet approvisionnement est avant tout une affaire de confiance, assure Jean-Philippe Nivost. « On a appris à se connaître. Les céréaliers savent comment on travaille ». Car pour construire cette fidélité, il faut faire montre de « conscience professionnelle », estime l’éleveur de Saint-Firmin. « Il faut y mettre de la bonne volonté. Parfois, on est obligé de faire sécher la paille. Il faut savoir respecter si un céréalier exige que l’on roule dans les passages de traitement pour préserver ses sols. Accepter de ne pas y aller si c’est trop mouillé… On paie dans les temps. Même si la paille est de mauvaise qualité », confie Jean-Philippe qui ajoute que le fait d’être équipé d’une presse à haute densité participe aux bonnes relations.

En résumé, cette fidélité s’entretient. Mais l’honnêteté et la rigueur portent leurs fruits puisque les céréaliers avec qui travaille Jean-Philippe Nivost ne lui ont jamais fait faux bon et ses trois collègues éleveurs sont très satisfaits de ce fonctionnement.