Viticulture
Le Plan de résilience gel : « une solution collective »

Le Plan de résilience gel du vignoble du Jura est en marche. Un point d’étape a été présenté le 5 mai dernier à Poligny, lors de l’assemblée générale de la Société de viticulture. Valérie Closset, sa présidente, revient sur les enjeux de ce plan.

Le Plan de résilience gel : « une solution collective »
« Nous voulons apporter des solutions à la vigne, à la cave ou encore en gestion, commercialisation, pour aider à la résilience des entreprises et aux installations »

Face aux défis des aléas climatiques, que peut apporter la Société de viticulture ?

Après la crise Covid, le gel de printemps, les pluies diluviennes, une récolte historiquement faible… 2021 est une année particulière pour le vignoble du Jura. Nous avons tous vécu dans nos entreprises des aléas climatiques, plus ou moins fortement, chacun de manière différente. Face à ce vécu, en tant que Fédération nous nous devons d’apporter une solution à tous. Les AOP sont une aventure collective, les solutions sont aussi collectives.

Où en est le plan de résilience pour le vignoble ?

Nous avons présenté à l’assemblée générale un état des lieux.

Le gel et la canicule ont un impact sur les rendements. Il faut se demander ce que nous pouvons apporter comme résilience que ce soit à la vigne, à la cave ou encore en gestion, commercialisation.

Nous sommes en train d’établir des moyens, par exemple des dossiers de subventions que nous essayons de monter collectivement.

Au niveau des vignes, nous travaillons sur le matériel végétal, avec toujours en parallèle la recherche de financements.

Ces solutions ne seraient peut-être pas gérables individuellement mais collectivement oui.

Par exemple la taille tardive par rapport aux périodes de gel, implique de savoir sur quelles parcelles on va la mettre en place. Cela implique aussi une gestion de la main-d’œuvre. La SVJ travaille sur ces deux questions. Le Plan de résilience prévoit un zonage des risques de gel avec une cartographie précise à l’échelle parcellaire des exploitations pour déterminer les meilleurs moyens de lutte à mettre en place. Sur les tensions de recrutement, c’est un problème qu’il nous faut gérer à l’échelle du département, avec d’autres organismes, peut-être avec les collectivités.

Le rôle de la SVJ est de présenter une armoire à solutions et l’entreprise va choisir les tiroirs qui l’intéressent.

Les solutions sont donc diverses ?

Oui par exemple, au niveau des appellations nous sollicitons l’INAO. Nous demandons que les cahiers des charges des AOP puissent être modifiés temporairement pour nous adapter aux aléas. En crémant, par exemple :  pouvoir diminuer la période sur latte pour éviter d’avoir un trou de commercialisation de 3 à 6 mois.

Une demande de modifications des cahiers des charges est également à l’étude, entre les ODG Arbois et Côte du Jura, les viticulteurs et l’INAO, pour que les vignerons puissent tester des cépages (gamay, enfariné…) dès les prochaines plantations, de façon très encadrée : moins de 5 % de la surface et pas plus de 10 % de l’assemblage, avec des états des lieux à 5 ans et 10 ans.

Un autre levier d’action : la gestion des stocks. Nous pouvons nous inspirer d’autres vignobles en intégrant nos particularités. Dans le Jura, nous sommes un peu les champions du stockage et de l’immobilisation.

Il existe une grande variabilité d’expression des cépages dans le Jura. Nous allons donc travailler sur la sélection massale. Et également sur les porte-greffes, rechercher les plus vigoureux qui repoussent après le gel, ceux qui supportent le mieux les fortes chaleurs et le manque d’eau. Le porte-greffe actuel, présent à 90 % dans le Jura, n’est pas résistant à la sécheresse.

Nous allons gérer au mieux les solutions pour aider à la résilience des entreprises et aux installations.

 

À quelle échéance ?

Ce premier plan de résilience court sur 18 mois, il se veut efficace. Le travail sur le matériel végétal est une approche expérimentale qui prendra plus de temps, de 10 à 15 ans. Mais des actions techniques sont déjà en cours. Par exemple le suivi de différents cépages présents au sein du conservatoire situé à Le Vernois, ou encore la sélection massale collective avec un test de 146 lignées de savagnin, 105 poulsard et 11 enfariné, etc.

Nous avons besoin de pouvoir apporter des solutions à court et moyen terme.

 

Puisque nous parlons d’aléas climatiques, quel impact a eu la chaleur de cette semaine sur la vigne ?

Il est exceptionnel d’avoir des températures nocturnes supérieures à 10 degrés telles que nous les connaissons actuellement. La vigne est en plein débourrement, elle pousse jour et nuit. Nous allons arriver cette fin de semaine à la fleur, ce qui est hyperprécoce. On court après la vigne !

Le temps pour intervenir est de plus en plus restreint et nous devons faire face.

 

Pour conclure, quelle est, selon vous, la force du vignoble jurassien ?

Dans le collectif, on doit gérer toutes les AOC. L’enjeu est la mobilisation collective, que le Jura sait traduire en actes. Cette année 2021 a été très particulière. Nous avions tellement de choses à nous dire que nous avons fait le choix d’une assemblée générale par voie dématérialisée pour nous donner le temps en présentiel d’un échange sur le Plan de résilience du vignoble du Jura.

Le vote a été mis en place en ligne sur une durée de 5 jours, ce qui laisse la possibilité de prendre connaissance des documents et de voter. Et nous avons eu une très bonne mobilisation.

L’échange dans la diversité de nos AOP et de nos entreprises est enrichissant et donne une cohérence. Nous sommes un petit vignoble, ce qui donne un avantage : la facilité de réaction. Le rôle de la SVJ est de donner toutes les opportunités de réaction aux exploitations.

IR