Animaux mutilés
La surveillance s’organise

Françoise Thomas
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Les actes de barbarie envers les chevaux (et maintenant les bovins) perdurent dans le département comme ailleurs en France. Au niveau départemental, la gendarmerie, via sa cellule de prévention technique de la malveillance, a prévu quatre réunions d’information à destination des propriétaires d’équidés. La première rencontre a eu lieu lundi 19 octobre au domaine équestre de Laizé. L’occasion de faire (un peu) le point sur les affaires, et surtout de distiller plusieurs conseils.

La surveillance s’organise
Exemple de patrouille de nuit, ici mi-octobre du côté de saint-Germain-du-Plain.

Il n’était qu’une dizaine de propriétaires de chevaux venus assister à la réunion organisée par la gendarmerie ce lundi 19 octobre au domaine équestre de Laizé, mais l’inquiétude était palpable. « Nous vivons mal la situation », « Je me réveille au moindre bruit », ont-ils été plusieurs à dire, quand d’autres ont avoué « frôler la paranoïa ». Un propriétaire présent a même directement été victime de ces agissements : en juillet 2019, il a retrouvé son cheval tué dans son pré, « situé à 50 m des maisons », la tête tuméfiée et l’oreille droite sectionnée…. À l’époque, ce fait isolé avait conduit les gendarmes et le procureur à classer l’affaire sans suite dès le mois d’août !
Désormais, la situation est différente. « 400 faits ont été recensés au niveau national, a rappelé l’adjudant Mickaël Corradi. Cependant, seuls 70 ont été reconnus comme actes volontaires de la part d’êtres humains ». Pour beaucoup donc, il semblerait que les animaux se soient blessés d’eux-mêmes...

Mobilisation à tous les niveaux

« D’énormes moyens sont actuellement engagés », a poursuivi l’adjudant Corradi, et ce aussi bien au niveau départemental qu’au niveau national puisqu’une quinzaine de personnes sont mobilisées sur ces affaires au sein de la structure Oclaesp. Oclaesp, pour Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique, auquel chaque cellule départementale remonte les informations concernant ces affaires.
« Dès qu’un fait se produit, la cellule départementale spécialisée dans l’identification criminelle se déplace, a détaillé l’adjudante-chef Christelle Roux. D’où l’importance de ne surtout rien toucher si jamais l’une de vos bêtes étaient victimes de tels actes ».

Particulièrement sensibilisés en ce moment sur cette problématique-là, les gendarmes multiplient les patrouilles de jour mais aussi et surtout de nuit, près des pâtures où se trouvent des animaux.
D’où l’importance de les signaler. « Au niveau départemental, nous avons 43 correspondants sûreté, soit au moins un par gendarmerie », a annoncé l’adjudante-chef Roux. « Leur rôle est de venir à votre rencontre pour établir les vulnérabilités de vos installations, des lieux où se trouvent vos chevaux, et de vous donner des conseils pour prévenir au maximum les intrusions et dissuader les agresseurs ».

Prévenir et dissuader

La visite du correspondant de sûreté permet aussi aux gendarmes d’établir la configuration des lieux, ce qui peut s’avérer très utile en cas d’intervention.
Le principe étant de mettre « le plus d’obstacles possibles à ces agresseurs », les moyens à disposition des propriétaires d’équidés sont malgré tout limités et sans efficacité garantie. « Mais ils privilégieront toujours les endroits les plus faciles pour eux », ont souligné les gendarmes.
Parmi les « obstacles », les dispositifs d’éclairage avec détecteur de présence, la mise en place de caméra de chasse (surtout sans voyant infrarouge signalant leur présence), des barrières en parfait état voire renforcées, la mise en place de signalétique « site sous vidéo protection », ou même un simple « ne pas donner à manger aux chevaux » (pour dissuader tout badaud et ne pas habituer les chevaux à venir facilement à la rencontre des inconnus). Les chiens restent d’excellents moyens de protection ou tout du moins d’alerte. Comme d’autres animaux d’ailleurs comme l’a montré l’exemple dans l’Yonne : « la personne qui a surpris les hommes dans son écurie avait été alerté par ses cochons ! ».
L’une des premières mesures de précaution consiste à regrouper les chevaux au plus près des habitations « dans la mesure du possible », a cependant précisé l’adjudante-chef, bien consciente que l’exercice a rapidement ses limites.

Tous concernés mais…

Il peut être intéressant aussi de s’entendre avec les autres propriétaires d’un même secteur pour planifier les pâturages pour les regrouper au maximum. Cela facilite les surveillances mutuelles.
Si l’on voit aussi ce type de « patrouille » s’organiser via les réseaux sociaux, plusieurs propriétaires présents ce lundi soir ont avoué s’en méfier au contraire de plus en plus. « Je me fais désormais la plus discrète possible sur Facebook, a dit l’une d’elle. J’ai même trié mes « amis », ceux dont finalement je ne sais pas grand-chose. On ne sait pas à qui on a vraiment affaire, je ne voudrai surtout pas indiquer à un agresseur potentiel où se trouvent mes chevaux ! ».

L’idée, rappelée plusieurs fois par les gendarmes, est plus de ne surtout pas hésiter à signaler tout véhicule suspect, non habituel près de pâturage. « Sans intervenir directement, vous prenez le maximum d’informations : plaque d’immatriculation, nombre de personnes, éléments sur le conducteur…. À nous de vérifier ensuite de qui il s’agit vraiment et de recouper les éléments si besoin ».

Et comme à l’inverse, toute personne s’approchant désormais de chevaux devient suspecte, il est important que tout promeneur bien intentionné évite au maximum en ce moment de prendre l’initiative d’aller caresser des chevaux !

L’appli VigiAgri

Aux professionnels du secteur agricole, Christelle Roux a conseillé « de télécharger l’application VigiAgri. Mise en place avec la chambre d’agriculture, elle vous permet d’être informé de tout acte de malveillance s’étant produit dans votre secteur. Cela peut nous permettre de collecter des éléments. Et a contrario de signaler aussi toute présence non suspecte », comme l’exemple de cet agent territorial venant avec son drone collecté des données sur un ruisseau, « en toute légalité ». « Cela permet ainsi d’éviter les confusions », souligne l’adjudante-chef. Les propriétaires équins étant à juste titre particulièrement sous tension en ce moment…

Où en est l’enquête ?

Où en est l’enquête ?

Évidemment, impossible d’avoir des éléments sur l’avancée de l’enquête ce lundi soir de la part des gendarmes présents. Il s’avère que parmi les actes répertoriés, 90 % ont touché des juments, tout âge, toute race, les chevaux ne sont donc pas pour autant à l’abri de ces sévices. Ceux-ci se sont produits aussi bien de jour que de nuit. Si les gendarmes s’orientent sur différents profils (les paris stupides sur Internet, les dérives sectaires, les groupes "antichevaux", etc.), il ne faut pas non plus exclure le côté opportuniste : de vieilles querelles de voisinage dont la vengeance passerait par ce monde opératoire tendance.
Si les gendarmes n’avaient donc aucun élément à donner à ce niveau-là, ils se sont malgré tout voulu rassurants : « il ne faut pas surestimer ces gens-là, ils laissent aussi des éléments lors de leurs passages » … Et ils ont insisté à plusieurs reprises sur un point : aussi traumatisants que soient ces actes ne surtout pas chercher à faire justice soi-même !

Les bovins maintenant

Après l’attaque des trois veaux la semaine dernière, l’inquiétude gagne aussi les éleveurs bovins. « Les dispositifs sont les mêmes que pour les chevaux en terme de prévention : tout élément de détecteur de présence, caméra de chasse, tournée régulière, des animaux le plus regroupés possible, etc. », détaille l’adjudante-chef, bien consciente que la surveillance et la vulnérabilité des troupeaux est d’autant plus importante quand il s’agit de bovins ! Les affaires sont traitées par la même cellule pour regrouper au maximum les éléments et mutualiser les moyens.

Plus d’informations

Plus d’informations

Pour connaître le correspondant sécurité de votre secteur, rendez-vous sur le site www.referentsurete.fr

Ce dispositif étant national, vous obtiendrez également les renseignements sur les départements limitrophes si vous avez des animaux ailleurs qu’en Saône-et-Loire.
Trois autres réunions organisées par les référents sûreté en prévention technique de la malveillance sont programmées et ouvertes à tous :
- le lundi 26 octobre à 19 h à la salle Jayet à Charolles,
- le lundi 2 novembre à 19 h au poney club des Campanettes à Flacey-en-Bresse,
- le lundi 9 novembre, à 19 h au parc des expositions Eduen à Autun.

Lors de la réunion au domaine équestre de Laizé, une dizaine de propriétaires d'équidés étaient présents.