Enseignement agricole
« Conserver la pépite de l’enseignement agricole »

La mission d’information sénatoriale portant sur l’enseignement agricole a rendu son rapport le 5 octobre. Soulignant l’excellence de cette filière, elle appelle l’État à la soutenir et à engager une véritable « transition agro-politique » pour lui redonner une stratégie et des objectifs clairs.

« Conserver la pépite de l’enseignement agricole »

Pour les 23 sénateurs qui ont adopté le rapport à l’unanimité, il faut conserver « cette pépite qu’est l’enseignement agricole », selon les mots de Nathalie Delattre (Gironde). Elle en veut pour preuve les excellents résultats obtenus en 2020, meilleurs que ceux de l’Éducation nationale : 92,9 % de réussite au bac professionnel (contre 90,7 % pour l’Éducation nationale - EN) ; 98,4 % pour le bac technologique (95,7 % EN), 98,9 % pour le Bac S (98,4 % EN). La performance mérite d’autant plus d’être soulignée que les représentants de la Haute assemblée conviennent eux-mêmes que les profils qui intègrent les filières agricoles sont « plutôt en échec scolaire » (ce qui n’est qu’un critère, NDLR) au regard des critères de l’Éducation nationale. « Malgré cette réputation que ce sont des élèves qui partent de loin, l’enseignement agricole tant public que privé, parvient à leur faire décrocher un bon diplôme », indique Nathalie Delattre. « Car les jeunes qui oscillent entre théorie et pratique, trouvent du sens dans cette filière agricole ». Quant à l’insertion professionnelle, mesurée par les taux d’emploi à 7 et 33 mois, elle est équivalente ou un peu meilleure selon les niveaux de diplômes que ceux de l’Éducation nationale.

 

Difficultés financières

 


Mais ce serait une « voie d’excellence qui pourrait encore faire mieux si on lui en donnait les moyens financiers », note la mission. Car c’est bien ici que le bât blesse. Les sénateurs s’en prennent, à mots à peine couverts, à Bercy qui ne semble pas avoir conscience de l’importance et des réussites de l’enseignement agricole. D’autant que la situation financière des établissements s’est aggravée par la crise Covid, et « elle apparaît aujourd’hui préoccupante », ajoute la sénatrice de la Gironde. Ce ne sont pas moins de 55 établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricoles, répartis dans différentes régions qui connaissent des difficultés financières. Elle s’alarme aussi des positions prises par Bercy, qui semble voir dans la réforme du baccalauréat un moyen d’économiser des postes (notamment d’enseignants, NDLR), au détriment de la qualité de l’enseignement agricole.

 

Renouveler les générations

 

Autre sujet d’inquiétude pour les sénateurs : le fait que seuls 35 % des jeunes apprenants dans les filières agricoles soient formés pour l’agriculture stricto sensu, alors que 42 % le sont pour les services à la personne et 19 % pour l’aménagement et les paysages. « Il sera difficile dans ces conditions de renouveler les générations et les 200.000 agriculteurs qui partiront à la retraite d’ici 2026 », s’est émue la sénatrice. Dans tous les cas, à travers 45 propositions, la mission appelle à renforcer l’attractivité de l’enseignement agricole.

Quelques propositions du rapport sénatorial

• Réaffirmer le rôle de pilotage du ministère de l’Agriculture et établir un nouveau projet stratégique pour l’enseignement agricole, notamment exigeant la participation du ministre de l’Agriculture aux débats au Parlement portant sur l’examen du budget de l’enseignement agricole, tant technique que supérieur ; et annulant, à titre conservatoire, pour 2022, les suppressions d’emploi prévues dans le schéma prévisionnel d’emplois pluriannuel 2019-2022

• Consolider les fondamentaux de l’enseignement agricole pour qu’il contribue à relever les défis de l’agriculture et des territoires ruraux. Il s’agit en particulier de simplifier et d’adapter la cartographie des formations proposées par l’enseignement agricole autour d’un tronc commun enrichi de spécialisations et par exemple de mobiliser l’enseignement agricole sur la thématique du bien-être de l’agriculteur.

• Renforcer l’attractivité de l’enseignement agricole pour les apprenants, pour les familles et pour les personnels. La mission propose la venue, en 4e et 3e d’un proviseur de lycée agricole pour permettre une présentation de l’enseignement agricole ou encore d’encourager les apprenants et les établissements de l’enseignement agricole à s’engager dans le service national universel (SNU).