Des grandes cultures à soutenir dans leur transition
Zones intermédiaires (ZI), zones de non traitement (ZNT), plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles (PCAE), les questions polémiques et d’actualité ne manquent pas en cette rentrée. Nous avons interrogé sur ces sujets Lionel Borey, céréalier à Crissey et président de la section céréalière de la FDSEA.

Que penser du rapport sorti cet été sur les zones intermédiaires, dont la Saône-et-Loire fait partie ?
Lionel Borey : Le rapport pointe du doigt le fait que sur les secteurs à potentiel moyen ou faible le modèle de production en grandes cultures est aujourd’hui à bout de souffle en termes techniques et économiques. Il faut pour ces zones-là trouver un autre équilibre.
Une convergence des aides la plus rapide possible serait plutôt favorable mais ce n’est pas ce qui va révolutionner ce secteur : le rapport préconise donc aussi d’étudier toutes les possibilités pour multiplier les sources de production et non plus s’en tenir qu’à la seule rotation blé-maïs-colza.
Et c'est là la révolution puisqu’il va forcément y avoir un changement de pratique. Le secteur des grandes cultures va devoir identifier rapidement un ou plusieurs nouveaux modèles économiques où seront mêlés de l’agronomie, de l’économie et de la production d’énergie. Tout ceci devra être réfléchi et mis au point, puisque par exemple aujourd’hui, au niveau énergie, le cadre réglementaire est limitant. Il y a de la souplesse à introduire pour ces territoires qui vont faire évoluer leur modèle.
Ce qui fait le lien avec les PCAE puisqu’il y a de grands équilibres qui se font en ce moment au niveau régional entre les différentes filières, on ne peut pas imaginer que demain, pour ces zones qui vont être amenées à amorcer des mutations importantes, il n’y ait pas une politique qui accompagne ce changement.
Cela suppose que dans le futur projet régional, cette évolution soit prise en compte, intégrée et accompagnée.
Vous sentez que la Région souhaite aller dans ce sens en ce qui concerne les grandes cultures ?
Aujourd’hui, les politiques régionales sont essentiellement orientées pour apporter un soutien fort à l’élevage, aux bâtiments d’élevage, à la conversion au bio. Pour le végétal conventionnel, la politique est plus légère. Il faudra donc qu’il y ait demain un accompagnement plus important pour soutenir cette transition. La forme que ça devra prendre, les outils qui seront mobilisés, la filière végétale va forcément devoir les élaborer.
De leur côté, les territoires de Saône-et-Loire sont prêts à enclencher ces transitions ?
La Saône-et-Loire est globalement moins impactée par des problématiques de potentiels faibles ou moyens. Les moyens économiques permettent donc en partie d'amorcer la transition.
Sur les zones à faible potentiel, les situations économiques sont telles qu'il est compliqué d’amorcer une transition dans ces conditions-là. Certains secteurs du département sont dans cette situation mais c’est quand même beaucoup plus diffus qu’en Côte d’Or ou dans l’Yonne.
Aujourd’hui, on demande beaucoup de choses aux grandes cultures, sur les pesticides, sur l’agronomie, sur l’allongement des rotations. Mais pour que l’on puisse mettre de la diversité dans nos assolements et enclencher des changements de pratique, il faut que l’on identifie quel modèle économique mettre en place, que l’on s’assure des débouchés pour les cultures qui vont alimenter ce modèle. Une politique d’accompagnement sous toutes les formes est nécessaire et il faudra être imaginatif.
En parallèle de tout ceci vous êtes aussi confronté aux ZNT. Les 5 m qui semblent se profiler seraient une solution réalisable ?
Historiquement, nous avons mis en place des ZNT de 5 m par rapport aux cours d’eau. Il faut évaluer l’impact en terme de surface de ce qu’impliquerait cette bande de 5 m à proximité des maisons mais cela pourrait nous permettre de valoriser le travail que l’on fait par ailleurs et qui est méconnu, en terme d’équipement, d’épandage, de produits moins impactant.
Il faut que les maires, qui vont se retrouver en première ligne sur ces dossiers-là, aient une bonne connaissance de ce qu’on fait et de ce qu’on fait de bien.
Il y a de moins en moins d’élus du secteur agricole dans les conseils municipaux, il faut donc absolument que l’on communique sur ce que l’on fait. De toute façon le dialogue est essentiel !
Cela devrait permettre l’élaboration d’une charte départementale qui soit partagée par l’ensemble des acteurs du territoire et qui réponde aux attentes des producteurs et de la population.
Certaines exploitations vont être plus impactées que d’autres mais à l’échelle des exploitations, 5 m cela semble gérable. En revanche, aller sur des distances de 150 m, ce n’est pas raisonnable, l’impact serait énorme !
Ce qu’il y a d’hallucinant c’est qu’il y a trois-quatre ans, tout le monde était dans son jardin avec son pulvérisateur et aujourd’hui sous prétexte que l’on restreint l’utilisation des pesticides pour les particuliers on va imposer 150 m à côté du jardin, il y a quelque chose qui m’échappe.