Abbaye de Saint-Vivant
Abbaye de Saint-Vivant : La grande histoire de Bourgogne revit

Publié par Cédric Michelin
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L’ancien vendangeoir des Moines de Saint-Vivant abrite aujourd’hui le siège du Domaine de la Romanée-Conti. Située à quelques kilomètres de Vosne-Romanée, sur les hauteurs de Vergy, au cœur des Hautes-Côtes de Beaune, l’Abbaye de Saint-Vivant n’était plus qu’une « ruine romantique », se souvient Aubert de Villaine, lui qui aimait s’y promener. Ce haut lieu de la religion catholique fut en partie détruit à la Révolution, puis peu à peu abandonné. En 1996, le vigneron « prend conscience » d’une  « responsabilité pour ce tas de pierres du passé bourguignon ». Il décide alors, avec une équipe qui le suit, de sauver l’Abbaye de l’oubli auquel elle est condamnée.

Abbaye de Saint-Vivant : La grande histoire de Bourgogne revit

Fondée aux environs de l'an 900 pour abriter des reliques de Saint-Vivant, cette dernière devint Fille de la grande Abbaye de Cluny à la fin du Xle siècle. S’y succédèrent de nombreuses générations de moines bénédictins qui, à côté des moines cisterciens (Abbaye de Cîteaux à 13 km et surtout du Clos de Vougeot à 1 km), délimitèrent les « Climats » de Vosne-Romanée et de Flagey-Echezeaux notamment. Le lien devient ainsi évident avec le classement des "Climats du vignoble de Bourgogne" sur la liste du Patrimoine mondial de l’Humanité en 2015, même si ce site Clunisien n’entre pas dans le périmètre de l’ère restreinte classée à l’Unesco.

L'édifice est toutefois inscrit à l'Inventaire des Monuments Historiques. C'est pour le sauvegarder des ravages du temps qu'une association, "l'Abbaye de Saint-Vivant", fut créée en 1999. Grâce à la générosité de multiples donateurs privés et à des subventions accordées par l’Etat, d’importants travaux ont pu être réalisé depuis.

Chargée de les réaliser, l’entreprise Jacquet a « cristallisé » les ruines pour les protéger dans un premier temps. Plus récemment, une autre phase consista à consolider l’aile Est, avec notamment la restauration des voûtes endommagées de ses caves sur deux niveaux. « Ces caves sont monumentales. Elles ne sont pas enterrées mais l’épaisseur des murs fait que même par forte chaleur, la température est idéale pour y élever des vins », perçoit Aubert de Villaine. D’ailleurs, une bouteille de vins a été découverte durant le chantier. Les scientifiques l’ont analysé (carbone 14) et datée entre 1780 et 1820. Juste après les prélèvements nécessaires aux analyses, Aubert de Villaine se souvient encore de cette dégustation exceptionnelle : « c’était un liquide blanc avec des paillettes de couleur. On a eu ce sentiment de vin et puis, après, il s’est évaporé. C’était magnifique ».

Depuis le début de l’ouvrage, les artisans utilisent exclusivement des techniques traditionnelles. Les matériaux d’origines ont eux aussi été conservés : mortier de chaux, réutilisation au maximum de pierres issues du site, utilisation de pierre neuve la plus proche possible de celle présente... Comme autrefois, chacune est numérotée avant d’être mise en place. Il reste encore beaucoup à faire, comme la consolidation du mur extérieur et du chemin d’accès, mais le site va bientôt revivre et s’ouvrir au public pour des visites.

« Ce lieu ne méritait pas de disparaître. Les moines agronomes de Saint-Vivant ont dessiné, exploité, cultivé le vignoble et bâti son petit patrimoine – cabotes, murgers, clos… - dans sa configuration d’aujourd’hui. Même si ce n’est pas l’abbaye médiévale qui est ici restauré, ce site est la mémoire d’une époque qui a inventé la viticulture d’aujourd’hui. C’est une histoire formidable que ces moines bénédictins et cisterciens, ensemble et un peu en compétition, ont commencé à planter ici du pinot noir et par provignage l’ont multiplié et cultivé. Ce savoir-faire s’est transmis à travers des familles de vignerons successifs jusqu’au phylloxera. L’attachement et le respect de ces traditions permet à la Bourgogne de conserver sa notoriété et sa très grande histoire », exprime avec douce ferveur, Aubert de Villaine, résumant parfaitement la grande histoire de la Bourgogne et son âme qui est toujours bien vivante.

 

Cédric Michelin