Politique agricole commune
Simplification : Bruxelles lâche du lest

La Commission européenne a publié le 15 mars ses propositions pour répondre à la crise agricole qui touche l’ensemble de l’Union européenne. Elles concernent à la fois la Politique agricole commune (Pac) et l’amélioration de la place des agriculteurs dans la chaîne de valeur alimentaire.

Simplification : Bruxelles lâche du lest
Dans un communiqué de presse commun, le Copa et la Cogeca indiquent partager "l'analyse de la Commission et soutiennent ces mesures de simplification qui ne remettent pas en cause les transitions agricoles"©iStock-olrat

Jachères, haies, rotation des cultures, petites exploitations... La Commission de Bruxelles a proposé le 15 mars d’alléger quelques règles environnementales de la Pac qui étaient contestées par les agriculteurs. Sur le ratio des prairies permanentes (BCAE1), la Commission veut initier une refonte des règles applicables en tenant compte notamment de la déprise de l’élevage dans le calcul des ratios de référence. De même, elle propose de prendre en compte les surfaces qui ne sont plus déclarées par des agriculteurs qui ne répondent plus au critère d’agriculteur actif à compter de 2023 et d’assouplir l’obligation de réimplantation notamment en cas d’artificialisation des terres. Sur les jachères (BCAE8), Bruxelles entend pérenniser la dérogation accordée pour 2024. Autrement dit, dans les prochaines années, les jachères ne seraient plus obligatoires. Ne subsisterait plus que l'interdiction de tailler les haies pendant les périodes de nidification. « Il était vraiment difficile pour les agriculteurs d'accepter » ces obligations de jachères, mais « ils pourront toujours choisir de le faire sur une base volontaire » en échange de primes (« éco-régimes »), a indiqué le commissaire à l'Agriculture, Janusz Wojciechowski, à l’AFP.

Rotations

Concernant les prairies sensibles (BCAE9), la Commission veut assouplir le dispositif pour les exploitations, « de façon à maintenir le potentiel de production de ces prairies notamment en cas d’aléas climatiques ou en présence de nuisibles ou espèces invasives tout en ne remettant pas en cause leur nécessaire protection », précise le ministère français de l’Agriculture. Concernant la rotation des cultures (BCAE7), la Commission permet désormais aux États membres de remplir les obligations de rotation établies alternativement par des obligations de diversification des cultures.  À l’origine, les agriculteurs étaient contraints, par la PAC, de faire tourner leurs cultures avec une culture différente de l'année précédente sur 35 % des terres arables. Cette obligation pourrait donc être remplacée par une simple « diversification ». La Commission propose également d'exempter des contrôles et pénalités liés aux conditions environnementales les petites exploitations de moins de 10 hectares.

Changement de logiciel

Parmi les autres mesures annoncées le 15 mars, figurent le déploiement, sur le plan européen, des mesures des loi Égalim en faveur d’un approvisionnement de qualité et local de la restauration collective et la mise en place d'un « service d’audit sanitaire et agricole » pour répondre aux préoccupations concernant l’application des règles tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Union européenne. Si la plupart des changements adoptés par Bruxelles devraient entrer en vigueur en 2025, la Commission a signalé qu’elles auraient un effet rétroactif au 1er janvier 2024. Ce qui veut dire que les agriculteurs ne seraient pas sanctionnés pour ne pas avoir respecté ces conditionnalités (BCAE) cette année. Dans un communiqué commun, la FNSEA et JA ont salué « un début de changement de logiciel » et appelé à « une déclinaison française rapide, simple et efficace », des mesures proposées par la Commission. Sans le dire expressément, les deux organisations voient dans ces annonces, une victoire syndicale « après des mois de mobilisation des agriculteurs, en France et en Europe ». La FNSEA et JA saluent « la mise à l’agenda européen de la question de la répartition de la valeur dans la chaine alimentaire. La construction du revenu des agriculteurs est un sujet majeur de la crise actuelle et l’Europe semble enfin s’y intéresser, c’est un progrès indéniable ». 

Christophe Soulard