PROFESSIONNELS
Travailler dans une zone à faibles émissions

La création des zones à faibles émissions complique la circulation des professionnels et suscite des inquiétudes. Pour les accompagner, des acteurs proposent des solutions.

Travailler dans une zone à faibles émissions
Les interdictions liées à la mise en place des zones à faibles émissions compliquent la circulation des véhicules utilitaires et des poids lourds pour assurer les livraisons. ©DR

Depuis la création d’une zone à faibles émissions (ZFE) par Grenoble-Alpes Métropole en mai 2019, les véhicules utilitaires ayant un Crit’Air 4 ou 5 ou bien étant catégorisés « non classés » ne peuvent plus circuler dans 27 communes de la Métropole1. En juillet 2022, viendra le tour des Crit’Air 3. En 2025, l’objectif sera d’interdire tous les véhicules professionnels n’ayant pas un Crit’Air 1.

Circulation restreinte

Conçues pour participer à l’amélioration de la qualité de l’air respiré par les habitants, les ZFE imposent des règles strictes aux conducteurs d’utilitaires et de poids lourds, avec des conséquences lourdes pour les professionnels. « Je ne suis pas contre le fait qu’il y ait des restrictions en raison de la pollution, explique Jacqueline Rebuffet, vice-présidente de la chambre d’agriculture de l’Isère. Mais dans le contexte actuel, on ne peut pas exiger que chacun change de véhicule, d’autant plus que les délais d’obtention sont très longs et que dans le cas de l’achat d’un véhicule électrique, il faut payer très cher. » « Nous sommes agriculteurs, nous travaillons en circuit court et la ZFE est très contraignante pour nous », témoigne Régine Oddos. Agricultrice au sein du Gaec du Moulin, à Lalley, elle commercialise farine, lentille et viande de porc dans des villes concernées par la ZFE, comme Claix et Grenoble. « Nous avons des Crit’Air 3 et des Crit’Air 2, donc pour l’échéance de juillet 2022, nous pourrons nous débrouiller, mais lorsque seuls les Crit’Air 1 seront autorisés en 2025, ce sera plus compliqué », ajoute-t-elle. D’autant plus que les véhicules du Gaec du Moulin sont équipés de compartiments frigorifiques. Or, il n’y a actuellement pas de Crit’Air 1 avec une capacité suffisante en termes de kilomètres et de charge utile ou une autonomie convenable. « Et nous sommes en montagne, il faut que le véhicule soit capable de remonter la pente », précise Régine Oddos. « Nous comptons sur les dérogations qui seront mises en place et nous espérons que d’ici 2025, des utilitaires qui correspondent à nos besoins seront créés. Sinon, ce sera à la clientèle grenobloise de venir chercher nos produits… »

Épauler les producteurs

Il devient alors nécessaire pour les professionnels de s’y conformer. Pour certains, l’adaptation est facilitée par les structures qui les accueillent, comme le marché d’intérêt national (MIN) de Grenoble. Il regroupe une quinzaine de grossistes qui approvisionnent quotidiennement 200 clients. Quinze à vingt producteurs vendent quant à eux sur le carreau. Le site est également ravitaillé par un réseau de fournisseurs qui arrivent sur le site par le biais de transporteurs. « Avec la Métropole, nous avons mis en place un plan d’aménagement pour fournir aux professionnels des moyens pour respecter la réglementation », explique Jean-Luc Duperret, directeur du MIN. Des travaux d’aménagement d’une station GNV2 sont en cours sur le parking du MIN. Elle sera opérationnelle en septembre. Elle complétera l’offre qui existe déjà sur le parking du marché. Deux places munies de recharge pour les véhicules électriques sont laissées à disposition des grossistes. Dans l’année, le MIN passera à six bornes de recharge. Pour autant, même si le marché se place dans une démarche de transition énergétique et accompagne les professionnels vers ce mouvement, les difficultés semblent plutôt s’installer avec l’interdiction de circuler posée à l’encontre des Crit’Air 3. « Il est compliqué de modifier totalement un parc de véhicules, cela prend du temps », explique Jean-Luc Duperret. Pour d’autres, la solution choisie est la logistique mutualisée afin de faciliter les livraisons en ville. La structure Mangez Bio Isère, située dans le MIN, pratique cela depuis dix ans. « Ainsi, les trois quarts des flux de livraison de nos producteurs passent par le MIN », explique Lydéric Motte, son directeur. « Il faut aussi savoir qu’un quart de nos livraisons en centre-ville sont effectuées à vélo. Une remorque attachée à chacun de nos vélos permet de livrer 10 à 15 clients par jour. » Le reste des livraisons s’effectue en véhicule léger, Mangez Bio Isère étudie la possibilité de transformer la flotte diesel en GNV.

Morgane Poulet

* Bresson, Champ-sur-Drac, Champagnier, Claix, Corenc, Echirolles, Eybens, Fontaine, Gières, Grenoble, Jarrie, Le Pont-de-Claix, La Tronche, Meylan, Montchaboud, Noyarey, Poisat, Quaix-en-Chartreuse, Saint-Egrève, Saint-Martin d'Hères, Saint-Martin-le-Vinoux, Sassenage, Seyssinet-Pariset, Seyssins, Varces-Allières-et-Risset, Venon, Veurey-Voroize.
** Gaz naturel véhicule. Il s’agit d’un carburant essentiellement composé de méthane.