Fédération nationale bovine
Nouvel appel à retenir ses bovins

Cédric MICHELIN
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Dans un communiqué de presse du 18 juin, la Fédération nationale bovine (FNB) appelle tous les éleveurs, via les sections bovines de chaque FDSEA, à retenir au maximum leurs animaux en ferme, pour ceux qui le peuvent. L’objectif est toujours une « nécessaire valorisation des prix payés aux producteurs en viande bovine ». Explications.

Nouvel appel à retenir ses bovins

Un seul mot d’ordre : la FNB appelle les éleveurs qui le peuvent à retenir, au maximum, leurs animaux en ferme. « L’heure est à la nécessaire valorisation des prix payés producteurs en viande bovine ! ». Car le contexte s'y prête et pourtant rien n’avance ni dans les fermes, ni du côté des intermédiaires, ni dans les réseaux de distribution, ni dans l’application ou la rénovation des lois… 
Et pourtant, « quels que soient les indicateurs de marché analysés, ceux-ci sont se révèlent être au beau fixe depuis le début de l’année 2021 sur le secteur de la viande bovine ! », analysent froidement les élus de la FNB. Et de mentionner pêle-mêle les deux grands marchés : la consommation en viande bovine française (+4 % sur le premier trimestre 2021 vs 2020) et la demande dans les diverses catégories d’animaux. Dans ce dernier marché entre professionnels, la demande augmente en vaches de type viande (+4,9 % d’animaux abattus sur cette catégorie VS 2020, au 31 mai 2021), en JB (avance de sorties de 3.800 têtes au 30 mai 2021) ou encore en vaches laitières, avec une « vraie faiblesse de l’offre qui se traduit dans les abattages (-3 % des animaux abattus au 31 mai 2021) », fait le constat la FNB. Et pour parfaire ce panorama, la FNB note que concernant les débouchés exports en vif (+6 % vers l’Italie et +10 % vers l’Espagne, au 31 mai 2021 VS 2020), « tous (ces marchés, NDLR) vont dans le même sens et révèlent un contexte des plus favorables ! Seuls les prix payés aux producteurs ne suivent pas cette embellie, restant bien en-deçà des coûts de production ».

Il manque des euros !

C’est pourtant une obligation depuis la loi ÉGAlim qui devrait être appliquée depuis longtemps mais qui, dans les faits, repasse devant les parlementaires pour, espérons, une application réelle très prochainement.
En attendant, les éleveurs font le triste constat qu’une vache viande R= est payée à 4 €/kg en semaine 22 (cotation déduite de 15 centimes de frais d’approches) alors que le coût de production pour l’éleveur s’élève à 4,93 €/kg au 31 décembre 2020. Même aberration pour un JB U- à 3,80 €/kg en semaine 22 (cotation déduite de 15 centimes de frais d’approches) quand le coût de production s’élève à 4,77 €/kg au 31 décembre 2020. Il manque de nombreux centimes et les éleveurs ne veulent plus attendre, ni ne veulent des promesses. Ils attendent des actes. Et quoi de mieux que de mettre la pression pendant les élections et pendant la révision de la loi ÉGAlim, deuxième version. Le secteur aval n’a actuellement aucun argument pour refuser d’appliquer dans des contrats ces légitimes coûts de production.

« Il faut que cela cesse ! »

L’embellie sur les marchés viandes bovines se constate sur le territoire national mais aussi européen : c’est dans ce contexte que les cotations de la vache O ont connu une forte augmentation de leurs niveaux tarifaires depuis mars 2021 chez nos voisins européens (+0,60 € pour l’Irlande ; +0,80 €/kg pour l’Allemagne, +0,40 €/kg pour la Pologne). Dans ces pays, où la crise sanitaire a pourtant été plus forte qu’en France, on constate donc que les cotations ont retrouvé des niveaux tarifaires semblables à ceux d’avant crise Covid-19 ; résultante d’une reprise forte et d’une demande bien présente partout ! Il n’en faut pas plus pour la FNB qui alerte les élus et le gouvernement sur « un comportement irresponsable de l’aval de la filière, qu’il faut cesser ! » (lire encadré)

Faire remonter les cours

Les éleveurs de bovins viande demandent donc à ne plus être la variable d’ajustement de la filière. « C’est bien l’adéquation offre-demande qui doit se traduire dans les prix payés au producteur. Cette absence de signaux prix positifs est plus qu’irresponsable : il en va de la pérennité des éleveurs bovins viande et de toute une filière française qui en découle ! », ne veut plus subir la FNB. Et de cibler plus spécifiquement quelques mauvais comportements d’acteurs : « C’est donc dans ce contexte, particulièrement exacerbé sur les JB, que quelques acteurs de l’aval de la filière surfent sur une situation de marché florissante depuis plusieurs mois, tout en dénigrant totalement la juste rémunération des éleveurs et leur travail ! »
Face à cette situation et à l’absence totale de prise de conscience et de signaux concrets sur les prix, la FNB appelle donc les éleveurs, dans la mesure de leur capacité, à retenir en ferme, au maximum, leurs animaux, faute de revalorisation des tarifs. « Nous sommes éleveurs et nous sommes conscients de la situation économique extrêmement difficile dans laquelle se trouvent aujourd’hui les producteurs », rajoutent les élus FNB. La FNB lance cet appel aux éleveurs qui le peuvent et le temps qu’ils pourront. « Il est aujourd’hui vital de faire remonter les cours rapidement, en cohérence avec les signaux des marchés et la hausse forte des prix des matières premières ! », conclue la FNB.

D'après communiqué

Loi ÉGAlim 2, souveraineté, viandes locales ?

À l’heure où le gouvernement a acté et constaté publiquement l’échec de sa loi ÉGAlim promulgué le 30 octobre 2018, il souhaite la consolider via la proposition de projet de loi dite de Besson-Moreau, du nom du parlementaire de la majorité ayant porté les États généraux de l’alimentation et sa loi alimentaire ÉGAlim dans la foulée. Sa volonté, louable, était et reste de mieux protéger la rémunération des agriculteurs. Il y a urgence car, avec la reprise économique mondiale et notamment du côté de l’agriculture chinoise, les éleveurs subissent une vraie flambée des coûts des matières premières, qui se traduit par une augmentation de 15 à 20 centimes du coût de production depuis le 31 décembre dernier. Selon les calculs de la FNB, une vache viande R= devrait voir son coût de production dépasser la barre symbolique des 5 €/kg !
Depuis le début de la pandémie de Covid, les élus français n’ont eu de cesse de vouloir retrouver une souveraineté alimentaire. Depuis des semaines, les élections départementales et régionales ont largement confirmé une volonté de manger des bons produits locaux. Avec la levée progressive des règles sanitaires, les Français fréquentent avec force et envie les restaurants rouverts… en ayant déjà un peu oublié que l’approvisionnement en viande bovine française est un enjeu majeur pour nous ! Idem pour les grands acteurs de la filière qui « ne donnent toujours aux éleveurs aucune réponse, aucune solution viable, ni aucune visibilité sur le secteur de l’engraissement en France… bien que les réunions interprofessionnelles s’enchaînent sur le sujet depuis plus d’un an… », déplore la FNB qui en appelle aux pouvoirs publics pour une loi ÉGAlim 2 qui atteigne enfin ses objectifs.