EXCLU WEB / L’UE plus vulnérable sur le maïs

La fermeture du corridor humanitaire sur la Mer Noire pourrait provoquer une nouvelle tempête sur les marchés céréaliers. Or l’Union européenne s’apprête à importer 21 Mt de maïs pour compenser sa production déficitaire.

EXCLU WEB / L’UE plus vulnérable sur le maïs

La campagne française de maïs, le corridor maritime sur la Mer Noire et les exportations européennes de céréales sont les trois principaux sujets traités lors du dernier conseil spécialisé grandes cultures de FranceAgriMer. Malgré une collecte de 8,7 Mt de maïs (10 Mt en récolte), inférieure de près de 4 Mt à celle de l’an passé, notre pays parviendra à exporter 3,4 Mt vers ses voisins européens (3 Mt) et vers les pays tiers (0,4 Mt). Sur un an, ses ventes ne baisseraient ainsi que de 2,1 Mt. Mais ce que notre pays ne produit pas et n’exporte pas, l’Union européenne (UE) l’importe. Au moins 21 Mt de maïs seraient ainsi importées du Brésil, d’Argentine ou d’Ukraine au cours de la campagne 2022/2023, soit 5 Mt de plus que l’an passé. Tous les pays européens producteurs de maïs ont été pénalisés cet été par des conditions de cultures estivales caniculaires si bien que seules 55 Mt de maïs seraient récoltées (-18 Mt sur un an).

Mais l’élevage européen décline et la céréale est moins compétitive que le blé et l’orge. Aussi, l’industrie européenne de l’alimentation animale transformerait seulement 60,5 Mt de maïs en aliments et non pas 64,6 Mt comme l’an passé ou même encore 68 Mt en 2019/2020. En France, seules 2,3 Mt de maïs seront utilisées pour fabriquer des aliments (- 0,6 Mt sur un an). Les 8,05 Mt d’aliments produits durant la campagne (-0,5 Mt sur un an) seront ainsi davantage composés d’orges (1,3 Mt ; +0,3 Mt) et de blé (4,4 Mt) plus compétitifs à l’achat.

Exportations de blé

Les marchés mondiaux des céréales font peu de cas de la production française de maïs. Mais en se substituant partiellement à l’Ukraine et à la Russie, notre pays est aux avant-postes pour approvisionner les pays maghrébins en blé. Depuis le mois de juillet, la France a déjà exporté 3,7 Mt de blé. Par rapport à l’an passé, ses ventes ont doublé. L’Algérie et le Maroc ont importé 2 Mt de grains, et l’Egypte diversifie ses achats en important du blé européen et français notamment (225 000 t).

Mais l’orge française s’est moins bien vendue que l’an passé. Depuis le mois de juillet, seules 920 000 t ont été expédiées (1,44 Mt en 2021/2022) car la Chine n’a acheté que 363 000 t (1,3 Mt en 2021/2022). En novembre prochain, l’accord sur le corridor humanitaire maritime sur la Mer Noire, conclu pour 120 jours, pourrait ne pas être reconduit. Selon FranceAgriMer, la Russie s’y opposerait. A l’aube de la nouvelle campagne de moissons en Australie, en Argentine et au Brésil, la campagne de commercialisation de céréales prendrait alors une nouvelle tournure. Les exportations ukrainiennes seraient de nouveau entravées alors que chaque mois davantage de grains sont expédiés depuis les ports ukrainiens (3 Mt en septembre). Près de 40 Mt de céréales se retrouveraient sans débouchés.

Le « disponible » russe 

Mais la Russie tient-elle à s’afficher, auprès des pays africains, la nation qui affame la planète en faisant exploser les prix des céréales ? Par ailleurs, la Russie n’a vendu que 10 Mt de grains ces trois derniers mois, soit 3 Mt de moins que l’an passé alors que le disponible exportable est d’au moins 50 Mt. Sur son marché intérieur, les céréaliers russes ne parviennent pas à rentrer dans leurs frais. Les prix du blé payé « sortie ferme » sont jusqu’à deux fois inférieurs à leur niveau de l’an passé. Pour l’UE, deux scénarios se profilent. Si le corridor maritime de la Mer Noire est fermé, elle serait bien placée pour exporter les céréales. Si le corridor est maintenu, elle serait vivement concurrencée par l’Australie, l’Argentine et la Russie dont le blé est appelé à inonder les marchés. Mais quelle crédibilité peut-on accorder à ces scénarios dans le contexte géopolitique actuel ?