Comptes de l’agriculture
Une hausse en trompe-l’œil

L’Insee a publié le 15 décembre, les comptes prévisionnels de l’agriculture pour 2021. Si la hausse attendue et constatée reflète les performances de l’activité agricole, elle cache cependant bien des disparités.

Une hausse en trompe-l’œil

La Ferme France aurait de quoi se réjouir. En effet, selon les derniers chiffres de l’Insee, « la valeur de la production agricole a progressé de 7,5 % », indique le service statistique. Cependant, il s’empresse de préciser que cette augmentation est consécutive à la hausse du prix des matières premières, notamment de la production végétale : +11,6 %. En réalité, ce sont les céréales (+17 % en volume et +46,2 % en valeur) et les oléagineux (+9,5 en vol. / +53,6 % en val.) qui tirent les prix à la hausse, cette envolée des prix étant elle-même « consécutive au dynamisme de la demande mondiale », indique l’Insee.

Dans une moindre mesure, la valeur de la production animale augmente aussi, mais de manière beaucoup plus modérée (+1,8 %) bien qu’elle baisse en volume (-0,8 %). L’Insee y voit le résultat du « dynamisme de la demande intérieure, conséquence de la réouverture progressive de la restauration collective » et de la « fermeté de la demande mondiale ». À noter que seul le prix des porcins recule (– 4,5 %) pour la deuxième année consécutive, « sous l’effet de l’affaiblissement de la demande asiatique et du niveau élevé des stocks européens ».

35,5 milliards d’euros de valeur ajoutée

Contrairement à leurs collègues des grandes cultures, les viticulteurs et les arboriculteurs font grise mine. Comme il fallait s’y attendre après les terribles gels du mois d’avril, leurs productions se sont contractées : -11,3 % pour les fruits et -19,4 % pour le vin. En valeur, les fruits perdent -2,1 % et les vins – 13,4 %.

Les prix des aliments pour animaux dont la grande majorité proviennent des céréales se sont aussi envolés (+9,5 %). L’Insee pointe une baisse « en valeur des dépenses d’engrais et d’amendements (– 11,5 %) ». L’institut statistique explique ce phénomène par la diminution de leur recours en volume (– 10,6 %) et des prix légèrement plus faibles (– 1,1 %) durant la campagne d’utilisation. Au final, la valeur ajoutée brute du secteur agricole augmenterait de +14,2 %. Elle avait diminué de -2 % en 2020. Quant aux subventions versées aux exploitations, elles resteraient stables par rapport à 2020, avec un volume de 7,8 milliards d’euros. Surtout la Ferme France a créé cette année 35,5 milliards d’euros de valeur ajoutée brute.

« Une bouffée d’oxygène »

Réagissant à la publication de ces données, la FNSEA a souligné « des charges qui explosent » et qui ne manquent pas d’entamer le revenu agricole. « L’impressionnante flambée des charges agricoles ces derniers mois, que ce soit l’énergie, les engrais ou l’alimentation animale, est bien plus rapide que la hausse des prix agricoles et grèvera une fois de plus le revenu agricole », souligne le syndicat.

Il rappelle que les agriculteurs doivent, eux aussi, « bénéficier d’un retour de la valeur sur leur exploitation et de gagner en compétitivité pour tirer un revenu décent de leur activité et ainsi d’être en capacité de relever le défi de la souveraineté alimentaire à long terme ». Car en termes de revenus, « les agriculteurs français n’atteignent pas le niveau des voisins européens comme l’Allemagne et le Royaume-Uni », ajoute la FNSEA. De son côté Chambre d’Agriculture France (APCA) voit dans ces données statistiques « une bouffée d’oxygène […] un rattrapage après une mauvaise année 2020 avait plongé de nombreux secteurs agricoles dans de grandes difficultés ». Dans un accent optimiste, l’APCA estime que « l’agriculture maintient un cap de croissance, grâce, en particulier à l’investissement des agriculteurs français dans des stratégies de montée de gamme ».