SOLIDARITÉ
Afdi s’engage dans la promotion des femmes

Lors de son assemblée générale le 30 juin à Paris, l’Association pour le développement international (Afdi) a adopté un document d’orientation visant à lutter contre les discriminations liées au genre.

« À part les différences physiques, les différences entre les genres masculin et féminin proviennent de normes sociales imposées par l’éducation, les religions, voire les médias… Le genre dicte les comportements attendus des hommes et des femmes », a relaté Élisabeth Hofmann, maîtresse de conférences au laboratoire « Les Afriques dans le monde » à Sciences Po Bordeaux, lors de l’assemblée générale de l’Association française pour le développement international (Afdi) à Paris. Ces questions d’égalité entre femmes et hommes font l’objet de plus en plus d’attention, au niveau des politiques publiques, des actions des organisations internationales et locales. C’est pourquoi l’Afdi a décidé de s’emparer du sujet et en a fait le thème de son assemblée générale, au cours de laquelle elle a adopté un document d’orientation Stratégie Genre 2022-2027. Selon l’Afdi, les femmes représentent 43 % des agriculteurs dans le monde et sont responsables de 80 % de la production des denrées alimentaires, essentiellement les productions vivrières. Mais leur travail est faiblement reconnu. Elles subissent de profondes inégalités en matière d’accès aux facteurs de production, comme le foncier, le crédit, les intrants, les semences, l’eau. Pourtant, elles s’investissent davantage que les hommes dans l’alimentation du foyer et les dépenses familiales. Halima Tiousso, présidente du collège des femmes du Réseau des organisations paysannes et des producteurs de l’Afrique de l’Ouest (Roppa) le reconnaît : « les inégalités de genre sont basées sur des concepts socioculturels ». Dans son organisation, elle milite pour l’évolution des mentalités. Ses efforts commencent à être récompensés. Des changements sont d’ores et déjà perceptibles puisque les femmes commencent à entrer dans les organes de décision du Roppa et elles sont de plus en plus intégrées dans ses activités.

Priorité à la formation

Kodyang Palebele, président du Conseil national de concertation des producteurs ruraux du Tchad a bien conscience également du statut d’infériorité des femmes africaines. « Les femmes ne bénéficient pas d’une répartition équitable du revenu des produits de la récolte et leur productivité est plus faible car elles ont moins accès aux moyens de production, alors qu’elles jouent un rôle essentiel par leur travail dans la production des cultures vivrières et de rente », observe-t-il. Pour lutter contre ces discriminations qui leur sont faites, le Centre mène des actions d’alphabétisation réservées aux femmes ainsi que des formations spécifiques pour renforcer leur place et leur leadership dans les organisations paysannes. En France, ainsi que l’a rappelé Catherine Faivre-Pierret, administratrice de la commission féminine de la FNSEA, la mobilisation des femmes dans l’organisation syndicale a été à l’origine de nombreuses avancées quant à la reconnaissance de leur rôle et de leur statut en agriculture comme la constitution de Gaec entre époux et la reconnaissance de la transparence, la transformation possible des EARL entre époux en Gaec, la réforme du congé maternité… En réalité, des progrès ne sont réellement observés et les actions menées sont d’autant plus efficaces que si les attentes des femmes sont réellement prises en compte par rapport à leur vécu quotidien en évitant les recettes venues d’en haut ou d’ailleurs, ont noté la plupart des intervenants.

Actuagri

Souveraineté alimentaire

« Il faut que les politiques changent en Afrique »

« Comme un agriculteur doit donner à manger à sa famille, l’État a la responsabilité de nourrir sa population », a déclaré Ibrahima Coulibaly, président du Réseau des organisations paysannes et des producteurs de l’Afrique de l’Ouest (Roppa). Or les États africains n’en prennent pas le chemin. Pourtant ce ne sont pas les lois d’orientation ni les engagements à aller dans ce sens qui ont manqué. En fait, les États n’ont rien fait pour les mettre en œuvre. « Aucun investissement n’a été réalisé. On ne sait pas où va l’argent », a-t-il déploré. En Afrique, le pouvoir est détenu par une élite urbaine qui ne se préoccupe guère de production agricole et de sa population rurale. A contrario de tous les discours ambiants, l’Afrique est en mesure de se nourrir et n’a pas besoin du blé ukrainien, contrairement à ce qui est dit en Europe. Selon Kolyang Palebele, président de l’Organisation panafricaine des agriculteurs, elle est en mesure de produire suffisamment de manioc pour produire du pain si elle disposait du matériel et des engrais nécessaires. Appauvrie et désœuvrée, victime de la mal gouvernance des États, la jeunesse africaine se réfugie dans le djihadisme, qui est en mesure d’attirer les jeunes en leur procurant un revenu qu’ils ne trouvent pas ailleurs. C’est en relocalisant la production, la transformation, les financements que les choses pourront réellement changer. L’Afrique dispose de ressources naturelles abondantes que beaucoup de pays envient, a noté Kolyang Palebele. Encore faut-il qu’elles soient bien exploitées. Ce qui implique de profonds changements à l’intérieur des pays, et aussi à l’extérieur sur la nature et les modalités des aides qui peuvent être accordées.