Vins et spiritueux
Les vins français brillent encore à l’export

Les ventes de vins et spiritueux français à l’export, dopées par l’inflation, ont battu des records en valeur en 2022. Une aubaine pour le secteur viticole, mais un phénomène qui bénéficie essentiellement aux régions et appellations les plus prestigieuses.

Les vins français brillent encore à l’export

La présentation des résultats des exportations françaises de vins et spiritueux lors du salon Wine Paris/Vinexpo a surpris jusqu’aux professionnels eux-mêmes, tant les performances ont été élevées. « Nous avons atteint l’année dernière un nouveau palier historique », a résumé le président de la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS), César Giron à propos du chiffre de 17 milliards d’€ (Md€) de ventes sur les marchés extérieurs réalisées par la filière. C’est une hausse de +10,8 % par rapport à 2021 et la deuxième année de croissance à deux chiffres après 2021 (+28,3 %). L’envol concerne aussi bien les vins (+10,2 % à 11,6 Mds€) que les spiritueux (+11,6 % à 5,5 Mds€).

Cette spectaculaire progression en valeur est pour partie la conséquence de la forte inflation de 2022, estimée à +8,8 % par le FMI. « Mais cela ne retire rien au mérite de la filière », a souligné César Giron. « Les entreprises ont d’abord su absorber les effets de l’inflation sur leur activité et sont parvenues à créer de la valeur au-delà même de la hausse des prix », s’est-il félicité. Le PDG de Martell Mumm Perrier-Jouët a également souligné le fait que les vins et spiritueux français avaient réussi la performance de progresser sur presque tous leurs principaux marchés d’exportation : aux États-Unis (+14 %), le premier débouché de la filière, au Royaume-Uni (+7 %) ou encore au Japon (+23 %) à l’exception de la Chine et de Hong-Kong, destinations perturbées par la politique « Zéro Covid ». Les spiritueux exportés par la France, s’ils restent dominés par le cognac (72 % de l’ensemble), se diversifient également avec la forte progression de la vodka (+28 %) et l’apparition des whiskies français, dont plus de 100 millions d’euros (M€) ont pris le chemin des marchés extérieurs l’année dernière.

Des marchés à deux vitesses

L’analyse des chiffres dans le détail amène à apporter d’autres bémols. Si les ventes poursuivent leur envolée en valeur, le résultat est plus mitigé en volume. En nombre de caisses, les exportations de spiritueux - principalement le cognac - progressent plus modestement (+2,2 %) et celles de vins sont même en net recul (-6,6 % à 135,4 millions de caisses). « Les trois vignobles de Champagne, Bordeaux et Bourgogne représentent à eux seuls 70 % des exportations de vins français en valeur, contre seulement 30 % en volume », a observé César Giron, qui a reconnu qu’il y avait dans le domaine de l’exportation « une industrie à deux vitesses ». « Les exportations de vins de Pays d’Oc (IGP) ont reculé de 10 % en volume et progressé de seulement 1,2 % en valeur », illustre Antoine Leccia, le président du groupe viticole Advini. « La hausse du prix moyen de la bouteille a à peine couvert les hausses de charge pendant cette période ».

Investir dans la promotion

Selon les représentants de la FEVS, les bons résultats obtenus s’expliquent par l’attention portée par les entreprises aux évolutions des marchés de consommation à travers le monde, les pays-tiers absorbant désormais les trois quarts de l’export. « Nous sommes conscients des difficultés d’un certain nombre de viticulteurs aujourd’hui et de la nécessité de les accompagner », a poursuivi César Giron à propos de la crise actuelle du vignoble bordelais et des crédits annoncés pour distiller une partie de la surproduction. « Mais n’aurait-il pas été opportun de consacrer ne serait-ce qu’une partie des millions consacrés depuis trois ans à la gestion de crise, à la promotion internationale de nos produits ? C’est à l’export, et notamment vers de nouvelles destinations qu’il faudra aller chercher nos consommateurs de demain », a-t-il assuré.

Un conflit avec les États-Unis non résolu

Si l’année 2023 pourrait être à nouveau une année favorable aux exportations françaises, notamment grâce à une vendange 2022 de qualité et enfin abondante, une épée de Damoclès pèse toujours sur la tête des exportateurs : celle du conflit commercial entre l’Union européenne et les États-Unis sur l’aéronautique. « L’administration Biden, en arrivant au pouvoir, a certes suspendu les sanctions américaines sur les vins européens jusqu’à 2026, mais elle ne les a pas supprimées », a souligné César Giron. Celui-ci a appelé les autorités françaises et européennes à régler au plus vite le dossier. « C’est d’autant plus vital pour nous que le marché américain représente aujourd’hui près de 40 % de notre croissance à l’export », a poursuivi le président de la FEVS. En attendant, le retour de la Chine aux achats après une année encore marquée par les contraintes sanitaires pourrait être l’un des principaux leviers à l’export cette année.