Machinisme
La filière redoute une « désorganisation de la production agricole »

Cédric MICHELIN
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Les représentants des fabricants et des distributeurs de machines agricoles alertent sur les conséquences des tensions sur les matières premières et les composants. Elles affectent lourdement leurs entreprises et pourraient « désorganiser » la production agricole, craignent-elles.

La filière redoute une « désorganisation de la production agricole »
En Saône-et-Loire et aux alentours, plusieurs constructeurs et concessionnaires nous ont également fait part de leurs difficultés, invitant à la patience pour les livraisons de matériel neuf lorsqu’il n’est plus en stock. Des craintes se font jour également du côté des pièces détachées à l’heure des travaux de saison sollicitant plus fortement tout le parc matériel.

Dans une lettre ouverte commune adressée le 13 avril au gouvernement, les présidents du Sedima (distributeurs de machines agricoles) et d’Axema (constructeurs) souhaitent « alerter les responsables politiques français et européens » sur les effets combinés de l’inflation des matières premières (acier, énergie), de difficultés d’approvisionnement en certains composants et de la fermeture de débouchés liés à la guerre en Ukraine.

Les fédérations craignent d’abord pour leurs entreprises, à cause d’une demande en machines agricoles qui pourrait être réduite par l’inflation et la fermeture de marchés à l’export (Ukraine, Russie). « En 2021, les industriels ont exporté en Russie et en Ukraine des matériels pour une valeur totale de 166 M€ (4 % des exportations françaises de matériel agricole), en hausse de +60 % par rapport à l’année précédente, principalement des tracteurs, des charrues, des semoirs et des pulvérisateurs », rapportent Axema et Sedima.

Onze semaines de retard

Les deux organisations professionnelles redoutent aussi des difficultés de trésorerie chez les distributeurs qui ne réussiraient pas à répercuter ces hausses. « Certaines de ces entreprises pourraient disparaître du fait de cette tension sur les liquidités, qui s’ajoute à la tension sur les marges, et alors que les remboursements des PGE sont prochainement exigibles », préviennent les fédérations.

Elles craignent aussi une « désorganisation de la production agricole », en raison de l’allongement des délais de livraison de machines agricoles. Selon une enquête d’Axema, ces délais se sont allongés en moyenne de 11 semaines « par rapport à une situation normale. Ils sont actuellement de 19 semaines en moyenne pour l’ensemble des entreprises adhérentes d’Axema, et montent à 30 semaines pour les tracteurs ». Selon la filière du machinisme agricole, cela « peut mettre en péril la bonne exécution du travail de la saison et hypothéquer les récoltes à venir ».

En dernier lieu, les deux fédérations craignent une détérioration des relations entre distributeurs et agriculteurs, aussi bien pour la vente de matériel neuf que la reprise de matériel d’occasion. « La valeur vénale du matériel repris à l’agriculteur dans le cadre de son achat de matériel neuf est forcément plus basse que prévu et déséquilibre la relation financière entre distributeurs et agriculteurs », détaille le courrier.