EXCLU WEB / Les grandes cultures s’impliquent dans les services environnementaux

En vulgarisant de nouvelles pratiques, en entretenant le paysage, en veillant à la qualité de l’air et de l’eau, en favorisant la biodiversité les agriculteurs contribuent à répondre aux attentes sociétales et à améliorer leur image dans l’opinion tout en bénéficiant d’une contrepartie financière.

 

EXCLU WEB / Les grandes cultures s’impliquent dans les services environnementaux

Après l’élevage qui bénéficie de quelques années d’expérience, la labellisation bas carbone pour les grandes cultures devrait être reconnue prochainement par les pouvoirs publics. En effet, selon Jean-Christophe Debar qui animait, le 22 juin, un colloque en visioconférence organisé par Pluriagri sur l’intégration des grandes cultures dans le marché de la compensation carbone et les démarches de responsabilité sociétales et environnementales (RSE), l’agriculture est responsable de 17 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) hors CO2. Mais si l’agriculture émet des GES, elle dispose aussi d’un fort potentiel de réduction de ces gaz. Pour Jean-Christophe Debar, celui-ci est estimé à 39 % pour les GES agricoles. Et 90 % de ce potentiel de réduction se trouve dans la culture des céréales et des oléoprotéagineux, grâce au stockage de la matière organique dans le sol, d’après une étude de l’Inrae. 

20 à 40 €/tonne

Dans le secteur forestier qui bénéficie déjà de la labellisation bas carbone pour le boisement des terres agricoles, la reconstitution de peuplements forestiers ou la conversion de taillis en forêt, le prix de la tonne de carbone est compris entre 10 et 80 €/tec équivalent CO2, selon la nature des projets et l’intérêt que portent les financeurs qui souhaitent compenser leurs émissions, la plupart des projets se situant entre 20 et 40 €/tonne. Une fourchette très ample qui s’explique par le fait que  « ce n’est pas le prix et/ou la performance carbone qui sont le plus souvent recherchés, mais plutôt l’image que veut se donner une entreprise pour sa contribution à la neutralité carbone dans un territoire ou une filière », observe Olivier Gleizes, expert carbone au Centre national de la propriété forestière. Des propos corroborés par Nicolas Ferrière, cofondateur de la startup, Carbonapp dont le rôle est de rapprocher les offreurs et les demandeurs de crédits carbone et d’accompagner le déploiement du label bas carbone. « Danone par exemple a choisi de s’impliquer dans la filière laitière en finançant les projets bas carbone des éleveurs. Il y a des logiques de filière, le financeur est prêt à mettre de l’argent dans une filière plutôt que dans une autre ». D’autres fois c’est une logique territoriale qui prévaut. Ce qu’il faut retenir c’est que le prix n’est pas issu d’une confrontation sur un marché, mais il est négocié de gré à gré entre le financeur et le porteur du projet, ce prix dépendant surtout de son prix de revient et/ou de l’intérêt porté par l’entreprise.

En tout cas l’agriculture permet de réduire rapidement, sur quelques années seulement, les émissions de gaz à effet de serre (GES) (entre le moment où l’agriculteur s’engage et l’effet des changements qu’il a induit sur son exploitation pour atteindre l’objectif fixé). Ce qui peut intéresser certaines entreprises, soucieuses de l’affichage de leur engagement en la matière. 

L’amélioration de la biodiversité 

« Mais, le label bas carbone n’est pas la solution miracle pour régler la transition environnementale », assure le responsable de Carbonapp. Celle-ci passe aussi par d’autres prestations environnementales ou diverses actions en faveur de la biodiversité.

C’est la voie choisie par Hervé Lapie, à la tête de l’association « Symbiose pour des paysages de biodiversité », également président de la FDSEA de la Marne, qui, depuis sa création en 2012, favorise la biodiversité. C’est elle qui pilote le programme Apiluz qui vise à améliorer les ressources mellifères. Les agriculteurs engagés renoncent à faucher des bandes de luzerne sur trois mètres autour de leurs champs pour qu’elles arrivent à floraison et sur lesquelles les abeilles viennent butiner. En contrepartie, ils reçoivent une rémunération versée par le Conseil régional de 80 €/tonne pour deux tonnes par hectare. Le programme concerne aujourd’hui 1 700 km de bandes non fauchées, soit 560 hectares et mobilise 3 600 agriculteurs sur plusieurs départements. C’est également Symbiose qui a été à l’initiative de la création d’une trame verte sur la commune de Tilloy-Bellay dans la Marne, une commune traversée par le TGV, une autoroute et une route nationale. Les agriculteurs s’engagent à replanter des haies, à gérer et entretenir le bord des chemins. Sur la commune de Berru, une parcelle pédagogique de 30 ares a été créée sur laquelle ont été implantés des haies, de la jachère ordinaire et apicole, des bandes tampons, des hôtels à insectes…

L’interprofession des oléoprotéagineux travaille dans le même esprit en valorisant les services environnementaux rendus par les agriculteurs, qu’il s’agisse des actions en faveur de la biodiversité, l’amélioration de la qualité des eaux ou de l’atténuation du changement climatique par le stockage du carbone dans les sols. « Nous nous impliquons dans les cobénéfices de la labellisation carbone qui induit des changements de pratiques qui ont un impact favorable sur l’environnement », résume Guillaume Chartier de Terres Univia.