À quel prix négocier le foin sur pied est une question de saison récurrente à la période des fenaisons. Le dérèglement climatique et les stocks épuisés par les sécheresses ont encouragé les transactions de fourrage sur pied cette année. L’occasion de rappeler la méthode d’estimation proposée par la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire. 

À quel prix le fourrage sur pied ?
Le coût de récolte d’un foin s’élève à environ 230-240 €/ha soit 52 €/t brute, pour 4,5 t de foin/ha.

Ce printemps, de nombreux éleveurs ont été tentés par la vente ou l’achat de fourrage sur pied. Les trois sécheresses consécutives ont laissé des traces avec des hangars vides dans la plupart des exploitations et l’envie de reconstituer des stocks de sécurité – on recommande un surplus de + 15 % de stock par rapport au besoin du cheptel. Tôt dans la saison, un certain nombre de parcelles étaient candidates à la vente de foin sur pied. Mais, alors qu’il existe un prix de marché du foin, quel peut être le prix du fourrage sur pied ? Pour répondre à cette question de saison, les conseillers herbe de la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire proposent une méthode qu’ils ont détaillée dans l’Herb’Hebdo du 25 mai dernier.

Prix de marché du foin moins charges de fenaison

Le prix de l’herbe sur pied peut être estimé en retranchant du prix de marché du foin les charges engagées pour le réaliser.

L’estimation du coût de la chaîne de récolte en foin est réalisée à partir du barème d’entraide, main-d’œuvre, traction et fuel compris : fauche = 51 €/ha ; fanage (x2) = 36 €/ha ; andainage = 21 €/ha ; pressage = 71 à 85 €/ha (de 4,7 à 5,5 € /botte ronde avec filet suivant taille 120 ou 160 cm) ; transport = 50 €/ha (très variable suivant accès). Au total, le coût de récolte d’un foin s’élève donc à environ 230-240 €/ha soit 52 €/t brut, pour 4,5 t de foin/ha. Si le prix de marché de la tonne de foin est de 100 à 120 €/tonne brute départ ferme, le prix du foin sur pied peut ainsi être estimé à 59 à 68 €/tonne soit 265 à 306 €/ha pour une coupe à 4,5 tonnes de matière brute/ha. À noter que le prix de revient d’un hectare de foin, comprenant les charges de structures, une fertilisation d’entretien, la mécanisation, la main-d’œuvre, le stockage du fourrage…, est proche de 95-110 €/tonne de foin. « Ces éléments constituent une aide à la négociation mais en aucun cas un barème officiel », précisent les conseillers de la Chambre d’agriculture qui indiquent que la source des tarifs provient du barème d’entraide 2021.

Loi de l’offre et de la demande

« Le prix du foin sur pied dépend de l’offre et de la demande », confie Véronique Gilles, conseillère à la Chambre d’agriculture. Au regard des premières récoltes, les prix ne devraient pas flamber car les agriculteurs engrangent des fourrages en quantité et de qualité, rapporte la conseillère. Les parcelles fauchées les premières ont très vite reverdi, ce qui est de bon augure pour la suite, y compris pour des deuxièmes coupes.

Les méteils assurent

« La récolte de méteils en ensilage a permis de réaliser des stocks avant d’implanter du maïs. Ces méteils pouvaient être suivis de sorgho ou de moha, deux cultures qui supportent bien les coups de chaud. Il est également possible d’implanter des mélanges de légumineuses avec du trèfle d’Alexandrie ou du trèfle Incarnat. Mais ces cultures sont plus chères et plus aléatoires », informe Véronique Gilles.

Et le colza fourrager ?

Toujours dans une optique de maximiser les stocks, l’implantation de colza fourrager après moisson est une opportunité que certains agriculteurs pratiquent avec succès. Destiné au pâturage de fin d’été, le colza fourrager a l’avantage de libérer des surfaces d’herbe pour des coupes de regain. « Il supporte bien la chaleur et ne coûte pas très cher en semences. Riche en azote et pauvre en fibre, il doit cependant être pâturé au fil avec du foin ou de la paille à côté », recommande Véronique Gilles. Certains éleveurs commencent à s’intéresser à la possibilité d’implanter des betteraves fourragères à pâturer. Là aussi, le pâturage doit être rationné chaque jour car la betterave fourragère est très riche en sucres, met en garde la conseillère. Mais cette culture qui demeure très « technique » du fait d’une implantation délicate, a l’avantage de bien s’adapter à la chaleur.

 

Des dérobées pour compléter les stocks
Moha en culture dérobée.

Des dérobées pour compléter les stocks

Les dérobées d’été peuvent être un moyen de compléter ses stocks fourragers, mais c’est une production risquée, avec des rendements aléatoires liés aux conditions climatiques de l’été, prévient la Chambre d’agriculture. Suivant les stratégies et les besoins, plusieurs choix s’offrent aux éleveurs. Dans l’optique d’une recherche de quantité, certaines espèces comme les sorghos multi-coupes, mohas ou millets fourragers sont des plantes qui supportent bien la chaleur. Elles peuvent produire une bonne quantité de fourrage, avec un cycle assez court (80- 90 j). Par contre, ce sont des fourrages encombrants, avec une densité énergétique et une valeur azotée moyenne à faible. Ils peuvent être associés à des espèces améliorant ce deuxième critère comme les trèfles d’Alexandrie, les trèfles incarnats ou les pois fourragers. Dans l’optique d’une recherche de qualité, les associations graminées fourragères ou céréales + légumineuses et/ou protéagineux sont plus sensibles aux conditions climatiques (chaleur en particulier). Elles ont par contre une certaine polyvalence d’utilisation (fauche et/ou pâture). 

Les points clés de la réussite

Le semis des dérobées doit intervenir rapidement après la récolte du précédent pour profiter de l’humidité résiduelle du sol et pour que la culture puisse accomplir son cycle de végétation. Les techniques d’implantation sont diverses : labour, semis direct avec un combiné, à la volée, déchaumage puis semis… Toutefois, une bonne préparation du sol est indispensable afin de faciliter l’implantation (roulage). Il faut éviter l’étouffement de la dérobée par les repousses de céréales. Le labour peut s’avérer indispensable derrière la récolte d’une céréale désherbée avec une sulfonylurée (Allié, Gratil, Archipel, Harmony…). Positionner la semence à faible profondeur (moins de 2 cm dans la majorité des cas). Le lit de semence doit être soigné afin de faciliter la germination. Attention à utiliser la bonne dose de semis afin de couvrir au mieux le sol. Fertiliser en apportant en priorité l’azote, sauf en cas d’apport de matière organique sur chaume.