Bâtiments laitiers
Adapter les bâtiments laitiers aux fortes chaleurs

Marc Labille
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Quand elles sont élevées en bâtiment toute l’année, les vaches laitières sont confrontées aux fortes chaleurs de l’été. Le stress thermique impacte immédiatement la production laitière d’où le besoin d’adapter leur lieu de vie à la nouvelle donne climatique.

Adapter les bâtiments laitiers aux fortes chaleurs
La première étape du plan d’action pour lutter contre le stress thermique, c’est de vérifier les conditions d’abreuvement.

En bâtiment, les vaches laitières sont plus particulièrement exposées au stress thermique. L’augmentation de la taille des troupeaux, la robotisation de la traite, l’alimentation font que beaucoup de laitières passent toute l’année à l’intérieur où elles sont contraintes de supporter les excès de chaleur en été tout en continuant de devoir se protéger des conditions hivernales. Au fil des saisons, les animaux sont soumis à des amplitudes thermiques importantes qui obligent à faire évoluer les bâtiments, notamment s’ils ont été conçus uniquement pour abriter les bovins en hiver. Ces constructions doivent être suffisamment modulables pour s’adapter aux quatre saisons.

La survenance du stress thermique dépend de la température combinée à l’humidité. Une vache laitière subit déjà un stress léger dès 22 °C avec une humidité relative de 50 %. Et un stress sévère peut être atteint dès 26 °C si l’humidité ambiante est importante.

La multiplication des canicules estivales est devenue un réel problème dans les bâtiments d’élevage laitier. L’observation des animaux et du bâtiment peut mettre en évidence des indicateurs de stress thermique et des défauts d’ambiance : un halètement anormal, une rumination perturbée, des animaux qui se concentrent près d’un point d’eau, sous un ventilateur, ou qui restent debout inactifs… ; la fréquentation hétérogène des différentes zones du bâtiment, des traces d’humidité, de condensation, de poussière ; des courants d’air, des odeurs… Autant d’indices servant à établir un autodiagnostic d’ambiance.

Un bon abreuvement…

La lutte contre le stress thermique passe par un plan d’action bien ordonné. La première étape concerne l’abreuvement. Le besoin en eau peut doubler en période de forte chaleur d’où la nécessité impérative d’un abreuvement de qualité. « En été, chaque vache doit disposer d’au moins 10 cm d’abreuvoir avec un débit d’au moins 15-20 litres par minute », rappelle Olivier Girard, technicien bâtiment à la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire. En nombre suffisant, les abreuvoirs doivent être bien positionnés pour un accès aisé des bovins à l’eau. Cette dernière doit y être la plus propre possible.

Pour lutter contre la chaleur, les vaches laitières ont aussi besoin d’une alimentation adaptée. Il leur faut des fourrages appétents, car elles ont tendance à moins manger en situation de stress thermique. La distribution de la ration peut être temporairement fractionnée et décalée aux heures fraîches de la journée (tôt le matin, tard le soir). Un ajout de minéraux, de vitamines et de bicarbonate est recommandé. Par forte chaleur, la conservation des fourrages fermentés est délicate au silo comme à l’auge. Mieux vaut que cette dernière ne soit pas exposée aux rayons du soleil.

Réduire le rayonnement direct et indirect du soleil

Un des points essentiels de la lutte contre le stress thermique consiste à réduire le rayonnement direct et indirect du soleil à l’intérieur des bâtiments. Car ce rayonnement peut faire augmenter de plusieurs degrés la température ressentie par un animal. Il se produit à travers les ouvertures (portes, pans ouverts…), les translucides, les murs en béton… Au niveau des ouvertures (portes, filets), il faut concilier le besoin de circulation d’air avec le maintien de l’ombrage à l’intérieur du bâtiment. Les tôles translucides en toiture sont une source importante de rayonnement, informe Olivier Girard. D’autant plus si elles sont sur un rampant orienté sud ou ouest. Mieux vaut donc limiter leur présence. Des peintures spécifiques permettent de les rendre opaques. Des filets d’ombrage ou des débords de toiture peuvent atténuer l’impact d’ouvertures. Il est aussi recommandé de réduire la hauteur des murs en bétons à proximité des animaux. Bétons, galets, pierres, goudrons emmagasinent la chaleur durant la journée et ils la restituent à leur environnement en début de nuit.

La ventilation naturelle, la meilleure !

La ventilation est incontournable pour lutter contre la chaleur et la première solution à envisager est la ventilation naturelle, recommande Olivier Girard. Aujourd’hui, on conçoit les bâtiments comme des parasols (toiture opaque au rayonnement solaire) avec de larges ouvertures en partie basse sur les longs pans pour une circulation optimale de l’air. Dans des édifices de plus en plus grands, la traditionnelle ventilation par effet cheminée (entrée d’air par les côtés et sortie par le faîtage) est aujourd’hui remplacée par une ventilation transversale par « effet vent » avec de l’air qui entre d’un côté pour ressortir de l’autre en « balayant » toute la largeur du bâtiment. Les bâtiments existants peuvent être adaptés en ce sens. Des bardages peuvent ainsi être démontés et remplacés par des ouvertures modulables. Certaines solutions sont simples et peuvent être réalisées par l’éleveur lui-même. Il existe un grand nombre de solutions techniques telles que panneaux articulés, bardage ajouré coulissant, volets, rideaux, filets amovibles…

La qualité de la ventilation naturelle dépend de l’orientation du bâtiment et elle peut être perturbée par l’environnement de l’édifice. La topographie (talus), la présence d’un autre bâtiment, d’une rangée d’arbres… peuvent être à l’origine de retombées ou de rebonds d’air. « L’idéal est d’avoir au moins 25 à 30 m entre deux bâtiments », recommande Olivier Girard.

Pour mieux appréhender la ventilation naturelle d’un bâtiment, un outil a été développé par l’Institut de l’Élevage (en partenariat avec Eternit). Sous le nom de « Shelt-air », il permet de choisir les solutions techniques pour un bâtiment d’élevage existant ou à construire.

 

Du confort pour mieux résister à la chaleur
Face à la chaleur, tout doit être fait pour optimiser le confort des laitières.

Du confort pour mieux résister à la chaleur

Le confort a aussi son importance dans la lutte contre les fortes chaleurs. Certains troupeaux sont plus résilients que d’autres, notamment du fait d’un meilleur confort dans le bâtiment. Si le stress thermique pénalise les temps de couchage, le manque de confort joue aussi. Les éléments de confort à regarder sont les dimensions et le réglage des logettes ; le dimensionnement des aires de vie ; l’absence de surcharge des bâtiments. 

Ventilation mécanique : en seconde intention

La ventilation mécanique n’intervient que dans certaines situations et lorsque la ventilation naturelle ne suffit pas. Elle doit être installée avec soin avec des ventilateurs en nombre suffisant, placés aux bons endroits, suffisamment performants. Sinon le risque est de voir les animaux se regrouper dans les zones les mieux ventilées et déserter les zones mal ventilées ce qui pénalise la dissipation de la chaleur. En complément des ventilateurs, le bâtiment doit être suffisamment ouvert pour permettre le renouvellement de l’air ambiant. Les zones prioritaires à ventiler sont dans l’ordre : l’aire d’attente de salle de traite, les zones de couchage et la zone d’accès à l’auge puis les couloirs de circulation autour des logettes. Avec un robot de traite, la priorité va aux zones de couchage, à la zone d’accès à l’auge et à l’aire d’attente devant le robot. 

Brumisation et douchage : en ultime recours

A utiliser avec précaution, la brumisation ou le douchage ne doivent être envisagées qu’en dernier recours. Et ces solutions humides doivent obligatoirement être couplées à de la ventilation mécanique. Car elles ne doivent pas faire augmenter le taux d’humidité de l’air qui aggraverait le stress thermique. Autrement dit, la brumisation ou le douchage ne doivent être utilisés qu’en appoint d’une ventilation mécanique tournant déjà à plein régime. Ce flux d’air important évacue à la fois l’eau et la chaleur. Ces systèmes sont à utiliser sur des séquences intermittentes, uniquement aux périodes les plus chaudes avec une hygrométrie limitée.