Jean-François Bouillot à Prizy
De l’électricité solaire alimente la fromagerie à Prizy

Marc Labille
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A Prizy, Jean-François Bouillot s’est équipé d’une centrale solaire pour alléger la charge d’électricité de sa fromagerie. Un investissement qu’il ne regrette pas au regard des hausses du prix du kWH et maintenant qu’il est équipé d’un séchage en grange.

De l’électricité solaire alimente la fromagerie à Prizy
Avec une production photovoltaïque de plus de 15.000 kWh, Jean-François Bouillot estime pourvoir être autonome en électricité à hauteur d’environ 40%.

Jean-François Bouillot est à la tête d’un élevage de 50 chèvres à Prizy dans le Brionnais. Producteur de fromages frais et affinés en vente directe, il transforme l’intégralité du lait de ses chèvres dans sa fromagerie d’un peu moins de 50 mètres carrés. Bien équipé, avec tank à lait, climatisation, chauffe-eau, séchoir, haloir, chambre froide en plus de la salle de traite, l’outil est assez gourmand en énergie. L’éleveur payait en moyenne 5.000 € d’électricité par an pour une consommation annuelle d’environ 35.000 kWh. Et il vient de mettre en service un tout nouveau séchage de foin en grange, un équipement qui fait appel à une puissante ventilation mécanique. Après chaque engrangement, le foin vrac récolté à 50-60 % de matière sèche, doit être ventilé en continu pendant 48 heures. Durant les huit jours suivants, la ventilation se poursuit par intermittence selon l’hygrométrie de l’air ambiant. Le foin monte ainsi à 85 % de matière sèche en une dizaine de jours. Au total, durant la fenaison, le séchage en grange est actionné pendant une trentaine de jours durant lesquels la consommation d’électricité est importante, confie Jean-François.

Bien dimensionner le projet

L’idée de produire sa propre électricité lui est venue bien avant d’installer ce séchage en grange. L’éleveur avait suivi une formation sur le sujet auprès de la Chambre d’agriculture de Saône-et-Loire. Une société l’avait démarché sans succès. Puis Jean-François s’est décidé à faire réaliser un devis de toiture photovoltaïque en autoconsommation lorsqu’il a rencontré une entreprise locale à la réputation sérieuse. Les travaux ont été effectués au printemps 2022 pour une mise en service dans la foulée.

42 panneaux photovoltaïques - soit 70 mètres carrés de surface - ont été installés sur le toit de la chèvrerie-fromagerie. La puissance de cette centrale solaire est de 13,4 kWc. « Toute la difficulté du projet, c’est de bien le dimensionner. La centrale doit être ni trop importante ni pas assez », confie Jean-François. Il faut en effet pouvoir produire suffisamment d’électricité pour couvrir les besoins, mais limiter la revente, car le tarif de rachat par « EDF OA » est désavantageux à 6 centimes seulement le kWh. La centrale est reliée au compteur Linky de la ferme. Chaque année, Jean-François doit dresser une facture de l’électricité qu’il a injecté dans le réseau.

Une autonomie en électricité de près de 40 %

Durant sa première année de fonctionnement, la production de cette centrale solaire a atteint 17.000 kWh, chiffre supérieur aux prévisions. En revanche, le niveau d’autoconsommation est de 70 % ce qui est inférieur à l’objectif visé de 85 %, indique Jean-François. Avec ces premiers chiffres, l’autonomie en électricité de l’exploitation serait de 35 %. Un niveau que l’éleveur entend bien faire progresser. S’il avoue avoir été un peu déçu au départ, Jean-François admet aujourd’hui qu’il est « difficile de faire beaucoup mieux ». En effet, il ne faut pas sous-estimer tous les jours sans soleil, fait-il valoir. Les journées d’automne et d’hiver beaucoup moins lumineuses. Même plein-sud, la production se concentre aux heures de soleil avec un pic en milieu de journée. Même au printemps, elle cesse totalement vers 18-19h. Dans l’année, la production quotidienne oscille de 9 kWh en hiver à 95 kWh au mois mai-juin ! « Il y a aussi toutes les consommations nocturnes de la fromagerie, certaines H24, comme le séchoir, le haloir, etc. », complète l’agriculteur.

Contre les hausses du prix de l’énergie

Les hausses de prix de l’électricité du début d’année et celles à venir confortent malgré tout Jean-François dans sa satisfaction d’avoir réalisé cet investissement. Même si pour l’heure, il lui manque encore un outil qui lui permettrait de mieux piloter sa consommation au regard de sa production solaire.

La centrale photovoltaïque lui a coûté 18.000 € avec un prêt sur 12 ans. Le gain ne devrait pas être important pendant les années de remboursement du prêt, estime-t-il, mais l’économie sur la facture d’électricité devrait couvrir les annuités. D’autant que les simulations ont été calculées avec une hausse de 5 % du prix de l’énergie. Or la hausse est déjà de 15 %, fait valoir Jean-François.

Un séchoir à fromages plus économe en énergie

Parallèlement à l’installation du séchage en grange, Jean-François Bouillot a remplacé son ancien séchoir à fromages trop énergivore. À la place, il a opté pour un séchoir nouvelle génération doté d’un système de récupération de chaleur. La consommation du nouveau matériel est inférieure d’un tiers par rapport à l’ancien. « Cette économie permet de libérer des kWh pour le séchage en grange », confie l’éleveur.

Le séchage en grange pour mieux valoriser l’herbe

Le séchage en grange pour mieux valoriser l’herbe

Le séchage en grange a permis à Jean-François Bouillot de parfaire la qualité des fourrages distribués à ses chèvres. Auparavant, il ne disposait pas de son propre matériel de fenaison et, tributaire de l’extérieur pour ses chantiers, il engrangeait des foins de qualité médiocre et pas assez appétents pour des chèvres. La production laitière en était pénalisée quand les chèvres ne pouvaient plus pâturer (sécheresse, automne-hiver et début de lactation). Le séchage en grange était la solution idéale pour optimiser la qualité des fourrages. Il permet des fauches plus précoces autorisant une meilleure qualité et des conditions climatiques moins idéales. Le bémol, c’était le coût de l’investissement. Par chance, Jean-François disposait d’un bâtiment qui pouvait recevoir les aménagements nécessaires. Et, sur l’investissement conséquent, l’agriculteur reconnaît avoir été bien aidé dans le cadre du PCAE ainsi que par le biais de son GIEE caprin. Pour installer ce séchage, il a fallu refaire une charpente métallique pour supporter la griffe hydraulique servant à manipuler le foin en vrac. Une dalle a été coulée au sol. Dessus repose une ossature bois supportant les cellules stockant le fourrage. Ces cellules surmontent des sortes de caillebotis où circule l’air pulsé par le ventilateur. Jean-François a également investi dans une remorque autochargeuse d’occasion. Ce nouveau séchage en grange permet à Jean-François de mieux valoriser son herbe tout en améliorant l’autonomie alimentaire de son exploitation. Les analyses fourragères révèlent que la teneur en protéine de son foin a doublé (13 % de matière azotée totale). Cela permet à l’éleveur de moins acheter de concentrés et d’augmenter son rendement fromager, explique-t-il.