AOP Bœuf de Charolles
Une bonne dynamique depuis deux ans pour le Bœuf de Charolles

Marc Labille
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En 2021, le Bœuf de Charolles a connu une forte hausse d’activité atteignant 1.432 carcasses AOP. Cette embellie récompense des années d’efforts et de persévérance. Mais pour ce produit de qualité, l’enjeu est aujourd’hui de reconstruire une juste rémunération. 

Une bonne dynamique depuis deux ans pour le Bœuf de Charolles
Rendant hommage à tout le travail accompli par ses prédécesseurs, le nouveau président du Bœuf de Charolles Jacky Plançon entend « continuer à travailler sur la qualité du produit, poursuivre la promotion et toujours garder la main sur la valorisation ».

Pour le Bœuf de Charolles, l’année 2021 a été marquée par une hausse d’activité de +38 % en volume. Une progression spectaculaire qui a vu le nombre de carcasses valorisées en AOP passer de 1.035 en 2020 à 1.432 en 2021 soit 681 tonnes équivalent carcasses. Cette embellie devrait se confirmer pour 2022 puisque la filière prévoit une mise en marché de 1.600 carcasses dont un millier est d’ores et déjà agréé. 93 % des carcasses AOP sont commercialisées via la cheville Charollais Viandes de Paray-le-Monial.

En 2021, ces animaux ont été livrés par 128 exploitations agréées qui ont fourni en moyenne une douzaine de carcasses par exploitation. Un chiffre en nette hausse lui aussi. L’objectif pour le syndicat demeure de privilégier un volume suffisant par exploitation. L’idée n’étant pas d’accroître à tout prix le nombre d’adhérents mais au contraire que chacun vende suffisamment d’animaux pour optimiser le revenu de son exploitation. Une stratégie assumée qui se démarque des autres signes de qualité, rappelait l’ancien président Jean-François Ravault.

Pour 2021, la plus value par animal s’élevait à un peu plus de 149 € (34 centimes de plus-value par kilo de carcasse). Ce chiffre sera moins bon en 2022 du fait d’une conjoncture de prix moins favorable aux animaux de qualité, annonçaient les responsables.

Les bouchées doubles en matière de communication

Après une année 2020 figée par le Covid et ses confinements, 2021 a vu les animations et actions de promotion repartir à plein régime. Le Bœuf de Charolles a décidé de mettre les bouchées doubles en matière de communication et il s’est doté de nouveaux outils à cet effet (flyers, plaquettes, banderoles, barnum, stylos, etc.). Des rencontres avec les clients se sont enchaînées (dont salon Sirha à Lyon, salon de la gastronomie, évènements en lien avec la boucherie). Le Bœuf de Charolles a aussi investi les médias : interviews, web TV, presse, etc.

Tout au long de l’année, le Bœuf de Charolles a été présent sur de nombreux événements (marchés, fêtes, concours, dégustations, évènements sportifs, salons, etc.). Les opérations en lien avec des collectivités se développent, à l’image du Département qui a mis au menu des collégiens des saucisses et du bourguignon de bœuf à base de viande AOP. D’autres perspectives de ce type se dessinent avec l’agglomération dijonnaise, confirmant que la filière Bœuf de Charolles « est capable de fournir de tels marchés », se félicitait le président Jacky Plançon.

Grâce à l’augmentation de volume, le coût du plan de contrôle est passé de près de 16 € à moins de 12 € par tonne équivalent carcasse. Un coût très faible en comparaison des autres filières de qualité, faisait valoir Jean-François Ravault.

« Garder la main sur la valorisation »

« C’est sur ces bons chiffres de 2021 et au terme de 28 années de mandat » que l’ancien président a choisi de céder sa place à Jacky Plançon. Rendant hommage à tout le travail accompli par ses prédécesseurs, le nouveau président entendait s’inscrire dans la continuité. Ainsi prévoyait-il de « continuer à travailler sur la qualité du produit », un incontournable pour l’AOP. Jacky Plançon promettait aussi de poursuivre la promotion avant d’affirmer « son attachement et sa fierté d’éleveur » au Bœuf de Charolles. Enfin, dans le même état d’esprit que son prédécesseur, le nouveau président réaffirmait sa volonté de « garder la main sur la valorisation ». La rémunération à partir d’une grille stable dont les éleveurs de Bœuf de Charolles bénéficiaient est en effet remise en cause aujourd’hui. « Le débat sur la rémunération de l’AOP est donc à nouveau sur la table », estimait Jean-François Ravault. Et à l’heure des ÉGAlim, « il faut reconstruire une juste rémunération de notre produit ».

 

 

Étienne Perret à Saint-Edmond : une vingtaine de femelles AOP par an

Cette année, l’assemble générale du Bœuf de Charolles avait lieu à Saint-Edmond, commune limitrophe de la Loire où est installé Étienne Perret. L’exploitation est engagée dans le Bœuf de Charolles depuis le début, confie le père d’Étienne qui se souvient avoir accueilli les premières enquêtes dans le cadre du dossier de reconnaissance en AOP. Adhérente du groupement Sicarev, l’exploitation compte un troupeau de 100-110 vaches. Toutes les femelles sont engraissées. En 2021, Étienne Perret a livré 22 femelles en filière AOP et il devrait en fournir une vingtaine cette année. Pour avoir assisté à la montée en puissance de ce signe de qualité, le père d’Étienne confie que « ça va mieux maintenant car la demande est au rendez-vous ». Étienne Perret vient d’intégrer le conseil d’administration de l’appellation.

Avenir : le Bœuf de Charolles a de nombreuses cartes en mains…
Pour Thierry Turlan, « l’avenir appartient à ceux qui auront pris de l’avance ».

Avenir : le Bœuf de Charolles a de nombreuses cartes en mains…

Invité de l’assemblée générale du Bœuf de Charolles, Thierry Turlan, ingénieur à la Draaf Auvergne Rhône-Alpes, est venu livrer quelques données sur le devenir de l’élevage bovins allaitant. Il a notamment exposé quelques aspects de la consommation de viande bovine. Une consommation en baisse depuis 1980. Chez les Français, sur cette période, elle est passée de 33 kg par an à 22 kg. Ce sont les jeunes qui mangent le plus de viande, mais sous forme transformée et bon marché, pointait l’intervenant. Végétariens et autres végans ne représentent que 2,5 % des Français, mais ils sont surreprésentés chez les jeunes, observait Thierry Turlan. Sur le plan diététique, avec 350 grammes de viande rouge par semaine en moyenne, la plupart des Français ne dépassent pas les recommandations médicales. Mais pour les diététiciens, on consomme malgré tout sept fois trop de protéines animales (produits laitiers, œufs et viandes). Dominante avec 61 % des parts de marché, la grande distribution, en dépit d’une segmentation des rayons, fait la part belle aux bas prix et au bas de gamme. La restauration hors domicile, qui représente 24 % de la distribution, s’approvisionne à 50 % avec de la viande d’importation. Autre donnée importante : 25 % des familles sont dites monoparentales et plus de 10 millions de personnes vivent seules. Cela explique une tendance à la réduction des portions de viande et interroge sur le gabarit des animaux, estimait l’ingénieur.

Face aux questions sociétales liées à l’environnement, au paysage, au bien-être animal, l’AOP Bœuf de Charolles est plutôt bien armée, faisait remarquer Thierry Turlan. La prairie est l’atout le plus important. Elle constitue un argument de poids dans le débat sur la concurrence entre les surfaces dédiées à l’alimentation animale et celles dédiées à l’alimentation humaine ou « feed/food ». L’ingénieur évoquait ensuite l’importance du paysage avec son lien à l’histoire de l’élevage. Sur cette notion, l’AOP est exemplaire, reconnaissait Thierry Turlan qui incitait à accentuer encore cette mise en valeur. Il incitait même à améliorer les choses, quitte à augmenter le linéaire de haies au-delà du seuil fixé par le cahier des charges AOP…

Bon pour le stockage du carbone, le bocage et l’élevage allaitant sont toujours associés à une bonne qualité des eaux, soulignait-il et de rappeler que les arbres sont indispensables au bien-être animal… Pour répondre à la demande des consommateurs d’une production plus verte, le Bœuf de Charolles a plein de cartes en main, confirmait en conclusion l’expert. Mais les éleveurs ont à s’interroger sur leur marché AOP : évolution, stratégie, produit, tonnage, nombre de producteurs… Une dynamique, ciblant notamment les jeunes, s’impose. « Au regard de l’excellence du produit, de son cahier des charges, une plus-value de seulement 34 centimes d’euros par kilo de carcasse, ce n’est pas assez », lançait également l’ingénieur. Enfin, évoquant les diagnostics carbone et bien-être animal, Thierry Turlan concluait : « l’avenir appartient à ceux qui auront pris de l’avance ».